Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Un arrêt de la Cour de cassation a retenu toute notre attention, raison pour laquelle nous avons décidé de le mettre en avant dans la partie « actualités » de notre site.
Y est abordée la soumission aux cotisations sociales d’une indemnité transactionnelle versée dans le cadre d’une rupture anticipée d’un contrat CDD…
Présentation de l’affaire
A la suite d’un contrôle d’une réputée société de club de rugby, au titre de la période du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2008, les services de l'URSSAF notifient un redressement portant notamment sur des sommes versées à titre d'indemnités transactionnelles en rapport avec la rupture anticipée d’un contrat CDD.
Contestant ce redressement, la société saisit d'un recours une juridiction de sécurité sociale, l’employeur considèrant que l’indemnité transactionnelle ne devait pas être assimilée à un salarié, ayant pour but d’indemniser le salarié du fait de la perte de son emploi.
Extrait de l’arrêt :
(…) qu'en se bornant à retenir que les indemnités transactionnelles versées à (…), à la suite de la rupture anticipée de leur contrat à durée déterminée de joueur de rugby professionnel, « doivent être effectivement assimilées à des salaires, et donc soumises à cotisations », sans vérifier si ces indemnités ne visaient pas à réparer le préjudice des joueurs de rugby lié à la perte de leur emploi et si, par voie de conséquence, elles n'étaient pas assimilables à une « indemnité de licenciement » au sens de l'article 80 duodecies et, comme tel, exonérées de cotisations de sécurité sociale en deçà des plafonds légaux
L’arrêt de la cour d’appel
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans son arrêt du 25 mars 2016, n’est pas sensible aux arguments de l’employeur et le déboute de sa demande.
Elle considère en effet que l’indemnité transactionnelle, versée dans le cadre d’une rupture anticipée d’un contrat CDD, est assimilable à un salarié, soumise de ce fait aux cotisations sociales.
L’arrêt de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rejetant le pourvoi formé par l’employeur.
Les juges justifient cet arrêt, en indiquant que les sommes accordées, même à titre transactionnel, en cas de rupture anticipée d'un contrat CDD ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du CGI ouvrant droit à l’exonération sociale ou fiscale (comme les indemnités de licenciement).
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que les sommes accordées, même à titre transactionnel, en cas de rupture anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts auquel renvoie l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
Et attendu qu'ayant relevé que les sommes objet de la transaction concernaient des joueurs titulaires de contrats de travail à durée déterminée en cours d'exécution, la cour d'appel en a exactement déduit que les sommes versées en exécution de ces transactions entraient dans l'assiette des cotisations ;
Confirmation d’une décision du Conseil d’État et de la Cour de cassation
L’arrêt de la Cour de cassation que nous abordons aujourd’hui confirme une décision du Conseil d’État et un arrêt de la Cour de cassation qui avaient confirmé que l’indemnité transactionnelle, versée à l’occasion de la rupture anticipée d’un contrat CDD, est totalement soumise :
- A l’impôt sur le revenu ;
- Aux cotisations sociales ;
- Aux cotisations CSG et CRDS
Extrait « Abécédaire social et paye 2011 » Éditions INDICATOR :
Indemnité pour rupture anticipée contrat CDD : imposable ?
Le directeur technique d’un club de football s’était mis d’accord avec son employeur pour transformer son contrat CDI en un contrat CDD
6 mois plus tard, l’employeur avait prononcé la rupture du contrat CDD.
Le salarié avait obtenu une indemnité de 450 000 € dans le cadre d’un protocole d’accord.
Le directeur technique n’avait pas déclaré aux services fiscaux cette indemnité et un redressement lui avait été notifié.
L’ancien salarié du club de football a considéré que la somme versée correspondait à une sorte d’indemnité de « licenciement » et se trouvait au minimum partiellement exonérée d’impôt sur le revenu.
Le Conseil d’Etat ne donne pas raison au demandeur, estimant que le redressement décidé par les services fiscaux était conforme à la législation.
Conseil d’état du 05/05/2010 arrêt 309803 (…)
Le Conseil d'État confirme le redressement décidé par l'administration fiscale au motif que le salarié en CDD ne pouvait pas percevoir une somme qualifiée « d’indemnité de licenciement » mais que l’on devait considérer comme une « indemnité pour rupture anticipée de son contrat CDD »
En l’occurrence, cette indemnité n’entre pas dans la liste des indemnités de rupture ouvrant droit à exonération comme l’indique l’article 80.
Profitons de ce jugement, avant de vous laisser la dégustation de l’article 80 duodecies du CGI, pour indiquer que l’administration fiscale considère que l’indemnité de rupture anticipée d’un contrat est :
est imposable à hauteur des sommes correspondant aux rémunérations que le salarié aurait perçues jusqu'au terme de son contrat.
Seule la fraction excédentaire est susceptible d'être exonérée d'impôt, dans les mêmes limites que l'indemnité de licenciement (BO 5 F-8-00, n° 5).(…)
Extrait « Abécédaire social et paye 2011 » Éditions INDICATOR :
Indemnité pour rupture anticipée contrat CDD : imposable ? (épisode 2)
Encore une fois, l’affaire se déroule au sein du milieu sportif.
Des joueurs et des entraîneurs d’un équipe de basket, tous sous contrats CDD, voient leur contrat rompu de façon anticipée pour
faute grave pour certains ;
par commun accord pour d’autres.
Ce qui est commun à toutes ces ruptures, c’est le fait qu’elles soient toutes suivies d’une négociation au terme de laquelle une indemnité transactionnelle est versée.
Lors du versement de cette indemnité, l’employeur considère que celle-ci est exonérée de cotisations sociales.
Pour la Cour de cassation, cette indemnité est soumise aux cotisations sociales et les juges justifient leur décision en s’appuyant sur l’article 80 duodecies du CGI ainsi que sur l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale.
Ces deux références indiquent que :
toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des exceptions énumérées limitativement ;
aucune des indemnités de rupture anticipée prévues à l'article L.1243-4 du Code du travail (dommages-intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations dues jusqu'à la fin du contrat ou indemnité de fin de contrat) ne figure dans cette énumération.
Le fait que cette indemnité ait été versée dans un cadre transactionnel ne change rien à l’affaire selon la Cour de cassation.Cour de cassation du 07/10/2010 pourvoi U 09_12.404 arrêt 1774 FS-P+B (…)
Références
Cour de cassation chambre civile 2 Audience publique du jeudi 6 juillet 2017
N° de pourvoi: 16-17959 Publié au bulletin