Conclure une convention forfait requiert toujours l’accord du salarié rappelle la Cour de cassation

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Paie Heures supplémentaires

Voilà ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans son arrêt du 10 février 2021, et que notre publication vous décrit en détails.

Conclure une convention forfait requiert toujours l’accord du salarié rappelle la Cour de cassation
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Cet article a été publié il y a 3 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Présentation de l’affaire

Un salarié, engagé verbalement le 19 novembre 2002, est licencié pour faute grave le 8 avril 2014.

Le salarié saisit le conseil de prud'hommes en vue d'obtenir notamment le paiement d’heures supplémentaires.

Depuis son recrutement, il bénéficiait d’une rémunération brute, supérieure au minimum conventionnel au passage, au titre de 169 heures mensuelles. 

L’employeur considérait que le salarié bénéficiait d’une rémunération forfaitaire, englobant le paiement d’heures supplémentaires. 

L’arrêt de la cour d’appel

La cour d'appel de Versailles, par arrêt du 06 février 2019, déboute le salarié de sa demande de rappel d’heures supplémentaires, estimant en effet que :

  • Le salarié était rémunéré, depuis l'origine, et sans qu'il y ait eu contestation, selon un salaire global très supérieur au montant du minimum conventionnel ;
  • Et que ce salaire global comprend le paiement de 169 heures mensuelles, dont les majorations d'heures supplémentaires.

Extrait de l’arrêt :

  1. Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires non majorées, l'arrêt retient que le salarié est rémunéré, depuis l'origine, et sans qu'il y ait eu contestation, selon un salaire global très supérieur au montant du minimum conventionnel et que ce salaire global comprend le paiement de 169 heures mensuelles, dont les majorations d'heures supplémentaires.

L’arrêt de la Cour de cassation

Mais la Cour de cassation ne partage pas du tout l’avis de la cour d'appel concernant les heures supplémentaires.

Elle casse et annule l’arrêt sur ce point, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée.

Selon la Cour de cassation :

  • L'existence d'une convention de forfait ne peut résulter que d'un accord entre les parties ;
  • Et elle ne saurait se déduire de la seule mention sur le bulletin de paie d'une rémunération forfaitaire d'heures supplémentaires. 

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour
Vu les articles L. 3121-40 et L. 3121-41 du code du travail en leur rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige :
5. L'existence d'une convention de forfait ne peut résulter que d'un accord entre les parties et elle ne saurait se déduire de la seule mention sur le bulletin de paie d'une rémunération forfaitaire d'heures supplémentaires.
6. Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires non majorées, l'arrêt retient que le salarié est rémunéré, depuis l'origine, et sans qu'il y ait eu contestation, selon un salaire global très supérieur au montant du minimum conventionnel et que ce salaire global comprend le paiement de 169 heures mensuelles, dont les majorations d'heures supplémentaires.
7. En statuant ainsi, sans constater l'existence d'un accord du salarié sur le paiement forfaitisé des heures supplémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquence de la cassation
8. La cassation de l'arrêt en ce qu'il déboute le salarié de sa demande en paiement en rappel de salaires pour heures supplémentaires non majorées, entraîne, par voie de conséquence, sa cassation en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. L... de sa demande en paiement de la somme de 2 945,79 euros à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires non majorées, et en ce qu'il le condamne à payer 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, l'arrêt rendu le 6 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Rappel des dispositions légales

Depuis la loi travail, les articles L 3121-53 à L 3121-55 proposent une nouvelle présentation des conventions de forfait.

C’est ainsi que les articles confirment les points suivants :

  • La durée du travail peut être forfaitisée en heures ou en jours (article L 3121-53) ;
  • Le forfait en heures est hebdomadaire, mensuel ou annuel (article L 3121-54) ;
  • Le forfait en jours est annuel (article L 3121-54) ;
  • La forfaitisation de la durée du travail doit faire l'objet de l'accord du salarié et d'une convention individuelle de forfait établie par écrit (article L 3121-55). 

Article L3121-53 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

La durée du travail peut être forfaitisée en heures ou en jours dans les conditions prévues aux sous-sections 2 et 3 de la présente section.

Article L3121-54 

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

Le forfait en heures est hebdomadaire, mensuel ou annuel. Le forfait en jours est annuel.

Article L3121-55

Créé par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)

La forfaitisation de la durée du travail doit faire l'objet de l'accord du salarié et d'une convention individuelle de forfait établie par écrit.

Références

Cour de cassation - Chambre sociale N° de pourvoi : 19-14.882 ECLI:FR:CCASS:2021:SO00189 Non publié au bulletin

Solution : Cassation partielle Audience publique du mercredi 10 février 2021 Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, du 06 février 2019