Le TJ de Chalon valide l’impossibilité de télétravailler pour des conseillers en agence

Actualité
Droit du travail Télétravail

Le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône a jugé que des conseillers d’une agence d’assurance, travaillant en point d’accueil physique, ne pouvaient pas être placés en télétravail, compte tenu de leur mission.

Publié le
Télécharger en PDF

Cet article a été publié il y a 3 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Rappel sur la définition des activités télétravaillables

Dans le cadre de la crise sanitaire, les entreprises doivent définir un plan d’action, pour réduire au maximum le temps de présence sur site des salariés, tenant compte des activités télétravaillables au sein de l’entreprise.

Concrètement, vous devez définir les activités télétravaillables :

En principe, c’est l’accord collectif ou la charte mettant en place le télétravail qui fixe les critères à remplir pour être éligible au télétravail dans l’entreprise. Dans ce cas, il convient de s’y référer.

A défaut d’accord ou de charte, vous devez identifier concrètement les activités qui peuvent faire l’objet de télétravail, sans raisonner à partir des « métiers ». En effet, certains métiers peuvent paraître a priori non « télétravaillables », mais une partie des activités peut parfois s’effectuer à distance.

Le Ministère du Travail donne des exemples : renseigner le public, réaliser des enquêtes, faire du support informatique, de la gestion de projet, des achats, réaliser des supports de communication, traiter des dossiers en retard, développer des projets, etc…

En revanche, le télétravail n’est en général pas un mode d’organisation applicable pour les activités attachées à des lieux ou des personnes, qui impliquent de se rendre sur des lieux spécifiques par exemple pour inspecter, nettoyer, installer, réparer ou utiliser des outils et machines ou encore s’occuper de personnes ou d’animaux.

Le Ministère du Travail conseille une méthode en 3 temps pour identifier les activités télétravaillables :

  • Lister les principales activités pour chaque fonction ou métier, en réfléchissant à des activités qui pourraient avoir une valeur ajoutée pour préparer la sortie de crise (mise à jour de procédures et de supports de travail, veille) ;
  • Evaluer les freins ou difficultés éventuelles au télétravail pour chacune de ces activités pour l’entreprise, le client et le télétravailleur (exemples : accès au serveur à distance, qualité du réseau internet, confidentialité des données, relations à préserver avec le client, etc...) ;
  • Identifier si des moyens et conditions peuvent être réunis pour lever ces difficultés (matériel de travail, installation de connexion sécurisée, ouverture de salles de visioconférence, définition de modalités et de plages de disponibilité pour les clients, les collègues et les managers, formation à distance à l’usage de nouveaux outils numériques, etc…).

En cas de contrôle, les actions mises en œuvre doivent être présentées à l'inspection du travail.

L’attention de l’inspection du travail porte sur le caractère effectif des actions mises en œuvre pour réduire au maximum le temps de présence sur site dont les activités sont totalement ou partiellement télétravaillables plutôt que sur le formalisme du plan d’action.

Les entreprises qui ne respectent pas les recommandations sanitaires notamment celles relatives au recours au télétravail pour les tâches réalisables à distance peuvent faire l’objet d’observations de l’agent de contrôle, d’une mise en demeure de respecter les principes généraux de prévention en cas de mise en danger des salariés, voire de poursuites devant le Tribunal Judiciaire.

C’est ce qu’il s’est passé en l’espèce…

Saisine du TJ sur l’absence de télétravail

En l’espèce, l’inspection du travail avait mené plusieurs contrôles dans un point d’accueil physique de la MACIF et conclu que les conseillers qui y travaillaient se trouvaient dans une situation dangereuse face au risque de contamination au Covid-19.

L’inspection du travail avait notamment relevé que le télétravail n’avait pas été mis en place dans cette agence. La MACIF avait d’ailleurs fait l’objet d’une mise en demeure du DIRECCTE, qu’elle avait contestée estimant qu’elle était dans l’impossibilité de mettre en place le télétravail dans les points d’accueil physiques.

En parallèle de ce contentieux, l’inspection du travail a saisi le juge des référés pour que soit ordonnée la mise en œuvre par la MACIF de plusieurs mesures, et notamment la mise en place du télétravail « pour les tâches pouvant être réalisées à distance comme les appels sortants de manière à effectuer une rotation du personnel et ainsi réduire la présence simultanée du personnel, soit au minimum un jour par semaine par conseiller ».

Les arguments de la MACIF étaient les suivants :

  • La mission des points d’accueil, qui est d’accueillir, de renseigner et d’accompagner le client exprimant le besoin de rencontrer physiquement un conseiller a été qualifiée d’essentielle, autorisant une ouverture pendant les périodes de confinement.
  • Si les appels téléphoniques sortants constituent 15 à 20 % de l’activité d’un conseiller, il n’est pas possible d’y consacrer une journée complète de télétravail car cette activité est exercée entre la réception en présentiel des clients et est stoppée dès l’arrivée spontanée d’un client ; de ce fait, la mise en place d’une journée de télétravail entraînerait une dégradation des conditions de travail des autres conseillerssur lesquels viendraient se concentrer les flux de clients, augmentant le risque de contamination.
  • L’entreprise a mis en place les gestes barrière(port du masque permanent, distanciation physique, matériel de nettoyage, affichage des mesures sanitaires, nettoyage quotidien des locaux et du mobilier, interdiction de regroupement des salariés à la pause-café et à la pause-déjeuner, absence de distribution de documents commerciaux, etc.) et l’agence dispose de 7 bureaux individuels qui permettent à chaque conseiller de travailler de manière isolée, étant précisé qu’en moyenne 6 conseillers sont présents simultanément dans l’agence.

La MACIF avait également réalisé une étude des activités télétravaillables au terme de laquelle un certain nombre de freins et de difficultés avaient été relevés : concentration des flux sur un nombre inférieur de salariés d’où une augmentation des risques, mise en difficulté d'une partie des sociétaires notamment la population senior, perte de qualité de service augmentation du risque d'incivilités à l'encontre des conseillers, à terme conséquence sur le maintien de l'emploi.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, le juge des référés a estimé que « la mission des points d’accueil physiques qui est considérée comme essentielle ne permet pas de placer les conseillers en télétravail ».

Le juge a en outre estimé que la mise en place du télétravail « aurait pour conséquence d’augmenter le risque d’exposition aux agents biologiques pathogènes pour les conseillers ».

Référence

TJ Chalon sur Saône, 13 avril 2021, n° RG 21/00047.

Accès à votre contenu même hors ligne

Recevez ce contenu par email

ou
ou

Réagir à cet article

Avez-vous trouvé cet article utile ?

Aucune note, soyez le premier à noter cet article

Votre note :

Commentaires

Aucun commentaire, soyez le premier à commenter cet article

Votre commentaire sera publié après connexion.

Une question sur cet article ?

Posez votre votre question sur le forum

Les questions liées sur le forum