Coronavirus : les dispositions dérogatoires concernant le paiement des IJSS et complément employeur

Actualité
Paie Maintien employeur pour maladie, accident du travail, maladie professionnelle

L’ordonnance n°2020-322 publiée au JO du 26/03/2020 apporte d’importantes modifications concernant le maintien employeur en cas d’arrêt de travail, en cohérence avec les dispositions de la loi d’urgence et la régime dérogatoire des IJSS.

Coronavirus : les dispositions dérogatoires concernant le paiement des IJSS et complément employeur
Publié le
Télécharger en PDF

La loi d’urgence

L’article 11 de la loi d’urgence autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance la possibilité « d’adapter les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail », c’est-à-dire les conditions légales selon lesquelles s’effectue le maintien de l’employeur en cas d’arrêt maladie ou accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu. 

Extrait de la loi :

Article 11  

  1. - Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, relevant du domaine de la loi et, le cas échéant, à les étendre et à les adapter aux collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution (…)

- d’adapter les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail ;

Article L1226-1

Modifié par LOI n°2015-1702 du 21 décembre 2015 - art. 63

Tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, à condition :

1° D'avoir justifié dans les quarante-huit heures de cette incapacité, sauf si le salarié fait partie des personnes mentionnées à l'article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ;

2° D'être pris en charge par la sécurité sociale ;

3° D'être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres Etats partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.

Un décret en Conseil d'Etat détermine les formes et conditions de la contre-visite mentionnée au premier alinéa.

Le taux, les délais et les modalités de calcul de l'indemnité complémentaire sont déterminés par voie réglementaire. 

Dispositions dérogatoires

L’ordonnance n°2020-322 du 25 mars 2020, publiée au JO du 26 mars 2020, et la loi d’urgence fixent les dispositions dérogatoires suivantes, ainsi  :

Thèmes

Contenus

Condition d’ancienneté

La condition d’ancienneté requise pour bénéficier d’un maintien employeur est supprimée, à savoir justifier d’un an d’ancienneté dans l’entreprise à la date de début de l’arrêt de travail.

Justification arrêt de travail

L’obligation légale d’avoir justifié dans les 48 heures auprès de l’employeur son incapacité est supprimée.

Dispense des soins

De même l’obligation d’être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres Etats partie à l'accord sur l'Espace économique européen, est supprimée.

Salariés non mensualisés

L’exclusion des salariés non mensualisés (salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires) ne s’applique pas.

Délai de carence maintien employeur

Légalement prévu durant 7 jours, le délai de carence est supprimé.

A notre avis, cette suppression ne concerne que le délai de carence légalement prévu, et ne s’applique donc pas aux délais de carence conventionnels, conduisant alors à une comparaison entre les 2 méthodes de maintien lors de l’établissement du bulletin de salaire. 

Il reste également un point à éclaircir :

  • Cette suppression concernera-t-elle uniquement les arrêts de travail en lien direct avec le covid-19 ;
  • Ou s’étendra-t-elle à tous les arrêts de travail, quelle que soit la pathologie concernée ? 

Délai de carence versement des IJSS

Le délai de carence de 3 jours est supprimé (voir communiqué de presse d’Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé)

Situations concernées

  • Les salariés qui font l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile en raison de l’épidémie ;
  • Les salariés, parents d’un enfant de moins de seize ans faisant lui-même l’objet d’une telle mesure, et qui se trouvent, pour l’un de ces motifs, dans l’impossibilité de continuer à travailler ;
  • Les personnes qui présentent un risque accru de développer un forme grave d’infection au coronavirus (voir notre actualité à ce sujet en cliquant ici)
  • Les salariés qui sont en situation d’absence au travail justifiée par une incapacité résultant de maladie ou d’accident (liée ou non au covid-19).

Durée d’application

Versement IJSS

La non-application du délai de carence de 3 jours concerne les arrêts de travail pour la période :

  • Débutant le 2 février 2020 pour les assurés faisant l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile, et ne pouvant plus de ce fait continuer à travailler ;
  • Débutant le 2 février 2020 pour les parents d’un enfant ayant été en contact avec un cas confirmé, et qui est contraint de rester à domicile pour garantir l’isolement de son enfant.
  • Depuis le 3 mars 2020, extension aux parents sans possibilité de télétravail et contraints de rester à domicile, en raison de la fermeture de l’établissement accueillant leur enfant de moins de 16 ans (voir circulaire CNAM du 19/02/2020) ;
  • Depuis le 18 mars 2020, pour les personnes qui présentent un risque accru de développer un forme grave d’infection au coronavirus. 

Il serait souhaitable, selon nous, de disposer d’une information récapitulative, évoquant également le traitement des salariés malades pour une pathologie non liée au covid-19, et qui puisse fixer une règle commune de délai d’application (date de début-date de fin) de l’absence d’application d’un délai de carence.

Maintien employeur

Ces dispositions dérogatoires s’appliquent jusqu’au 31 août 2020 (un décret pourra aménager les délais et les modalités selon lesquelles l'indemnité est versée par l’employeur), sans que la date initiale d’application ne soit officiellement confirmée, il semble que les dispositions dérogatoires aient vocation à s’appliquer depuis le 26 mars 2020, date entrée en vigueur de l’ordonnance.

Extrait ordonnance n° 2020-322 :

Article 1  

Afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19, jusqu’au 31 août 2020, l’indemnité complémentaire mentionnée à l’article L. 1226-1 du code du travail est versée : 

1° Aux salariés qui bénéficient d’un arrêt de travail en application des dispositions prises pour l’application de l’article L. 16-10-1 du code de la sécurité sociale, sans que la condition d’ancienneté prévue au premier alinéa de l’article L. 1226-1 du code du travail ni les conditions prévues aux 1° et 3° du même article ne soient requises et sans que l’exclusion des catégories de salariés mentionnées au cinquième alinéa du même article ne s’applique ; 

2° Aux salariés en situation d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident mentionnés à l’article L. 1226-1 du code du travail, sans que la condition d’ancienneté prévue au premier alinéa de cet article ne soit requise et sans que l’exclusion des catégories de salariés mentionnées au cinquième alinéa du même article ne s’applique. 

Un décret peut aménager les délais et les modalités selon lesquelles l’indemnité mentionnée au premier alinéa est versée pendant la période prévue à cet alinéa aux salariés mentionnés aux 1° et 2°. 

Références

Ordonnance n° 2020-322 du 25 mars 2020 adaptant temporairement les conditions et modalités d'attribution de l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l'intéressement et de la participation

Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2020-322 du 25 mars 2020 adaptant temporairement les conditions et modalités d'attribution de l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l'intéressement et de la participation

LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 

Décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020 portant adoption de conditions adaptées pour le bénéfice des prestations en espèces pour les personnes exposées au coronavirus, JO du 18 mars 2020 

Décret n° 2020-227 du 9 mars 2020 adaptant les conditions du bénéfice des prestations en espèces d’assurance maladie et de prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes exposées au covid-19, JO du 20 mars 2020 

Décret n° 2020-277 du 19 mars 2020 modifiant le décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020 portant adoption de conditions adaptées pour le bénéfice des prestations en espèces pour les personnes exposées au coronavirus, JO du 20 mars 2020