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Créée par la loi LMMT (Loi de Modernisation du Marché du Travail du 25/06/2008, JO du 26/06/2008), la rupture conventionnelle et ses spécificités se précisent au fur et à mesure, le jugement récent de la Cour d’appel apporte « sa pierre à l’édifice » !
L’affaire concernée
Un salarié est embauché en qualité de maçon en contrat à durée déterminée du 12 juin au 30 octobre 2006 suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 31 octobre 2006.
Le 8 avril 2009, les parties ont signé une rupture conventionnelle du contrat de travail qui a été homologuée à effet du 18 mai 2009.
Le 20 janvier 2010, le salarié saisit le conseil de prud'hommes pour contester cette rupture.
Il indique en effet ne pas être en possession d’un exemplaire de la convention et de plus n’avait pas daté l’exemplaire de la convention gardé par l’entreprise, ni fait précéder sa signature de la mention « lu et approuvé ».
Le jugement de la Cour d’appel
Les juges de la Cour d’appel donnent raison au salarié.
Un exemplaire pour chaque partie
Ils indiquent que le fait de ne pas posséder un exemplaire de la convention vient en contradiction avec l’article 1325 du Code civil qui stipule qu’en cas de conventions contenant des obligations réciproques, elles doivent être établies en autant d’originaux que de parties concernées pour être reconnues.
Extrait du jugement de la Cour d’appel
Aux termes de l'article 1325 du code civil, les actes sous seing privé qui contiennent des conventions synallagmatiques, ne sont valables qu'autant qu'ils ont été faits en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct.
Ainsi la convention de rupture conventionnelle d'un contrat de travail qui est un acte sous seing privé contenant des conventions synallagmatiques doit être établie en deux exemplaires, chaque partie ayant un intérêt distinct.
D'ailleurs, en stipulant qu'à l'expiration du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture, l'article L. 1237-14 du code du travail rappelle implicitement que la convention doit être établie en double exemplaire sans quoi, une des parties serait privée du droit d'exercer son droit de demander l'homologation.
Article 1325
Modifié par Ordonnance n°2005-674 du 16 juin 2005 - art. 2 JORF 17 juin 2005
Les actes sous seing privé qui contiennent des conventions synallagmatiques ne sont valables qu'autant qu'ils ont été faits en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct.
Il suffit d'un original pour toutes les personnes ayant le même intérêt.
Chaque original doit contenir la mention du nombre des originaux qui en ont été faits.
Néanmoins, le défaut de mention que les originaux ont été faits doubles, triples, etc..., ne peut être opposé par celui qui a exécuté de sa part la convention portée dans l'acte.
L'exigence d'une pluralité d'originaux est réputée satisfaite pour les contrats sous forme électronique lorsque l'acte est établi et conservé conformément aux articles 1316-1 et 1316-4 et que le procédé permet à chaque partie de disposer d'un exemplaire ou d'y avoir accès.
Exemplaire qui n’est pas daté et la signature n’est pas précédée de la mention « lu et approuvé »
Ceci vient en contradiction avec la circulaire de la DGT 2008-11 du 22/11/2008 2° B)
Extrait du jugement de la Cour d’appel
Par ailleurs, la convention de rupture conventionnelle doit être datée et signée par chaque partie avec la mention manuscrite 'lu et approuvé', ces mentions étant de nature à s'assurer du consentement des parties sur la totalité des dispositions de la convention. En l'espèce, M X n'a pas daté la convention et n'a pas fait précéder sa signature de la mention 'lu et approuvé'.
Conséquences
Par son jugement, la rupture conventionnelle est donc requalifiée en licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse.
Extrait du jugement de la Cour d’appel
En conséquence, la convention de rupture conventionnelle est nulle.
Sur les conséquences de la nullité de la convention de rupture conventionnelle :
La nullité de la convention de rupture conventionnelle vaut licenciement sans cause réelle et sérieuse ce qui ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice de préavis, peu important que le salarié ait travaillé pour un autre l'employeur et à une indemnité pour réparer le préjudice subi.
Conseils
Il convient d’apporter le plus grand soin au respect des formalités qui encadrent ce cas de rupture impliquant le consentement des deux parties, au risque de voir la rupture du contrat de travail requalifiée et entraîner des conséquences fâcheuses…
Références
CA Lyon 23 septembre 2011 n° 10/09122