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Voici un arrêt de la Cour de cassation qui peut inciter les employeurs à agir avec prudence vis-à-vis de la périodicité du paiement des salaires, au risque de voir la prise d’acte reconnue justifiée, donc une rupture produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Présentation de l’affaire
Une salariée est engagée, le 12 juillet 2005, en qualité d'assistante de gestion, par la société d’ambulances.
Elle prend acte de la rupture de son contrat de travail le 19 août 2013, et saisit la juridiction prud’homale, demandant à ce que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Elle reproche à son employeur plusieurs retards de paiement de sa rémunération, considérant que ces manquements de l’employeur à son obligation sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite des relations contractuelles.
À l’appui de sa demande, la salariée indique que le salaire :
- De janvier 2013 a été payé le 14 février 2013 (soit plus d’un mois après la date de paiement du salaire de décembre 2012) ;
- De février 2013 a été payé le 13 mars 2013 ;
- De mars 2013 a été payé le 10 avril 2013 ;
- D’avril 2013 a été payé le 6 mai 2013 ;
- De mai 2013 a été payé le 14 juin 2013.
Extrait de l’arrêt :
que le salarié soutient que sa prise d'acte est justifiée par plusieurs manquements graves de l'employeur à ses obligations contractuelles et légales telles que l'absence de réponse à sa demande de prise de congés, le versement tardif de ses salaires de janvier versé le 14 février 2013, de février le 13 mars 2013, de mars le 10 avril 2013, d'avril le 6 mai 2013, de mai le 14 juin 2013 et ceux du 1er juin au 19 août 2013, régularisés postérieurement à sa prise d'acte,
De son côté, l’employeur tentait de justifier que les deux retards de paiement « de quelques jours en janvier et mai 2013 étaient dus aux difficultés liées à la reprise de l'activité et avaient concerné l'ensemble du personnel ».
Extrait de l’arrêt :
en démontrant que les deux retards de paiement du salaire de quelques jours en janvier et mai 2013 étaient dus aux difficultés liées à la reprise de l'activité et avaient concerné l'ensemble du personnel,
L’arrêt de la cour d’appel
La Cour d'appel de Chambéry, dans son arrêt du 20 octobre 2016, donne raison au salarié.
L’arrêt de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme en tous points l’arrêt de la cour d’appel, rejetant à ce titre le pourvoir formé par l’employeur.
Constatant que l'employeur avait à plusieurs reprises, sur une période de 5 mois, payé la salariée avec du retard, ce qui constituait un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, et donc justifier la prise d’acte par la salariée.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait à plusieurs reprises, sur une période de cinq mois, payé le salaire de l'intéressée avec retard, a pu décider que ce manquement était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Rappel des dispositions légales
Ainsi que le rappelle la Cour de cassation dans son arrêt, l’article L 3242-1 du code du travail confirme qu’en ce qui concerne les salariés mensualisés :
- Le paiement doit être effectué une fois par mois.
Le présent arrêt rappelle que le délai séparant 2 paiements de salaire ne saurait être supérieur à… 1 mois. (le délai maximum d'un mois devant séparer le paiement de chaque rémunération).
Article L3242-1
La rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois. Le paiement mensuel neutralise les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l'année.
Pour un horaire équivalent à la durée légale hebdomadaire, la rémunération mensuelle due au salarié se calcule en multipliant la rémunération horaire par les 52/12 de la durée légale hebdomadaire.
Le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié qui en fait la demande.
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.
Référence
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 30 mai 2018
N° de pourvoi: 16-28127 Non publié au bulletin