Mises en garde de la CNIL sur l’extension du pass sanitaire

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Après la Défenseur des droits, c’est au tour de la Présidente de la CNIL de mettre en garde le Sénat sur l’extension du pass sanitaire.

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À la suite de l’audition de sa présidente par le Sénat, la CNIL a publié sa position sur l’extension du recours obligatoire au passe sanitaire prévue par le projet de loi relatif à la gestion de la crise liée à la COVID-19.

Si elle ne remet pas en cause le principe de l’extension, la CNIL attire l’attention sur plusieurs points pour le débat parlementaire.

Mises en garde de la CNIL

  • La CNIL alerte le Parlement sur le fait qu’instituer un passe sanitaire pour l’accès à des lieux de la vie courante et de nombreux moyens de transport est un choix éthique. Il faut éviter toute banalisation de ce type de mesure.
  • Le contexte sanitaire peut justifier des mesures exceptionnelles, si elles sont vraiment nécessaires pour lutter contre le rebond de l’épidémie et éviter un nouveau confinement.
  • La CNIL souligne que le fait que les tests soient gratuits ou payants est essentiel pour apprécier la portée de la mesure.
  • La CNIL invite le Parlement à s’interroger de façon précise sur les lieux où le passe sanitaire s’avère réellement nécessaire et sur la possibilité de ne pas inclure les mineurs dans le dispositif.
  • Elle estime indispensable que le Parlement demande une évaluation à l’automne de l’ensemble des dispositifs mis en œuvre pour lutter contre la COVID-19, et notamment des dispositifs numériques, afin de supprimer ceux dont l’utilité ne serait pas avérée.
  • La loi devrait préciser davantage les modalités de contrôle de l’identité des porteurs de passe sanitaire, pour éviter la généralisation de contrôles disproportionnés.

L’importante extension du recours obligatoire au passe sanitaire soulève des questions inédites et complexes d’articulation entre protection de la santé publique et exercice de libertés fondamentales. Ce choix comporte une dimension éthique. Le dispositif va aboutir à ce que les Français doivent présenter plusieurs fois par jour un « passe » pour des activités de la vie courante, ce qui s’accompagnera probablement d’une forme de contrôle d’identité.

La mise en place d’un contrôle sanitaire à l’entrée de certains lieux ou moyens de transport questionne la frontière entre ce qui relève de la responsabilité individuelle et ce qui relève du contrôle social. En principe, il ne doit pas y avoir de contrôle de l’état de santé à l’entrée de lieux de vie collective.

Lors de son audition, la présidente de la CNIL a donc rappelé la nécessité de prêter une attention particulière à l’effet de cliquet d’une telle mesure. Le législateur doit tenir compte du risque d’accoutumance et de banalisation de tels dispositifs attentatoires à la vie privée et de glissement, à l’avenir, et potentiellement pour d’autres considérations, vers une société où de tels contrôles seraient la norme et non l’exception.

Pour accepter une telle extension, le Parlement doit estimer qu’elle est indispensable à la gestion de la crise et que la restriction apportée aux libertés est proportionnée. L’appréciation de cette proportionnalité dépend grandement du caractère gratuit ou payant des tests de dépistage.

Le rebond de l’épidémie peut justifier des mesures exceptionnelles, pour éviter un nouveau confinement, mais l’extension du passe sanitaire doit être paramétrée au plus près. La présidente de la CNIL a appelé le Parlement à distinguer davantage les lieux et activités concernés par le passe sanitaire, en tenant compte des autres mesures mises en place pour réduire les risques de contamination dans chacun de ces lieux : port du masque, distanciation, capacité d’accueil, jauge éventuelle, etc. Ces risques ne sont pas les mêmes entre, par exemple, les salles et les terrasses de restaurants.

Si l’objectif du passe sanitaire est d’éviter que notre système de santé soit à nouveau débordé par un afflux de personnes développant des formes graves de la COVID-19 faute de s’être fait vacciner, la CNIL a interrogé le Parlement sur la nécessité d’inclure les plus jeunes dans le dispositif, dès lors qu’ils ne développent généralement pas de forme grave de la maladie.

La présidente de la CNIL a également interrogé le Parlement sur l’utilité relative du passe sanitaire par rapport aux autres mesures mises en place depuis le début de l’épidémie. Gestes barrières, obligation de port du masque, télétravail sanitaire, système d’enquêtes sanitaires d’une puissance inédite, application TousAntiCovid, cahiers de rappel, campagne vaccinale et passe sanitaire : la loi devrait prévoir le principe d’une évaluation rigoureuse et scientifique de ces différents fichiers et dispositifs, notamment des dispositifs numériques, afin de supprimer des instruments s’avérant ou devenus inutiles. Faut-il, par exemple, conserver un dispositif de cahier de rappel (numérique ou papier) dans les restaurants si on limite l’accès aux seules personnes vaccinées, immunisées ou testées négatives à la COVID-19 ?

Enfin, l’impératif de nécessité implique que le dispositif soit limité dans le temps, ce qui est bien prévu dans le projet de loi.

Référence

Audition du 21 juillet 2021 devant la commission des lois du Sénat sur le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire - Propos liminaire de Marie-Laure Denis, présidente de la CNIL.

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