Cet article a été publié il y a 2 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
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Présentation de l’affaire
Dans cette affaire, un salarié est engagé en qualité de gardien concierge le 1er octobre 2010 par un syndicat de copropriétaires.
Il est placé en arrêt de travail pour accident du travail du 12 mai 2011 au 15 janvier 2012, et ensuite en arrêt pour maladie.
Le salarié est finalement licencié 4 décembre 2012 pour absence prolongée désorganisant le fonctionnement de la copropriété.
Contestant son licenciement, il saisit la juridiction prud'homale, estimant notamment qu’en l’absence de visite de reprise après son arrêt de travail consécutif à un accident du travail, il devait bénéficier à ce titre de la protection légale prévue en cas d’arrêt de travail consécutif à un accident du travail.
Arrêt de la cour d’appel
La cour d'appel de Bastia, par arrêt du 18 septembre 2019, déboute le salarié de sa demande tendant à prononcer la nullité du licenciement.
Selon la cour d’appel, ce licenciement ne pouvait être considéré nul compte tenu du fait :
- Qu’il n'y a pas de concours de cause de suspension commandant que la cause chronologiquement apparue la première (accident du travail) soit retenue comme cause de la suspension de la relation de travail au moment de la procédure de licenciement, intervenue en décembre 2012 ;
- Alors que le salarié se voyait délivrer depuis janvier 2012 des arrêts de travail pour maladie ordinaire ;
- Qu’une visite de reprise n'est pas exigée pour permettre le passage d'une cause de suspension à une autre, et qu'au regard des éléments dont il disposait au moment du licenciement tel que susvisés, l'employeur ne pouvait avoir connaissance d'une origine professionnelle, au moins partielle, de la suspension du contrat de travail, en lien avec l'accident du travail du salarié du 12 mai 2011.
Arrêt de la Cour de cassation
Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel, elle casse et annule l’arrêt et décide de renvoyer les 2 parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
En effet, selon les juges, il était constaté que :
- Le salarié avait été victime le 12 mai 2011 d'un accident survenu au lieu de travail, que les arrêts de travail consécutifs à cet accident avaient été prolongés de manière ininterrompue jusqu'au 15 janvier 2012, que le salarié avait ensuite été placé en arrêt maladie à compter du 16 janvier 2012 ;
- Ce dont il se déduisait qu'en l'absence de visite de reprise, le contrat de travail se trouvait toujours suspendu en conséquence de l'accident du travail dont avait été victime le salarié ;
- Et que le salarié ouvrait droit au régime de protection contre le licenciement propre à la rupture prononcée durant la suspension du contrat de travail relative à un arrêt de travail consécutif à un accident du travail.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail :
5. Aux termes du premier de ces textes, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
6. Selon le second, toute rupture prononcée en méconnaissance des termes de l'article L. 1226-9 est nulle.
7. Les règles protectrices édictées par ces textes s'appliquent dès lors que la suspension du contrat de travail a pour origine, au moins partiellement, un accident du travail ou une maladie professionnelle et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
8. Pour débouter le salarié de sa demande tendant à la nullité du licenciement et de ses demandes subséquentes, l'arrêt retient qu'il n'y a pas de concours de cause de suspension commandant que la cause chronologiquement apparue la première (accident du travail) soit retenue comme cause de la suspension de la relation de travail au moment de la procédure de licenciement, intervenue en décembre 2012, alors que le salarié se voyait délivrer depuis janvier 2012 des arrêts de travail pour maladie ordinaire, qu'une visite de reprise n'est pas exigée pour permettre le passage d'une cause de suspension à une autre, et qu'au regard des éléments dont il disposait au moment du licenciement tel que susvisés, l'employeur ne pouvait avoir connaissance d'une origine professionnelle, au moins partielle, de la suspension du contrat de travail, en lien avec l'accident du travail du salarié du 12 mai 2011.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié avait été victime le 12 mai 2011 d'un accident survenu au lieu de travail, que les arrêts de travail consécutifs à cet accident avaient été prolongés de manière ininterrompue jusqu'au 15 janvier 2012, que le salarié avait ensuite été placé en arrêt maladie à compter du 16 janvier 2012, ce dont il se déduisait qu'en l'absence de visite de reprise, le contrat de travail se trouvait toujours suspendu en conséquence de l'accident du travail dont avait été victime le salarié, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal et sur le pourvoi incident, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Régime de protection : rappel
Profitons de l’affaire présente pour rappeler le régime de protection dont bénéficie un salarié en arrêt de travail consécutif à un accident du travail.
Pour cela il convient de se reporter à 2 articles du code du travail :
L’article L 1226-9, selon lequel, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s’il justifie :
- Soit d'une faute grave de l'intéressé ;
- Soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
Et l’article L 1226-13 qui confirme que toute rupture prononcée, en méconnaissance de l’article L 1226-9, doit être considéré comme nulle.
Article L1226-9
Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
Article L1226-13
Version en vigueur depuis le 01 mai 2008
Toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-18 est nulle.
Références
Cour de cassation - Chambre sociale N° de pourvoi : 21-13.314 ECLI:FR:CCASS:2022:SO00470 Non publié au bulletin
Solution : Cassation Audience publique du mercredi 13 avril 2022 Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, du 18 septembre 2019