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- Lever une clause de non-concurrence par mail : la Cour de cassation précise
- Violation de la clause de non-concurrence et sort de la contrepartie financière
- En cas de rupture conventionnelle, quand l’employeur peut-il lever la clause de non-concurrence ?
- Les conditions de validité d'une clause de non-concurrence sont très strictes
Régulièrement des contentieux se produisent sur l’application de la clause de non-concurrence, au sujet de la contrepartie financière, sur le respect de cette clause par le salarié ou la levée de cette clause lors de la rupture du contrat.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de faire le point sur les notions importantes qui entourent cette clause particulière du contrat de travail en vous rappelant 2 cas particuliers envisagés récemment par la Cour de cassation.
Principe et objectif
La clause de non-concurrence a pour but d'interdire au salarié, après la rupture de son contrat, l'exercice d'une activité qui porterait préjudice à son ancien employeur.
Conditions de validité ?
5 conditions doivent être cumulativement respectées, à savoir :
- La clause doit être insérée clairement dans le contrat de travail (sauf dispositions conventionnelles contraires) ;
- La clause doit respecter les dispositions conventionnelles si celles-ci sont plus favorables ;
- Cette clause particulière doit nécessairement être justifiée par l'intérêt de l'entreprise et ne pas empêcher le salarié de retrouver un emploi ;
- La clause doit être limitée dans le temps, l’espace et l’objet ;
- La clause doit obligatoirement comporter une contrepartie financière.
Que se passe-t-il à la rupture du contrat de travail ?
Cas numéro 1 :
L’employeur peut « lever » la clause de non-concurrence lors du départ de son salarié (en pratique, cela se produit assez souvent).
Aucune contrepartie financière n’est alors réglée et le salarié n’est en aucune façon liée par la clause.
Cette renonciation doit nécessairement être prononcée dans le délai prévu par la Convention collective ou le contrat de travail.
Cas numéro 2 :
Si l’employeur ne libère pas le salarié de sa clause de non-concurrence, il doit alors régler au salarié les sommes prévues par la clause, au titre de contrepartie financière.
Ces sommes sont considérées comme des salaires, soumises à toutes les cotisations sociales et imposables au titre de l’impôt sur le revenu.
L’employeur doit aussi régler les congés payés correspondant, en pratique beaucoup d’entreprise ajoutent une ligne supplémentaire calculée à 10% de la contrepartie financière en paiement des congés payés dus.
Et si le salarié ne respecte pas la clause de non-concurrence ?
Dans ce cas, l’employeur pourra :
- S’adresser au Conseil de prud’hommes afin d’obtenir le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
- Cesser le paiement de la contrepartie financière bien entendu ;
- Demander le remboursement de la contrepartie financière versée pour la période de « non respect » de la clause.
Versement de l’indemnité
L’indemnité est due sans que le salarié ait besoin de prouver l’existence d’un quelconque préjudice.
Cour de cassation 31/03/1998 arrêt 96-43016
Elle ne dépend pas de l’ancienneté du salarié, même si cette dernière peut avoir une certaine influence combinée avec d’autres éléments.
Le montant de l’indemnité ne peut pas être diminué en cas de licenciement pour faute lourde du salarié.
Date de paiement de l’indemnité
Elle est versée dés le départ effectif du salarié en cas de dispense de préavis.
Cour de Cassation du 15/07/1998 arrêt 96-40866
Il n’est pas possible de prévoir le versement d’une indemnité au-delà de la période concernée par la clause de non concurrence.
Si cela était le cas, la clause de non concurrence serait nulle.
Régime fiscal et social de l’indemnité
Comme nous l’avons indiqué précédemment, la compensation financière versée au titre de la clause de non concurrence a valeur de salaire.
Elle est donc :
- Soumise aux cotisations sociales, y compris la CSG et la CRDS ;
- Imposable au titre de l’impôt sur le revenu.
Selon la circulaire ARRCO-AGIRC du 7/11/2007 (circulaire 2007-19), l’indemnité doit être considérée comme une « somme isolée ».
Il est conseillé sur le bulletin de salaire de faire apparaître l’indemnité sur une ligne isolée, en incluant l’indemnité de congés payés correspondante ou en prévoyant une autre ligne pour l’indemnité de congés payés correspondante.
Enfin, l’indemnité doit apparaître sur l’attestation Pôle emploi dans le cadre 7.1 (salaires des 12 derniers mois) ou 7.2 (primes et indemnités de périodicité différente).
Clause de non-concurrence et contrepartie financière : 2 cas particuliers
En cas de cession de titres
Dans une affaire récemment abordée par la Cour de cassation, les juges ont considéré qu’un associé ayant souscrit une clause de non-concurrence, lorsqu'il vend les titres de la société, à laquelle il participait, est tenu par cet engagement, même si la clause de non-concurrence ne comporte pas de contrepartie financière.
Ainsi, cette contrepartie financière n’est exigible que lorsque la personne concernée a la qualité de salarié, ce qui n’était pas le cas dans la présente affaire à la date de son engagement de non-concurrence.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour rejeter ces demandes et condamner le Z… à payer des dommages-intérêts à l'EURL Y(…) et à M. X..., l'arrêt retient la nullité de la clause de non-concurrence, relevant que les fonctions salariées de M. X... au sein de la société cédée étaient prises en considération pour apprécier la durée de la validité de la clause et que celle-ci avait nécessairement pour effet d'entraver sa liberté de se rétablir, de sorte qu'une compensation financière devait lui être offerte ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir constaté qu'à la date du protocole de cession prévoyant l'engagement de non-concurrence, M. X... avait la seule qualité d'associé et n'était devenu salarié que postérieurement à la conclusion du protocole prévoyant cet engagement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 juillet 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans, autrement composée ;Cour de cassation chambre commerciale Audience publique du mardi 8 octobre 2013 N° de pourvoi: 12-25984
Lorsqu’elle concerne un professionnel libéral
L’affaire abordée par la Cour de cassation récemment, concernait un mandataire inspecteur d’une société d’assurance, depuis le 3 novembre 1981.
Par la suite, il démission de son poste et reçoit à cette occasion une indemnité d'organisation et de portefeuille, pour conclure, le 16 janvier 1995, un mandat, sans exclusivité, le nommant aux mêmes fonctions dans une nouvelle circonscription ; que, révoqué pour faute grave le 25 avril 2006, il saisit la justice considérant que la clause de non-concurrence devait être déclarée nulle, au titre qu’aucune contrepartie financière n’était prévue.
Contredisant l’arrêt de la cour d’appel, la Cour de cassation considère, qu'au regard du caractère exclusivement libéral de l'activité de mandataire de l'intéressé, la validité de la clause litigieuse n'était pas subordonnée à l'octroi d'une contrepartie financière.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'au regard du caractère exclusivement libéral de l'activité de mandataire de l'intéressé, la validité de la clause litigieuse n'était pas subordonnée à l'octroi d'une contrepartie financière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Y…à payer à M. X... la somme de 52 500 euros, l'arrêt rendu le 21 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;Cour de cassation chambre civile 1 Audience publique du mercredi 2 octobre 2013 N° de pourvoi: 12-22846 12-22948