Requalification d’un contrat en VRP exclusif : attention à la clause autorisant le travail chez d’autres employeurs

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Paie Prud'hommes

Un VRP exclusif exerce son activité pour un seul employeur, à l’inverse du VRP multicartes. Un arrêt de la Cour de cassation nous éclaire sur la possibilité, ou non, de bénéficier du statut VRP exclusif et du bénéfice de la garantie de rémunération.

Requalification d’un contrat en VRP exclusif : attention à la clause autorisant le travail chez d’autres employeurs
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Cet article a été publié il y a un an, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Présentation de l’affaire

Un salarié est engagé, en qualité de voyageur représentant placier (VRP) non exclusif à compter du 28 octobre 2014.

Le 9 juillet 2015, les parties signent une convention de rupture du contrat de travail.
Le salarié saisit une juridiction prud'homale, le 6 avril 2016, afin de solliciter la requalification de son contrat en un contrat de VRP exclusif à temps complet ainsi que le paiement de diverses sommes.

Arrêt de la cour d’appel

La cour d’appel de Toulouse, par arrêt du 13 septembre 2019, donne raison au salarié, s’appuyant pour cela sur les faits suivants :

  • Selon les pièces produites par le salarié et le contrat de travail, le représentant devait dispenser tout son temps de travail à son activité pour le compte de son employeur et qu'il était dans l'impossibilité de travailler pour un autre employeur ;
  • Et ce d'autant plus qu'il était chargé de véhiculer les autres VRP sur leur lieu de travail et de les ramener en fin de journée.  

« Il était donc soumis de fait par son employeur unique à une clause d'exclusivité ».

Arrêt de la Cour de cassation

Mais les arguments ne convainquent pas la Cour de cassation, qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Montpellier.

Elle relève en effet que :

  • Le contrat de travail du salarié ne comportait pas de clause d'exclusivité;
  • Et qu'en son article 3, autorisait le salarié à travailler pour un autre employeur dès lors qu’il ne s'agissait pas d'une entreprise concurrente ;
  • Ce dont il résultait que le salarié n'était pas soumis à une clause d'exclusivité et ne pouvait prétendre au bénéfice de la rémunération minimale forfaitaire.

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 7313-6 du code du travail et 5-1 de l'accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 : 6.
Selon le premier de ces textes, le contrat de travail peut, pour sa durée, prévoir l'interdiction pour le voyageur, représentant ou placier, de représenter des entreprises ou des produits déterminés.
7. Selon le second, la fixation de la rémunération relève du libre accord des représentants de commerce et de leurs employeurs. Néanmoins, lorsqu'un représentant de commerce réalisant des ventes, au sens de la loi du 22 décembre 1972, est engagé à titre exclusif par un seul employeur, il aura droit, au titre de chaque trimestre d'emploi à plein temps, à une ressource minimale forfaitaire.
8. Il en résulte que seul le représentant engagé à titre exclusif par un seul employeur a droit à une ressource minimale forfaitaire. Le caractère exclusif de l'engagement du représentant s'apprécie au regard des dispositions contractuelles.
9. Pour requalifier le contrat de travail de VRP non exclusif du salarié en contrat de travail de VRP exclusif et condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti, l'arrêt retient qu 'il se déduit des pièces produites par le salarié et de l'économie générale du contrat que le représentant devait dispenser tout son temps de travail à son activité pour le compte de son employeur et qu'il était dans l'impossibilité de travailler pour un autre employeur, et ce d'autant plus qu'il était chargé de véhiculer les autres VRP sur leur lieu de travail et de les ramener en fin de journée. Il était donc soumis de fait par son employeur unique à une clause d'exclusivité.
10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le contrat de travail du salarié ne comportait pas de clause d'exclusivité et qu'en son article 3, il autorisait l'intéressé à travailler pour un autre employeur dès lors qu' il ne s'agissait pas d'une entreprise concurrente, ce dont il résultait que le salarié n'était pas soumis à une clause d'exclusivité et ne pouvait prétendre au bénéfice de la rémunération minimale forfaitaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Dispositif

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie le contrat de travail de VRP non exclusif de M. [Z] en contrat de travail de VRP exclusif et condamné la société (…)  à lui payer les sommes de 2 505,46 euros à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti, 918,91 euros pour les congés payés afférents et 1 000 euros de dommages -intérêts en réparation de son préjudice moral, et en ce qu'il condamne la société (…) aux dépens ainsi qu'à payer à M. [Z] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, l'arrêt rendu le 13 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se sont soldées avant cet arrêt et les ont renvoyées devant la cour d'appel de Montpellier ; 

La garantie de rémunération

Notre site vous propose une fiche pratique exclusivement consacrée à la thématique de la garantie de rémunération dont peuvent bénéficier les VRP multicartes.

 En voici un extrait :

Calcul de la rémunération minimale

  • La rémunération ne peut pas être inférieure à 520 fois le Smic horaire par trimestre (valeur smic horaire du dernier mois échu) ;
  • La rémunération minimale s’entend nette des frais professionnels (en d’autres termes, le VRP bénéficiera en plus du remboursement des frais professionnels) ;
  • Si les commissions incluent les frais professionnels évalués forfaitairement, ce sont les commissions après déduction de ces frais qu’il convient de comparer à la rémunération minimale conventionnelle ;
  • La rémunération garantie est calculée au prorata en cas de début (ou fin de contrat) en cours de trimestre ou suspension du contrat de travail ;
  • Le complément versé au titre de la garantie de rémunération pourra être récupéré par l’employeur (sur les commissions suivantes) dans la limite des 3 trimestres suivants.

Article 5 ANI du 3/10/1975

Exemple chiffré 

Le contexte

  • Soit un VRP exclusif rémunéré seulement à la commission ayant acquis, au cours du 1er trimestre 2023, un droit à commissions de 3 300 €,
  • Ses frais professionnels, remboursés sur justificatifs, sont de 1.100 €.

Le complément de rémunération 

  • La rémunération minimale pour le trimestre considéré est égale à 11,27 € × 520 = 5.860,40 € ;
  • Le complément à la charge de l'employeur est égal à 5.860,40 € − 3 300 € = 2.560,40 €. 

Références

Cour de cassation, Audience publique du 8 février 2023 Cassation partielle Arrêt n° 132 FS-B Pourvoi n° T 20-10.515