La prise d’acte entre dans le code du travail

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Prise acte rupture contrat travail

La prise d’acte entre dans le code du travail
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Au JO de ce jour est publiée la loi confirmant l’entrée dans le code du travail de la « prise d’acte de rupture du contrat de travail par le salarié ».

Nous vous proposons de découvrir dans le présent article les dispositions qui vont entrer en vigueur demain 3 juillet 2014, ainsi qu’un rappel des principales notions de ce cas de rupture très particulier du contrat de travail. 

Prise d’acte : les prud’hommes devront statuer dans un délai d’un mois

La loi publiée au JO de ce jour précise qu’en cas de rupture du contrat de travail par le salarié et de saisine du Conseil de prud’hommes :

  • L'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine ;
  • La phase préalable dite de « conciliation » s’en trouve supprimée selon nous. 

Un nouvel article (article L 1451-1) est ainsi inséré dans le code du travail. 

Extrait de la loi :

Article unique
Au chapitre Ier du titre V du livre IV de la première partie du code du travail, il est inséré un article L. 1451-1 ainsi rédigé :
« Lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de qualification de la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié en raison de faits que celui-ci reproche à son employeur, l'affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant sa saisine. » 

Objectif de la loi : sécuriser la situation du salarié et de l’employeur

L’objectif visé par la loi est de sécuriser la situation du salarié, vis-à-vis notamment des allocations chômage. 

La procédure, qui entre en vigueur demain 3 juillet 2014, pour la prise d’acte sera ainsi similaire à celle qui est actuellement en vigueur en requalification d’un contrat CDD ou d’un contrat d’intérim en CDI.

Rappelons que ce sera également bientôt le cas en cas de requalification d’une convention de stage en contrat de travail quand la loi encadrant les stages sera publiée au JO. 

Un délai moyen qui dépasse un an 

Actuellement, le délai moyen pour obtenir un jugement du Conseil de prud’hommes en cas de prise d’acte dépasse un an, parfois plus de 2 ans.

La présente loi devrait mettre fin à ce délai, même si les partenaires sociaux restent dubitatifs sur ce délai qu’ils pensent n’être que « théorique » dans la mesure où les Conseils de prud’hommes ne semblent pas être suffisamment armés pour faire face à des demandes urgents, l’avenir nous en dira plus… 

Prise acte rupture du contrat de travail : les principes généraux

Profitons de la publication de la présente loi pour rappeler brièvement quelques principes de la prise d’acte, rupture dite « atypique » du contrat de travail. 

Un « pari » sur l’avenir 

La prise d’acte de rupture du contrat de travail par le salarié implique que ce dernier invoque des griefs envers son employeur. 

Ainsi les griefs invoqués doivent être suffisamment importants pour qu’ils puissent ensuite être reconnus « fondés » par le conseil de prud’hommes.

Les conséquences sont importantes :

  • Les griefs sont fondés : la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul (notamment si la prise d’acte concerne un salarié protégé) ;
  • Les griefs ne sont pas fondés : la prise d’acte produit les effets d’une démission. 

C’est en quelque sorte une sorte de « pari sur l’avenir » que prend le salarié en rompant le contrat de travail par ce mode.

Une rupture à la seule initiative du salarié 

Ce mode de rupture est à la seule initiative du salarié. 

De son côté, un employeur qui estime qu’un salarié ne respecte pas ses obligations, doit prendre l’initiative de la rupture du contrat en engageant la procédure de licenciement.

Il n’est en aucun cas en droit de « prendre acte » de la rupture du contrat de travail. 

Cour de cassation du 25/06/2003 pourvoi n° 01-40235

Pour quels salariés ? 

Seul le salarié en CDI peut utiliser ce mode de rupture.

Prise d’acte : rupture immédiate du contrat 

La prise d’acte de rupture du contrat par le salarié a pour effet de rompre immédiatement sans qu’aucun préavis ne soit effectué. 

La prise d’acte de rupture du contrat de travail s’impose à l’employeur, qui ne peut s’y opposer, mais n’est pas dans l’obligation d’en accuser réception.

 Cour de cassation du 04/06/2008 pourvoi 06-45757

Prise d’acte : sous quelle forme ? 

Aucune forme légale n’existe, même si la plupart du temps, le salarié envoie une lettre recommandée avec avis de réception, ou remet son courrier directement à l'employeur (lettre remise en main propre contre décharge).

Cela a l’avantage de dater précisément la prise d'acte et de ne laisser aucun doute sur le mode de rupture. 

La prise d’acte peut être présentée par une personne agissant en tant que conseil du salarié, comme un avocat au nom de celui-ci.

Cour de cassation du 04/04/2007 pourvoi 05-42847

Prise d’acte : établissement du solde de tout compte 

Compte tenu du fait que la prise d’acte de rupture du contrat par le salarié a pour effet de rompre immédiatement le contrat de travail, l’employeur doit alors réaliser le « solde de tout compte ».

Le solde de tout compte entrainera donc l’obligation pour l’employeur de remettre les documents suivants : 

  • Le salaire du mois, qui doit être calculé au prorata temporis (Cour de cassation du 20/01/1999, arrêt 96-45042 D) ;
  • Les primes selon les règles applicables selon la convention collective (payables en cas de départ en cours d’année, proratisation, etc.) ;
  • Solde des droits acquis en termes de repos (repos compensateurs, journées RTT, compte épargne temps, etc.) ;
  • Indemnité compensatrice éventuelle de congés payés ;
  • Indemnité de non-concurrence si l’employeur n’a pas décidé de « lever » cette clause lors du départ de son salarié ;
  • Droits acquis au titre de la participation, de l’intéressement. 

La prise d’acte met fin au contrat de travail immédiatement.

L’indemnité compensatrice de congés payés doit être calculée donc à la date de la prise d’acte de la rupture (d’où l’intérêt de confirmer cette date pour éviter toute confusion ultérieure). 

Les conséquences de la prise d’acte

Elles sont bien entendu différentes selon que les griefs soient reconnus fondés ou pas, mais également si le salarié est protégé ou non.

Nous vous proposons un très bref résumé des différentes conséquences financières qui peuvent être envisagées (notre outil RH consacré à ce mode de rupture vous proposera une revue beaucoup plus détaillée des différentes conséquences).

La prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse 

Cela implique que :

  • Les griefs invoqués par le salarié sont fondés ;
  • Et que la prise d’acte concerne un salarié qui n’est pas protégé. 

Doivent alors être versées les sommes suivantes :

  • Une indemnité de licenciement (l’ancienneté prise en compte est celle qui est acquise lors de la prise d’acte) ;
  • Une indemnité compensatrice de préavis ; 
  • Une indemnité compensatrice de congés payés au titre du préavis non effectué ; 
  • Des dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
  • Un éventuel remboursement des allocations chômage (dans la limite de 6 mois) ;
  • Une éventuelle indemnisation au titre du DIF ;
  • Parfois des dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et abusif.

La prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul 

Cela implique que :

  • Les griefs invoqués par le salarié sont fondés ;
  • Et que la prise d’acte concerne un salarié protégé. 

Doivent alors être versées les sommes suivantes :

  • Une indemnité de licenciement (l’ancienneté prise en compte est celle qui est acquise lors de la prise d’acte) ;
  • Une indemnité compensatrice de préavis ; 
  • Une indemnité compensatrice de congés payés au titre du préavis non effectué ; 
  • Des dommages et intérêts au titre du licenciement nul ;
  • Une éventuelle indemnisation au titre du DIF ;
  • Une indemnisation au titre de la violation du statut protecteur.

La prise d’acte produit les effets d’une démission 

Dans ce cas, les griefs invoqués par le salarié n’ont pas été reconnus comme pouvant justifier la prise d’acte. 

Ne sont donc pas dues les sommes suivantes :

  • Indemnité de licenciement ;
  • Indemnité compensatrice de préavis et congés afférents ;
  • Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul. 

A contrario, le salarié peut être redevable du paiement de l’indemnité compensatrice de préavis, la prise d’acte rompt le contrat de travail immédiatement, le salarié n’a donc pas effectué de préavis.

Cour de cassation du 4/02/2009, pourvoi 07-44142

Cour de cassation du 8/06/2011, pourvoi 09-43208 

Référence

Extrait de la loi n° 2014-743 du 1er juillet 2014 relative à la procédure applicable devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié, JO du 2 juillet 2014