Cet article a été publié il y a 5 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Les affaires concernées
Affaire numéro 1
Une salariée est engagée le 5 juin 2000.
Elle est licenciée le 20 novembre 2013.
Par jugement du conseil de prud'hommes du 30 mars 2016, la société est notamment condamnée à payer à la salariée diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, et au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La société verse à la salariée une somme correspondant aux condamnations prononcées après déduction des cotisations sociales obligatoires, ce que la salariée conteste.
Affaire numéro 2
Un salarié est engagé le 1er novembre 1969.
Il est licencié pour motif économique le 18 juin 2013.
Par arrêt du 8 décembre 2015, la société est condamnée à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur, considérant que la somme était une somme brute, a retenu les cotisations et contributions sociales salariales, ce que le salarié conteste.
Les arrêts de la Cour de cassation
Affaire numéro 1
Dans un premier temps, la Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 14 décembre 2017, avait considéré que le salarié avait formulé une condamnation « en net et non en brut », et « qu'aucune disposition n'impose à une juridiction de prononcer toutes les condamnations sur la même base, toutes en net ou toutes en brut, et qu'en faisant droit, sans autre précision, à la demande de la salariée, le conseil de prud'hommes, qui n'a pas écarté la prétention de la salariée qui souhaitait obtenir une indemnité nette, a prononcé une condamnation nette ».
Mais la Cour de cassation ne partage pas le même avis.
- Constatant que la décision servant de fondement aux poursuites ne s'était pas prononcée sur l'imputation des cotisations et des contributions sociales ;
- Ce dont il résultait que l'employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour débouter la société de ses demandes de nullité du commandement de payer et de mainlevée de la saisie-attribution, l'arrêt retient que la salariée a formulé une demande de condamnation en net et non en brut, que le conseil de prud'hommes a été saisi d'une telle demande, qu'aucune disposition n'impose à une juridiction de prononcer toutes les condamnations sur la même base, toutes en net ou toutes en brut, et qu'en faisant droit, sans autre précision, à la demande de la salariée, le conseil de prud'hommes, qui n'a pas écarté la prétention de la salariée qui souhaitait obtenir une indemnité nette, a prononcé une condamnation nette ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la décision servant de fondement aux poursuites ne s'était pas prononcée sur l'imputation des cotisations et des contributions sociales, ce dont il résultait que l'employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée, la cour d'appel, qui, sous couvert d'interprétation, a modifié la décision qui lui était soumise, a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif critiqué par le second moyen relatif aux dommages-intérêts pour procédure abusive ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Affaire numéro 2
Contrairement à ce qu’avait considéré la Cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 21 décembre 2017, la Cour de cassation considère que :
- La décision servant de fondement aux poursuites ne s'était pas prononcée sur l'imputation des cotisations et des contributions sociales ;
- Ce dont il résultait que l'employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour débouter l'employeur de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution, l'arrêt retient qu'il ne résulte d'aucune des mentions de l'arrêt rendu le 8 décembre 2015 par la cour d'appel de Paris que des sommes pourraient être déduites de la condamnation prononcée au profit du salarié, l'intention de la cour d'accorder au salarié une somme nette de toutes cotisations se déduisant du dispositif de la décision qui fait partir, conformément aux dispositions de l'article 1153-1 du code civil, devenu l'article 1231-7, les intérêts à compter de la décision du conseil des prud'hommes et non de la demande ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la décision servant de fondement aux poursuites ne s'était pas prononcée sur l'imputation des cotisations et des contributions sociales, ce dont il résultait que l'employeur devait procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée, la cour d'appel, qui, sous couvert d'interprétation, a modifié la décision qui lui était soumise, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Les conséquences
Ces 2 arrêts sont d’importance, nous permettant ainsi de considérer que :
- A défaut de précision dans le jugement prud’homal, concernant le régime social des sommes auxquelles l’employeur est condamné ;
- Ces sommes s’entendent en valeurs brutes, l’employeur ayant alors l’obligation de les soumettre aux cotisations sociales, notamment au niveau du précompte ;
- Le salarié percevant en conséquence la somme établie par jugement prud’homal, déduction faite du précompte.
Références
Affaire numéro 1 :
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 3 juillet 2019
N° de pourvoi: 18-12149 Publié au bulletin
Affaire numéro 2 :
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 3 juillet 2019
N° de pourvoi: 18-14074 Non publié au bulletin