Le régime de l’ATI est assoupli depuis le 1er avril 2022

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2 décrets, publiés au JO du 31 mars 2022, pris en application de la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, modifient le régime de l’ATI (Allocation aux Travailleurs Indépendants), notre actualité vous explique.

Le régime de l’ATI est assoupli depuis le 1er avril 2022
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Cet article a été publié il y a 2 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Rappels des dispositions de la loi du 14 février 2022

La loi n°2022-172 du 14 février 2022, JO du 15, contient de nombreuses dispositions concernant le statut des entrepreneurs individuels.

Création d’un statut unique

L’article L 526-22 du code de commerce définit désormais l’entrepreneur individuel comme la « personne physique qui exerce en son nom propre une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes ».

Protection patrimoine privé

En outre, et il s’agit d’une modification importante « son patrimoine professionnel, constitué des biens, droits, obligations et sûretés utiles à son activité indépendante, est séparé de son patrimoine privé ».

Cette disposition n’entrera toutefois en vigueur que le 15 mai 2022, nécessitant au passage la publication d’un décret. 

Concrètement, ce nouveau statut permettra :

  1. Que le patrimoine personnel de l’entrepreneurindividuel devienne par défaut insaisissable par les créanciers professionnels (alors qu’auparavant seule la résidence principale était protégée) ;
  2. Que, seuls les éléments nécessaires à l’activité professionnelle de l’entrepreneur pourront à l'avenir être saisis en cas de défaillance professionnelle.

Précision importante :

  • La séparation des patrimoines s’effectuera automatiquement, sans démarche administrative ou information des créanciers.

Article L526-22

Version en vigueur à partir du 15 mai 2022

Création LOI n°2022-172 du 14 février 2022 - art. 1

L'entrepreneur individuel est une personne physique qui exerce en son nom propre une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes.

Les biens, droits, obligations et sûretés dont il est titulaire et qui sont utiles à son activité ou à ses activités professionnelles indépendantes constituent le patrimoine professionnel de l'entrepreneur individuel. Sous réserve du livre VI du présent code, ce patrimoine ne peut être scindé. Les éléments du patrimoine de l'entrepreneur individuel non compris dans le patrimoine professionnel constituent son patrimoine personnel.

La distinction des patrimoines personnel et professionnel de l'entrepreneur individuel ne l'autorise pas à se porter caution en garantie d'une dette dont il est débiteur principal.

Par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil et sans préjudice des dispositions légales relatives à l'insaisissabilité de certains biens, notamment la section 1 du présent chapitre et l'article L. 526-7 du présent code, l'entrepreneur individuel n'est tenu de remplir son engagement à l'égard de ses créanciers dont les droits sont nés à l'occasion de son exercice professionnel que sur son seul patrimoine professionnel, sauf sûretés conventionnelles ou renonciation dans les conditions prévues à l'article L. 526-25.

Les dettes dont l'entrepreneur individuel est redevable envers les organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales sont nées à l'occasion de son exercice professionnel.

Seul le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel constitue le gage général des créanciers dont les droits ne sont pas nés à l'occasion de son exercice professionnel. Toutefois, si le patrimoine personnel est insuffisant, le droit de gage général des créanciers peut s'exercer sur le patrimoine professionnel, dans la limite du montant du bénéfice réalisé lors du dernier exercice clos. En outre, les sûretés réelles consenties par l'entrepreneur individuel avant le commencement de son activité ou de ses activités professionnelles indépendantes conservent leur effet, quelle que soit leur assiette.

La charge de la preuve incombe à l'entrepreneur individuel pour toute contestation de mesures d'exécution forcée ou de mesures conservatoires qu'il élève concernant l'inclusion ou non de certains éléments d'actif dans le périmètre du droit de gage général du créancier. Sans préjudice de l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, la responsabilité du créancier saisissant peut être recherchée pour abus de saisie lorsqu'il a procédé à une mesure d'exécution forcée ou à une mesure conservatoire sur un élément d'actif ne faisant manifestement pas partie de son gage général.

Dans le cas où un entrepreneur individuel cesse toute activité professionnelle indépendante, le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel sont réunis. Il en est de même en cas de décès de l'entrepreneur individuel, sous réserve des articles L. 631-3 et L. 640-3 du présent code.

Les conditions d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat.

Conformément au I de l'article 19 de la loi n° 2022-172 du 14 février 2022, ces dispositions entrent en vigueur à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi. Les articles L. 526-22 à L. 526-31 du code de commerce s'appliquent aux créances nées après l'entrée en vigueur de ladite loi.

Disparition du statut d’EIRL

Autre disposition prévue par la loi :

  • Le statut de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL), institué par une loi du 15 juin 2010, cessera progressivement, ses principaux avantages étant repris dans le nouveau statut. 

Le statut de l'EIRL, jugé complexe, n'a pas rencontré un grand succès (moins de 100 000 EIRL en juin 2021). 

De façon concrète :

  • Cette abrogation est entrée en vigueur dès le 16 février 2022 (lendemain de la publication de la loi) et se traduit par l’abrogation de l’article L 526-5-1 de Code de commerce ;
  • À l’expiration d’un délai de 6 mois suivant la promulgation de la loi, soit au 15 août 2022, sera également abrogé l’article L 526-16 du même Code qui prévoit le maintien du patrimoine affecté à l’activité professionnelle en cas de reprise de celle-ci par un héritier ou un ayant droit de l’EIRL décédé ;

Possibilité de continuer à appliquer le régime 

Le régime de l’EIRL continue toutefois à s’appliquer pour les entrepreneurs exerçant sous ce statut à la date de la publication de la loi.

Extrait de la loi

Article 6
I.-La section 2 du chapitre VI du titre II du livre V du code de commerce est ainsi modifiée :
1° L'article L. 526-5-1 est abrogé ;
2° Le II de l'article L. 526-8 est ainsi modifié :
a) A la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « qui exerçait son activité professionnelle antérieurement à la déclaration mentionnée à l'article L. 526-7 » sont supprimés ;
b) A la seconde phrase du même deuxième alinéa, les mots : « le premier exercice » sont remplacés par les mots : « l'exercice suivant » ;
c) Au dernier alinéa, après le mot : « individuel », sont insérés les mots : « à responsabilité limitée » ;
3° L'article L. 526-16 est abrogé ;
4° A la première phrase du deuxième alinéa du II de l'article L. 526-17, après le mot : « affecté », sont insérés les mots : « à un entrepreneur individuel ou » ;
5° Le second alinéa de l'article L. 526-19 est supprimé.
II.-A compter de la publication de la présente loi, nul ne peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel en application de l'article L. 526-6 du code de commerce. L'affectation à un patrimoine affecté déjà constitué ou le retrait d'éléments de celui-ci demeurent possibles.
Les personnes physiques exerçant leur activité sous le régime de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée à la date de publication de la présente loi demeurent régies par la section 2 du chapitre VI du titre II du livre V du code de commerce, dans sa rédaction résultant de la présente loi.
Le présent II est applicable dans les îles Wallis et Futuna.

Assouplissement bénéfice de l’ATI

Avant la loi, le droit à l’ATI était subordonné, notamment, à l’engagement d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

Retrouver notre fiche pratique à ce sujet :

La loi ajoute un nouveau cas d’éligibilité à l’ATI pour que les travailleurs indépendants involontairement privés de leur activité puissent en bénéficier plus précocement, en raison d’une activité « non viable » (le décret publié au JO apporte des précisions à ce sujet).

En outre, la loi prévoit la fixation :

  1. D’une valeur forfaitaire ;
  2. Et d’une valeur « plancher »

Un délai de carence est également prévu, interdisant à tout travailleur indépendant le bénéfice d’une ATI pendant une période de 5 ans à compter de la date à laquelle elle a cessé d’en bénéficier au titre d’une activité antérieure.

Les décrets publiés le 31 mars 2022

Ainsi que nous l’indiquions en préambule, 2 décrets publiés au JO du 31 mars 2022, sont venus apporter des précisions importantes…

Justification revenus antérieurs

Version en vigueur jusqu’au 31 mars 2022 

Le 3° de l’article R 5424-70 du code du travail indique :

Pour bénéficier de l'allocation des travailleurs indépendants (…) ils doivent justifier « au titre de l'activité non salariée mentionnée à l'article L. 5424-25, de revenus antérieurs d'activité égaux ou supérieurs à 10 000 euros par an »

Nouvelle version en vigueur depuis le 1er avril 2022 

Pour bénéficier de l'allocation des travailleurs indépendants (…) ils doivent justifier « au titre de l'activité non salariée mentionnée à l'article L. 5424-25, de revenus antérieurs d'activité égaux ou supérieurs à 10 000 euros calculés sur une période de référence définie au II de l'article R. 5424-71 »

Détermination des revenus antérieurs

Version en vigueur jusqu’au 31 mars 2022

L’article R 5424-71 du code du travail indique :

  1. La condition de revenus antérieurs d'activité s'apprécie sur la base de la moyenne des revenus ayant fait l'objet des deux dernières déclarations fiscales correspondant chacune à une année complète d'activité.
  2. Lorsqu'une seule déclaration fiscale correspondant à une année complète d'activité est disponible, la condition de revenus antérieurs d'activité s'apprécie sur la base des revenus ayant fait l'objet de cette déclaration.
  3. Lorsqu'aucune déclaration fiscale correspondant à une année complète d'activité n'est disponible, la condition de revenus antérieurs d'activité s'apprécie sur la base des revenus ayant fait l'objet de la dernière déclaration fiscale, recalculés pour correspondre à une année complète d'activité

Nouvelle version en vigueur depuis le 1er avril 2022 

A compter du 1er avril 2022, ces dispositions sont modifiées comme suit :

La condition de revenus antérieurs d'activité s'apprécie au titre de :

  1. L'année civile ayant donné lieu aux revenus les plus élevés, lorsque les deux dernières déclarations fiscales correspondent à deux années complètes d'activité ;
  2. L'année civile ayant fait l'objet de la dernière déclaration fiscale correspondant à une année complète d'activité, lorsqu'une seule déclaration fiscale correspondant à une année complète d'activité est disponible ;
  3. L'année civile ayant fait l'objet de la dernière déclaration fiscale sur la base des revenus recalculés pour correspondre à une année complète d'activité, lorsqu'aucune déclaration fiscale correspondant à une année complète d'activité n'est disponible.

Caractère non viable activité

A compter du 1er avril 2022, 2 nouveaux articles sont ajoutés au code du travail : 

L’article R 5424-72-1 définit le caractère non viable de l'activité du travailleur indépendant, cette définition peut être établie :

  • Soit par un expert-comptable ;
  • Soit par une personne habilitée d'un établissement du réseau consulaire du secteur d'activité dont relève le travailleur indépendant.


L’article R 5424-72-2 définit le caractère non viable de l'activité du travailleur indépendant :

  • Le caractère non viable de l'activité mentionné au 3° de l'article L. 5424-25 correspond à une baisse d'au moins 30 % des revenus déclarés par le travailleur indépendant au titre de l'impôt sur le revenu correspondant à l'activité non salariée

Valeurs ATI

Le décret n°2022-451 du 30 mars 2022 confirme les valeurs suivantes, au sein de l’article D 5424-74 du code du travail : 

En métropole, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon :

  1. Le montant forfaitaire de l'allocation des travailleurs indépendants est fixé à 26,30 euros par jour ;
  2. Le montant minimum est de 19,73 euros par jour.


Pour information, des valeurs différentes sont fixées à Mayotte comme suit :

  • Le montant forfaitaire est égal à 19,73 € par jour ;
  • Et le montant minimum à 13,15 € par jour.  

Entrée en vigueur

Les dispositions du présent décret entrent en vigueur à compter du 1er avril 2022, pour les demandes déposées à partir de cette date et remplissant les conditions d'ouverture du droit prévu à l'article L. 5424-25 du code du travail à compter de cette même date.

Références

Décret n° 2022-450 du 30 mars 2022 relatif à l'allocation des travailleurs indépendants, JO du 31 

Décret n° 2022-451 du 30 mars 2022 relatif au montant de l'allocation des travailleurs indépendants, JO du 31 

Loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante, JO du 15