Chiffrage de l’indemnité en cas de rupture conventionnelle : les recommandations de la Cour de cassation

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Paie Rupture conventionnelle

La Cour de cassation vient de publier son rapport annuel 2018, suggérant à cette occasion plusieurs évolutions législatives. Nous abordons aujourd’hui le chiffrage de l’indemnité en cas de rupture conventionnelle.

Chiffrage de l’indemnité en cas de rupture conventionnelle : les recommandations de la Cour de cassation
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Rappel de la situation actuelle

Ouverture du droit : un régime plus favorable que l’indemnité de licenciement

Par similitude avec l’indemnité de licenciement, les règles applicables sont les mêmes en matière de détermination de l’ancienneté.

Une différence notable existe toutefois : une ancienneté inférieure à 1 an donne lieu au paiement d’une indemnité de rupture dans le cadre d’une rupture conventionnelle.

Circulaire DGT n° 2009-04 du 17 mars 2009 relative à la rupture conventionnelle d’un contrat à durée indéterminée

5.3 - régime indemnitaire des salariés de moins d’un an d’ancienneté La loi de modernisation du marché du travail ne renvoie à l’indemnité légale de licenciement que pour définir le montant minimal de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, sans en définir les conditions d’attributions.

Dans le cas où le salarié partie à la rupture conventionnelle a moins d’une année d’ancienneté, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle lui est due au prorata du nombre de mois de présence.

Par exemple, pour un salarié ayant 7 mois d’ancienneté, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle doit être : salaire brut mensuel moyen multiplié par 1/5ème multiplié par 7/12ème. 

Valeur minimale de l’indemnité de rupture

Elle ne peut être inférieure à l’indemnité légale versée en cas de licenciement. 

Article L1237-13

Créé par LOI n°2008-596 du 25 juin 2008 - art. 5

La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-9.

Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation.

A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie.

Article L1234-9

Modifié par Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 - art. 39

Le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

NOTA : 

Conformément à l'article 40-I de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ces dispositions sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de ladite ordonnance.

Chiffrage de l’indemnité de rupture en 2019 

Détermination de l’indemnité de rupture

 (¼ *Salaire de référence*ancienneté jusqu’à 10 ans) + (1/3 *Salaire de référence*(pour les années au-delà de 10 ans))

Article R1234-2

Modifié par Décret n°2017-1398 du 25 septembre 2017 - art. 2

L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :
1° Un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans ;
2° Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

NOTA : 

Conformément à l'article 4 du décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017, ces dispositions sont applicables aux licenciements et mises à la retraite prononcés et aux ruptures conventionnelles conclues postérieurement à sa publication.

Prise en compte valeur indemnité conventionnelle ?

Employeurs dans le champ de l’ANI

Les employeurs qui entrent dans le champ de l’ANI du 11/01/2008 versent l’indemnité conventionnelle lorsqu’elle est plus élevée que l’indemnité légale.

Aux termes de l’avenant n° 4 du 18 mai 2009 à l’accord national interprofessionnel (ANI) sur la modernisation du marché du travail du 11 janvier 2008, l’indemnité spécifique de rupture à verser au salarié dont le CDI a été rompu dans le cadre d’une rupture conventionnelle de l’article L. 1237-11 du Code du travail, doit être au moins égale à l’indemnité conventionnelle de licenciement, dès lors que cette dernière s’avère plus favorable, pour le salarié, que l’indemnité légale.
Cet avenant ne s’est d’abord imposé qu’aux employeurs adhérents du MEDEF, de la CGPME ou de l’UPA, et ce au titre des conventions de rupture conventionnelle conclues depuis le 18 mai 2009.

Son extension par l’arrêté du 26 novembre 2009 (JO du 27 novembre) le rend désormais obligatoire à l’égard de tous les employeurs entrant dans le champ d’application de l’ANI du 11 janvier 2008 (c’est-à-dire les employeurs du secteur privé, exception faite, notamment, des professions libérales, du secteur associatif et des employeurs de salariés agricoles), et ce au titre des conventions de rupture conclues depuis le 28 novembre 2009.

Les conventions conclues précédemment ne sont pas remises en cause.

Entreprises qui ne sont pas concernées par l’obligation de verser l’indemnité conventionnelle

Ne sont pas obligés de verser l’indemnité conventionnelle, quand elle est supérieure à l’indemnité légale :

  • Employeurs des professions agricoles ;
  • Professions libérales ;
  • Employeur dans le secteur de l’économie sociale ;
  • Employeur dans le secteur sanitaire et social ;
  • Particulier employeur. 

Circulaire de la DGT numéro 2009-25 du 08/12/2009 

Cas particulier d’une indemnité conventionnelle pour motif personnel ET économique 

Une circulaire de la DGT (n° 2009-25) du 8/12/2009 apporte à ce sujet une précision importante.

Lorsqu’une convention collective prévoit le calcul d’une indemnité de licenciement différente en cas :

  • De licenciement économique ;
  • De licenciement pour motif personnel. 

Alors :

  • L’employeur doit verser l’indemnité légale si au moins une des deux indemnités conventionnelles est inférieure à l’indemnité légale ;
  • L’employeur doit verser l’indemnité conventionnelle la plus faible si les 2 indemnités sont supérieures à l’indemnité légale.

Circulaire de la DGT numéro 2009-25 du 08/12/2009  

Préconisation de la Cour de cassation

La Cour de cassation préconise la modification de l’article L 1237-13 du code du travail, afin de prévoir :

  • Que l’indemnité versée dans le cadre d’une rupture conventionnelle ;
  • Ne puisse être inférieure à l’indemnité de licenciement prévue par un accord collectif ou des dispositions légales plus favorables . 

L’opinion de la DGT

  1. La DGT (Direction Générale du Travail), sollicitée par la direction des affaires civiles et du sceau, a indiqué prendre bonne note de cette proposition, qui pourrait permettre d’harmoniser les règles d’indemnisation en cas de rupture conventionnelle entre les salariés relevant des différents secteurs conventionnels.
  2. Si une modification législative s’avérait envisageable, elle devrait en tout état de cause être soumise à l’avis préalable des partenaires sociaux.

Extrait rapport annuel 2018 Cour de cassation : 

 La modification de l’article L. 1237-13 du code du travail afin de prévoir que l’indemnité spécifique de rupture ne peut être inférieure à l’indemnité de licenciement prévue par un accord collectif ou des dispositions légales plus favorables (Rapport p. 104) ; (…) 

Indemnité spécifique de rupture conventionnelle demande de modification des dispositions de l’article L. 1237-13 du code du travail

Les Rapports 2015, 2016 et 2017 ont proposé de modifier l’article L. 1237-13 du code du travail afin de prévoir que l’indemnité spécifique de rupture ne peut être inférieure à l’indemnité de licenciement prévue par un accord collectif ou des dispositions légales plus favorables. Une telle réforme permettrait de renforcer les droits des salariés parties à une convention de rupture et d’éviter de laisser perdurer une différence de régime entre les salariés selon que leur employeur est ou non lié par l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 précité.

À ce jour aucune modification n’est intervenue. La proposition de modification est maintenue.

La direction des affaires civiles et du sceau observe que, en l’état actuel du droit et de la jurisprudence, dans l’hypothèse où l’employeur n’entre pas dans le champ d’application de l’accord interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, le montant minimal de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle auquel peut prétendre le salarié est celui de l’indemnité légale de licenciement.

Les secteurs concernés par cette mesure seraient ceux qui n’ont pas signé ou participé à l’accord national interprofessionnel et qui n’ont, par ailleurs, pas souhaité reprendre dans leur propre convention collective les règles fixées par cet accord en matière d’indemnité.

La direction générale du travail, sollicitée par la direction des affaires civiles et du sceau, a indiqué prendre bonne note de cette proposition, qui pourrait permettre d’harmoniser les règles d’indemnisation en cas de rupture conventionnelle entre les salariés relevant des différents secteurs conventionnels. Si une modification législative s’avérait envisageable, elle devrait en tout état de cause être soumise à l’avis préalable des partenaires sociaux.