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- La remise d’un bulletin de paie ne suffit pas à prouver le paiement du salaire
- En cas d’inaptitude professionnelle : l’indemnité compensatrice n’ouvre pas droit à congés payés
Présentation de l’affaire
Une salariée est engagée en qualité de responsable de site adjoint, et promue par avenant du 27 mars 2017 responsable de site.
Le 10 octobre 2017, elle est informée de son affectation sur une autre site, en application de la clause de mobilité insérée au contrat de travail.
La salariée décide de prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 28 février 2018 et saisit la juridiction prud'homale.
Parmi les griefs invoqués par la salariée, l’absence de paiement des indemnités de congés payés mentionnés sur les bulletins de paie
Arrêt de la cour d’appel
Par arrêt du 20 mai 2021, la cour d'appel de Versailles déboute la salariée de sa demande, au motif que selon elle :
- La salariée avait été remplie de son droit à indemnité de congés payés du fait que ''Le bulletin de paie du mois de mars 2018, mentionne, comme le fait valoir l'employeur, l'indemnisation de 29 jours de congés payés au titre de l'année précédente, et de 13 jours au titre de l'année en cours'' ;
- Et que la salariée ''ne prétend pas ne pas avoir reçu paiement du salaire mentionné dans la fiche de paie du mois de mars 2018''.
Mécontente de cet arrêt, la salariée décide de se pourvoir en cassation.
Extrait de l’arrêt :
qu'en l'espèce, la cour d'appel a déduit que le salarié aurait été rempli de son droit à indemnité de congés payés du fait que ''Le bulletin de paie du mois de mars 2018, mentionne, comme le fait valoir l'employeur, l'indemnisation de 29 jours de congés payés au titre de l'année précédente, et de 13 jours au titre de l'année en cours'', que la salariée ne conteste pas les mentions des fiches de paie et qu'elle ''ne prétend pas ne pas avoir reçu paiement du salaire mentionné dans la fiche de paie du mois de mars 2018'' ;
Arrêt de la Cour de cassation
La Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel, dont elle casse et annule l’arrêt, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.
Pour cela, la Cour de cassation se réfère aux articles L 3143-3 du code du travail et à l’article 1353 du code civil (NDLR : autrefois codifié article 1315).
En application de l’article L 3143-3 du code du travail, il est rappelé que :
- Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.
En application de l’article 1353 du code civil, il est également rappelé que :
- Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ;
- Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Concrètement, dans l’affaire présente :
- C’est à l’employeur qu’il appartenait d’apporter la preuve du paiement réel des indemnités de congés payés sur le bulletin de paie.
En en décidant autrement, la cour d’appel avait « inversé la charge de la preuve », faisant peser celle-ci sur la seule salariée.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 3141-3 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil :
6. Aux termes du premier de ces textes, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.
7. Aux termes du second, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
8. Pour débouter la salariée de sa demande tendant au paiement d'une somme à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt retient que le bulletin de paie du mois de mars 2018 mentionne l'indemnisation de 29 jours de congés payés au titre de l'année précédente et de 13 jours au titre de l'année en cours et que la salariée ne prétend pas ne pas avoir reçu paiement du salaire mentionné dans cette fiche de paie.
9. En statuant ainsi, alors qu'il appartient à l'employeur, débiteur de l'obligation de paiement de l'intégralité de l'indemnité due au titre des jours de congés payés, d'établir qu'il a exécuté son obligation, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquence de la cassation
10. La cassation prononcée ne s'étend pas aux autres chefs de dispositif visés par le moyen que la critique qu'il formule n'est pas susceptible d'atteindre.
11. La cassation du chef de dispositif déboutant la salariée de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés n'emporte pas cassation du chef de dispositif de l'arrêt la condamnant aux dépens, justifié par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci et non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [C] de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt rendu le 20 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Références
Cour de cassation - Chambre sociale N° de pourvoi : 21-19.497 ECLI:FR:CCASS:2023:SO00185 Non publié au bulletin
Solution : Cassation partielle Audience publique du mercredi 01 mars 2023 Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, du 20 mai 2021