Cet article a été publié il y a 12 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Au terme d’un contrat CDD, sauf cas particuliers, un employeur doit verser une indemnité de précarité dont le taux est fixé légalement à 10%.
Toutefois, le Code du travail prévoit qu’il est possible de réduire ce taux à 6%, sous réserve que le salarié bénéficie de contreparties en matière de formation.
Un arrêt récent de la Cour de cassation apporte des précisions importantes à ce sujet.
Rappel des dispositions légales
Taux légal : 10%
Le Code du travail prévoit qu’à l’issue d’un contrat de travail CDD, et si les relations contractuelles ne se poursuivent pas, le salarié bénéficie d’une indemnité de précarité, fixée à 10% de l’ensemble des salaires versés.
Article L1243-8
Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.
Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.
Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant.
Taux à 6%
Il existe toutefois un régime « dérogatoire » pour lequel, le salarié ne bénéficie alors d’une indemnité de précarité que de 6%, sous réserve :
- Qu’une convention, accord collectif de branche étendu, convention ou accord d’entreprise ou d’établissement le prévoit ;
- Que des contreparties soient offertes au salarié, notamment sous la forme d’un accès privilégié à la formation professionnelle.
Article L1243-9
En vue d'améliorer la formation professionnelle des salariés titulaires de contrat de travail à durée déterminée, une convention ou un accord collectif de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut également prévoir de limiter le montant de l'indemnité de fin de contrat à hauteur de 6 %, dès lors que des contreparties sont offertes à ces salariés, notamment sous la forme d'un accès privilégié à la formation professionnelle. Dans ce cas, la convention ou l'accord peut prévoir les conditions dans lesquelles ces salariés peuvent suivre, en dehors du temps de travail effectif, un bilan de compétences. Ce bilan de compétences est réalisé dans le cadre du plan de formation au titre de la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle
L’affaire concernée
Dans cette affaire, une salariée a été engagée en qualité d’agent non qualifié par 3 contrats CDD successifs du 4/02/2008 au 3/07/2009.
Au terme de ces contrats, la salariée saisit la juridiction prud’homale d’une demande de complément d’indemnité de précarité.
En effet, la salariée n’a bénéficié que d’une indemnité de précarité à 6%.
L’employeur argumente de son côté, que le contrat de travail contenait une clause indiquant que la salariée bénéficiait d’un accès favorisé à la formation professionnelle (en conformité avec l’accord national du 28/07/1998), justifiant un taux réduit de l’indemnité de précarité.
Extrait de l’arrêt :
« qu'en l'espèce, le contrat de travail stipulait (article 10 " formation ") : " en application de l'accord national du 28 juillet 1998 modifié, vous pouvez bénéficier de 16 heures 30 de formation par mois d'exécution de votre contrat de travail à durée déterminée. Cette formation devra être mise en oeuvre en dehors de votre temps de travail et avant le terme de votre contrat. Les actions de formation professionnelle continue éligible à ce titre sont :- les actions de formation qualifiante sanctionnées par un titre ou diplôme à finalité professionnelle ou par un certificat de qualification paritaire de la métallurgie (CQPM)- les actions de formation professionnelle décidées par l'entreprise,- les actions de bilan de compétences " »
L’arrêt de la Cour de cassation
Pour les juges de la Cour de cassation, la clause présente dans le contrat de travail de la salariée n’est pas suffisante.
Ils donnent raison à la salariée et condamnent l’employeur à verser un complément d’indemnité de précarité, au motif que ce dernier devait en l’occurrence faire une proposition individuelle et réelle de formation à la salariée concernée.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu que le rappel dans le contrat de travail du dispositif général dans lequel pouvait s'inscrire une formation demandée par la salariée ne constituait pas une offre de formation effective répondant aux exigences légales et conventionnelles ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Confirmation de jurisprudence
Ce n’est pas la première fois que les juges de la Cour de cassation prennent cette position vis-à-vis de l’indemnité de précarité à « taux réduit ».
Arrêt du 11/07/2007
Et attendu que le conseil de prud'hommes, après avoir relevé que l'accord national du 25 février 2003 relatif à la formation professionnelle dans la métallurgie dont l'application n'était pas contesté, avait fixé à 6 % l'indemnité de précarité, a exactement décidé, l'employeur n'ayant jamais prétendu avoir proposé au salarié un accès à la formation professionnelle, que l'indemnité de précarité de 10 % était due ;
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 11 juillet 2007 N° de pourvoi: 06-41765
Arrêt du 23/01/2008
Et attendu que le conseil de prud'hommes, qui, après avoir relevé que l'accord national du 25 février 2003 relatif à la formation professionnelle dans la métallurgie dont l'application n'était pas contestée, avait fixé à 6 % l'indemnité de précarité, a constaté qu'aucune action de formation n'avait été offerte au salarié par l'employeur, a exactement décidé que l'indemnité de précarité de 10 % était due ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 23 janvier 2008 N° de pourvoi: 06-44190
En conclusion, il ne suffit pas :
- Qu’un accord collectif prévoit la possibilité de réduire le taux de précarité à 6% ;
- Que le contrat de travail rappelle au besoin cet accord.
Il faut que l’employeur propose réellement, individuellement et concrètement une formation au salarié, sous peine de se voir condamné à payer un complément d’indemnité de précarité, comme c’est à nouveau le cas dans l’affaire présente.
Références
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mardi 3 juillet 2012
N° de pourvoi: 11-16269 Publié au bulletin