Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
La Cour de cassation vient de rendre un arrêt, le 11 mai 2016, qui devrait intéresser de nombreux gestionnaires de paie…
C’est pour cette raison que nous vous proposons la présente actualité, dans laquelle est abordé le seuil annuel de déclenchement des heures supplémentaires en cas d’aménagement du temps de travail sur une année.
Présentation de l’affaire
Un salarié est engagé le 16 janvier 2013 en qualité d'agent de sécurité magasin par une entreprise de protection sécurité.
Contestant le compteur annuel de modulation sur l'année 2013, il décide de saisir la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires.
Il considère en effet, qu’ayant réalisé 1.750,58 d’heures de travail, il ouvre droit au paiement d’heures supplémentaires au titre des heures excédant le seuil annuel de 1.607 heures.
Ce n’est pas l’avis de l’employeur, qui reconnait certes qu’un seuil annuel de 1.607 heures est fixé dans le cadre d’un aménagement du temps de travail sur l’année, mais que ce seuil sous entend d’un droit aux congés payés complet.
Le salarié n’ayant pas fait l’acquisition d’un droit aux congés payés complet, compte tenu de son arrivée en cours d’année, ce seuil ne peut en aucun cas être retenu pour décompter les heures supplémentaires.
Le jugement du conseil de prud’hommes
Le conseil de prud'hommes de Reims, lors de son jugement du 20 octobre 2014, donne raison au salarié estimant que doivent être reconnues comme heures supplémentaires toutes les heures effectuées au-delà du seuil annuel de 1.607 heures.
L’arrêt de la Cour de cassation
S’étant pourvu en cassation, l’employeur est débouté par la Cour de cassation dans son arrêt du 11 mai 2016.
Elle rappelle à cette occasion les termes de l’article L 3122-4 modifié par la loi du 20/08/2008.
Elle confirme qu'il résulte de ces dispositions que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut être supérieur au plafond de 1.607 heures de travail par an, quand bien même le salarié n'aurait pas acquis l'intégralité de ses droits à congés payés au titre de la période de référence prévue par l'accord.
Ce qui fait selon nous tout l’intérêt du présent arrêt, raison pour laquelle nous vous proposons la présente publication, c’est qu’il permet de transposer aux nouveaux accords d’organisation du temps de travail instaurés par la loi LDSTT de 2008, de précédents arrêts rendus en matière de modulation.
Article L3122-4
Modifié par LOI n°2008-789 du 20 août 2008 - art. 20 (V)
Lorsqu'un accord collectif organise une variation de la durée de travail hebdomadaire sur tout ou partie de l'année ou lorsqu'il est fait application de la possibilité de calculer la durée du travail sur une période de plusieurs semaines prévue par le décret mentionné à l'article L. 3122-2, constituent des heures supplémentaires, selon le cadre retenu par l'accord ou le décret pour leur décompte :
1° Les heures effectuées au-delà de 1 607 heures annuelles ou de la limite annuelle inférieure fixée par l'accord, déduction faite, le cas échéant, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire éventuellement fixée par l'accord et déjà comptabilisées ;
2° Les heures effectuées au-delà de la moyenne de trente-cinq heures calculée sur la période de référence fixée par l'accord ou par le décret, déduction faite des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire fixée, le cas échéant, par l'accord ou par le décret et déjà comptabilisées.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que l'employeur fait grief au jugement de le condamner à payer au salarié une somme à titre d'heures supplémentaires alors, selon, le moyen :
1°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans analyser, même sommairement, les pièces produites par la société (…) au soutien de ses prétentions, le conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en application de l'article 7-2-3 de l'avenant n° 4 du 2 février 2010 révisant l'accord d'entreprise du 6 juillet 2005 relatif à la réduction et à l'aménagement du temps de travail, dans le cadre de la modulation du temps de travail, la durée annuelle de travail effectif d'un salarié engagé à temps plein n'est égale à 1.607 heures que pour les salariés « bénéficiant d'un droit à congés complets (30 jours ouvrables) » ; qu'en retenant le nombre de 1607 heures comme seuil au-delà duquel devaient être comptabilisées les heures supplémentaires, sans rechercher, ainsi qu'il y était cependant invité, si le salarié bénéficiait pour l'année 2013 d'un droit à congés complets, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7-2-3 de l'avenant n°4 précité du 2 février 2010, ensemble les articles L.3122-2 et suivants du code du travail ;
Mais attendu que, selon l'article L. 3122-4 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2008-789 du 20 août 2008, lorsqu'un accord collectif organise une variation de la durée hebdomadaire sur tout ou partie de l'année, constituent des heures supplémentaires, selon le cadre retenu par l'accord, les heures effectuées au-delà de 1607 heures annuelles ou de la limite inférieure fixée par l'accord, déduction faite, le cas échéant, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire éventuellement fixée par l'accord et déjà comptabilisées ; qu'il résulte de ces dispositions que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut être supérieur au plafond de 1607 heures de travail par an, quand bien même le salarié n'aurait pas acquis l'intégralité de ses droits à congés payés au titre de la période de référence prévue par l'accord ;
Et attendu qu'ayant constaté que le salarié avait effectué 1750,58 heures et qu'en déduction des jours fériés payés et des 15,98 heures réglées en décembre 2013, il restait un solde de 99,75 heures supplémentaires, le conseil de prud'hommes qui énonce exactement que toute heure effectuée au-delà du plafond de 1607 heures annuelles doit être considérée comme heure supplémentaire a, par ce seul motif et sans avoir à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, motivé et légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Information bonus…
Rappelons enfin un autre arrêt de la Cour de cassation, qui avait eu la même attitude lorsqu’un salarié n’avait pas utilisé cette fois l’intégralité des jours de congés payés acquis durant la période couverte par un accord de modulation.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu qu' il résulte des dispositions des articles L. 3122-9 et L. 3122-10 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut être supérieur au plafond de 1 607 heures de travail par an, quand bien même le salarié n'aurait pas pris l'intégralité de ses congés payés au titre de l'année écoulée ; que la cour d'appel, par une décision exempte de vice de motivation, a décidé à bon droit qu'il n'y avait pas lieu de déduire du temps de travail de la salariée les jours de congé ou à « 0 heure » non pris par elle pour la détermination du seuil de déclenchement de son droit à majoration pour heures supplémentaires ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;Cour de cassation chambre sociale
Audience publique du jeudi 15 mai 2014
N° de pourvoi: 13-10468
Non publié au bulletin
Références
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 mai 2016
N° de pourvoi: 14-29512 Publié au bulletin
Jugement du Conseil de prud'hommes de Reims , du 20 octobre 2014