Cet article a été publié il y a 12 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
C’est en tout cas ce qu’il ressort d’un jugement récent de la Cour d’appel de Paris.
Les faits concernés
Un salarié est engagé, en qualité de maître d’hôtel le 1/09/1999.
Pendant l’exécution de son contrat, le salarié s’est vu notifié plusieurs avertissements pour des manquements dans l’exercice de ses fonctions.
Une sanction lui est notifiée le 4/12/2008 pour discourtoisie vis-à-vis de la clientèle.
Le salarié, candidat aux fonctions de délégué du personnel le 25/11/2008, n’est pas élu.
Dans le cadre d’un projet de rupture conventionnelle, il est convoqué le 23/01/2009 pour un entretien prévu pour le 30/01/2009.
Le 3/02/2009, les deux parties signent une convention prévoyant la rupture du contrat de travail le 11/03/2009.
Transmise à l’administration à l’issue du délai de rétractation, la convention est homologuée le 10/03/2009 en l’absence de réponse.
Le 11/03/2009, le salarié se voit remettre les documents de fin de contrat.
Extrait du jugement :
Monsieur X a été embauché en qualité de maître d’hôtel par la société Y sise à Paris 8ème, à compter du 1er septembre 1999 en contrepartie d’un salaire brut mensuel en dernier lieu de 3.766 euros.
Les relations contractuelles entre les parties étaient régies par la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants.
Pendant l’exécution de son contrat de travail, monsieur X s’est vu notifier plusieurs avertissements pour des manquements dans l’exercice de ses fonctions dont le dernier délivré le 4 décembre 2008 qui l’a sanctionné et pour notamment discourtoisie vis à vis de la clientèle.
Candidat aux fonctions de délégué du personnel le 25 novembre 2008, il n’a pas été élu.
Dans le cadre d’un projet de rupture conventionnelle, il a été convoqué le 23 janvier 2009, à un entretien prévu le 30 janvier 2009.
Le 3 février 2009, les parties ont signé une convention de rupture prévoyant une fin de contrat le 11 mars 2009.
Transmise à la direction du travail à l’issue du délai de rétractation, la convention, en l’absence de réponse de l’administration, a été homologuée le 10 mars 2009.
Le 11 mars 2009, le salarié s’est vu remettre les documents de fin de contrat et un chèque de 9.575 euros pour solde de tout compte.
Saisine du Conseil de prud’hommes
Le salarié décide de saisir la juridiction prud’homale estimant que la rupture conventionnelle n’est pas valide, au motif qu’une sanction disciplinaire lui avait été notifiée 2 mois avant la signature de la convention de rupture.
Il considère d’autre part, que le fait d’avoir été candidat aux élections des délégués du personnel, lui confère le statut de salarié protégé.
Jugement de la Cour d’appel
Dans un premier temps, le Conseil de prud’hommes déboute le salarié de sa demande.
Les juges de la Cour d’appel confirment ce jugement en précisant les points suivants :
Statut salarié protégé
Lors de l’instauration de la rupture conventionnelle, par la loi LMMT (loi n° 208-596 du 25/06/2008, JO du 26/06/2008), le bénéfice du statut de « salarié protégé » est réservé aux salariés élus et non aux salariés candidats à une élection.
L’argumentation du salarié est donc rejetée par la Cour d’appel.
Extrait du jugement :
– sur l’autorisation de l’inspecteur du travail
Considérant que monsieur X soutient que bénéficiant du statut de salarié protégé, la procédure aurait dû être autorisée par l’inspecteur du travail ;
Et considérant qu’il n’est pas contesté qu’il s’était porté candidat aux élections de délégués du personnel organisées par l’employeur le 25 novembre 2008 ;
Qu’il n’est pas davantage contesté qu’il n’a pas été élu ;
Et considérant que l’article L 1237-15 du code du travail soumet le dispositif de la rupture conventionnelle à une autorisation du l’inspecteur du travail au profit des seuls salariés protégés visés aux articles L 2411-1 et L 2411-2 du même code ;
Que force est de constater que les candidats aux élections de délégués du personnel ne sont pas compris dans cette liste limitative ; que dès lors la convention signée entre les parties n’était pas subordonnée à une autorisation de l’inspecteur du travail ;
Que le conseil de prud’hommes a dès lors avec justesse rejeté ce moyen ;
Sanction disciplinaire
Les juges de la Cour d’appel estiment que l’exercice du pouvoir disciplinaire de l’employeur, ne peut avoir comme objectif de remettre en cause la rupture conventionnelle.
La Cour d’appel relève surtout, que le salarié n’avait contesté la sanction qui lui avait été infligée, ce qui aurait permis au salarié d’éventuellement invoquer, par la suite le caractère équivoque de son consentement à la rupture conventionnelle.
Extrait du jugement :
– sur l’existence d’un litige préalable
Considérant que monsieur X estime encore que l’existence d’un litige entre les parties interdisait la mise en place d’une rupture conventionnelle ;
Et considérant qu’il n’est pas discuté que le salarié a fait l’objet d’un avertissement le 4 décembre 2008 pour un comportement inadapté avec un client : accueil peu courtois, manque d’amabilité, commande mal enregistrée ; qu’à cet égard, sa précédente sanction datant d’octobre 2005, il ne peut soutenir avoir, préalablement à la rupture conventionnelle, fait l’objet d’une série d’avertissements ;
Considérant qu’il n’a à aucune moment contesté cette sanction ;
Considérant que cet avertissement, dont les motifs ne sont pas remis en cause, ne caractérise pas un différend entre les parties, mais témoigne de l’exercice par l’employeur de son pourvoir disciplinaire ;
Qu’à aucun moment, la société n’a manifesté l’intention de mettre en oeuvre une procédure de licenciement antérieurement à la signature de la convention de rupture à laquelle celle ci aurait mis fin ;
Que les conditions dans lesquelles l’accord a été signé, deux mois après la notification de la sanction, après que l’intéressé a bénéficié d’un temps de réflexion et d’une assistance ou de conseils lui ayant permis de mesurer les conséquences de son engagement, révèlent que les parties ont manifesté une volonté claire et non équivoque de mettre fin d’un commun accord a leurs relations contractuelles et non de mettre fin à un litige ;
Rappel d’une circulaire de la DGT
Il semble prudent de ne pas tirer de conclusions trop hâtives du présent jugement de la Cour d’appel.
En effet, une circulaire de la DGT en date du 17/03/2009, précise que les employeurs d’anciens salariés protégés, doivent respecter la procédure particulière qui leur est réservée, ceci pendant les périodes de protection définies par les articles L 2411-3 et suivants du Code du travail.
Extrait de la circulaire :
2.5 - les employeurs d’anciens salariés protégés à divers titres, et souhaitant conclure une rupture conventionnelle, doivent respecter la procédure réservée aux salariés protégés, et utiliser le formulaire adéquat, ceci durant les périodes de protection définies par les articles L. 2411-3 et suivants.
Références
CA Paris 22 février 2012 n° 10-04217, ch. 6-6, C. c/ SAS Brasserie Mollard
Circulaire DGT n° 2009-04 du 17 mars 2009 relative à la rupture conventionnelle d’un contrat à durée indéterminée