Cet article a été publié il y a 6 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
C’est avec beaucoup d’intérêt que nous avons consulté un arrêt de la Cour de cassation du 27 juin 2018. A cette occasion la Cour de cassation s’est penchée sur le calcul d’une prime d’ancienneté prévue conventionnellement, et sur l’éventuelle prise en compte des arrêts de maladie pour la détermination de l’ancienneté acquise par le salarié.
Présentation de l’affaire
Une salariée est engagée le 15 mai 2007 en qualité de coiffeuse.
Le 7 août 2012, l'employeur lui propose une modification du contrat de travail de 35 à 30 heures hebdomadaires pour « baisse d'activité », refusée par la salariée.
Le 21 janvier 2013, la salariée saisit la juridiction prud'homale de demandes en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de diverses sommes.
La salariée est finalement licenciée, le 18 février 2014, pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée saisit la juridiction prud’homale aux fins de voir son employeur condamné au paiement d’un rappel de salaires au titre de la prime d’ancienneté, selon elle les périodes de suspension du contrat au titre d’arrêts maladie ne peuvent avoir pour effet de réduire son ancienneté au sein de l’entreprise.
Les dispositions conventionnelles visées par l’affaire
Afin de mieux comprendre l’arrêt de la Cour de cassation, nous précisons que sont visées par la présente affaire les dispositions prévues par l’avenant n° 12 du 16 juillet 2008 à la convention collective nationale de la coiffure et son article 1.8, dont nous reproduisons l’intégralité ci-après.
Avenant n° 12 du 16 juillet 2008 (1)
(1) Avenant étendu sous réserve de l'application des dispositions de l'article L. 2241-9 du code du travail qui prévoient que la négociation annuelle sur les salaires vise également à définir et à programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes avant le 31 décembre 2010.
(Arrêté du 23 octobre 2008, art. 1er.)Primes d'ancienneté
Article 1.8
En vigueur étendu
Au titre de l'ancienneté, il sera ajouté au salaire minimum garanti conventionnel ou contractuel une prime d'ancienneté, calculée de la manière suivante :
(En euros.)
ANNÉES D'ANCIENNETÉ
dans l'entrepriseMONTANT DE LA PRIME
d'anciennetéA partir de 5 ans
26,30
A partir de 7 ans
37,95
A partir de 9 ans
49,00
A partir de 12 ans
64,00
A partir de 15 ans
78,00
La prime d'ancienneté doit faire l'objet d'une ligne distincte sur le bulletin de paie. A défaut, celle-ci sera considérée ne pas avoir été payée.
Lorsque le salaire et les accessoires de salaire nécessitent l'attribution d'un complément calculé de façon à porter la rémunération au salaire minimum de croissance, la prime d'ancienneté doit être ajoutée au salaire minimum de croissance.
La prime d'ancienneté est versée au prorata du temps de travail effectif (par rapport à la durée légale du travail) pour les salariés à temps partiel.
L'ancienneté s'entend d'un nombre d'années entières et consécutives dans le même établissement.
L’arrêt de la cour d’appel
Dans son arrêt du 26 octobre 2016, la Cour d'appel de Rennes donne raison à la salariée.
Mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.
Il estime en effet « que les absences pour maladie d'origine non professionnelle ne sont pas assimilés à du temps de travail effectif et ne peuvent être prises en compte pour la détermination des droits liés à l'ancienneté, sauf dispositions conventionnelles contraires ».
L’arrêt de la Cour de cassation
La Cour de cassation confirme en tous points l’arrêt de la cour d’appel, rejetant à ce titre le pouvoir formé par l’employeur.
Selon elle :
- L’article 1.8 de l'avenant n° 12 du 16 juillet 2008 à la convention collective nationale de la coiffure, qui instaure une prime à partir de cinq ans d'ancienneté dans l'entreprise, dispose que l'ancienneté s'entend d'un nombre d'années entières et consécutives dans le même établissement ;
- Et qu’il résulte donc, qu'il n'y a pas lieu de déduire les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la salariée une certaine somme au titre de la prime d'ancienneté et les congés payés afférents, alors, selon le moyen, que les absences pour maladie d'origine non professionnelle ne sont pas assimilés à du temps de travail effectif et ne peuvent être prises en compte pour la détermination des droits liés à l'ancienneté, sauf dispositions conventionnelles contraires ; que l'avenant n° 12 du 16 juillet 2008 à la convention collective nationale de la coiffure prévoit le versement d'une prime d'ancienneté à partir de cinq ans d'ancienneté dans l'entreprise, et précise seulement que « La prime d'ancienneté doit faire l'objet d'une ligne distincte sur le bulletin de paie. A défaut, celle-ci sera considérée ne pas avoir été payée. La prime d'ancienneté est versée au prorata du temps de travail effectif (par rapport à la durée légale du travail) pour les salariés à temps partiel. L'ancienneté s'entend d'un nombre d'années entières et consécutives dans le même établissement » ; qu'en jugeant qu'en l'absence de disposition conventionnelle excluant les périodes de suspension du contrat de travail du décompte de l'ancienneté, Mme Y... comptait cinq ans d'ancienneté au 15 mai 2012 nonobstant son arrêt de travail à compter de janvier 2012, pour juger qu'elle était en droit de prétendre à une prime d'ancienneté à compter de cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-7 du code du travail par fausse application, ensemble l'article 1-8 de l'avenant n° 12 du 16 juillet 2008 à la convention collective de la coiffure ;
Mais attendu que l'article 1.8 de l'avenant n° 12 du 16 juillet 2008 à la convention collective nationale de la coiffure, qui instaure une prime à partir de cinq ans d'ancienneté dans l'entreprise, dispose que l'ancienneté s'entend d'un nombre d'années entières et consécutives dans le même établissement ; qu'il en résulte qu'il n'y a pas lieu de déduire les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie ; que le moyen n'est pas fondé ; (…)
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Références
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du jeudi 28 juin 2018
N° de pourvoi: 16-28511 Publié au bulletin