Le groupe centriste du Sénat a déposé le 14 février une proposition de loi visant à interdire les grèves pour les personnels des services publics de transports dans la limite de 60 jours par an.
Le droit de faire grève étant constitutionnellement garanti, il n'est pas question de le remettre en cause.
Pour autant, le Conseil constitutionnel a déjà rappelé à plusieurs reprises que le législateur conservait la faculté d'apporter à ce droit des limitations nécessaires en vue d'assurer la continuité d'un service public.
La proposition de loi vise à assurer l'effectivité et la continuité du service public des transports pendant certaines périodes.
Au-delà du concept de service minimum appliqué dans plusieurs pays européens, l'Italie, par exemple, s'est dotée d'un système permettant de définir à l'avance les jours de l'année sur lesquels un préavis de grève ne peut porter, écartant ainsi le risque de perturbations excessives pendant les périodes où les déplacements sont les plus importants (vacances d'été, Noël, Pâques et consultations électorales).
S'inspirant de ce système, la proposition de loi offre la possibilité au gouvernement de prévoir chaque année des périodes de 7 jours maximum au cours desquelles il peut interdire les grèves pour l'ensemble de personnels concourant à la mise en oeuvre du service public de transports.
Le dispositif envisagé par la proposition de loi consiste à suspendre l’exercice du droit de grève dans les services publics de transport pendant des périodes sensibles telles que :
- de la veille au lendemain des jours fériés légaux ;
- pendant les périodes de vacances scolaires ;
- de la veille au lendemain des jours des élections nationales et locales au suffrages direct, ainsi que des référendums ;
- pendant les événements d’importance majeure sur le territoire français.
Pour une journée, la suspension du droit de grève correspondrait aux heures de pointe : de 6 h 30 à 9 h 30 et de 17 h 00 à 20 h 00.
Une période de suspension ne pourrait pas durer plus de 7 jours.
Un délai de 5 jours minimum devrait être respecté entre 2 périodes de suspension.
La notion de service public de transport de personnes vise l'ensemble des modes de transports terrestres et aériens sur le territoire métropolitain ainsi que pour les déplacements en provenance et à destination des départements ou collectivités d'outre-mer.
La mesure s’appliquerait aux personnels des services publics de transport régulier de personnes et des services librement organisés de transport ferroviaire de voyageurs à l’exception des services de transport international de voyageurs.
Cette faculté ouverte au pouvoir exécutif serait doublement encadrée dans le temps puisque, d'une part, cette interdiction ne pourrait pas dépasser 60 jours par année civile et, d'autre part, ces périodes seraient fixées chaque année par décret dont la publication interviendrait au moins 90 jours avant que la première période concernée ne débute.
La publication du décret définissant les périodes d'interdiction serait précédée d'une période de 30 jours au cours de laquelle les organisations syndicales représentatives au niveau national, tant patronales que salariales, sous l'égide du ministre chargé des transports mèneraient une négociation préalable portant sur le calendrier d'interdiction envisagé.
Les salariés qui feraient grève pendant une période de suspension pourraient faire l'objet d'une sanction disciplinaire.
Le projet de loi adopté par les sénateurs intègre également de nouvelles mesures :
- Il augmente le délai de prévenance à respecter de 48 à 72 heures pour faire grève dans les services publics de transport terrestre régulier de personnes.
- Il interdit aux salariés souhaitant faire grève les grèves courtes de type débrayage dès lors que l’exercice du droit de grève en cours de service est susceptible d'entraîner un risque de désordre manifeste à l’exécution du service public, en leur imposant alors un droit de grève exclusivement au début de l’une de leurs prises de service et jusqu’à son terme.
- Il supprime la possibilité de déposer un préavis de grève pour une durée illimitée en imposant un préavis de préavis de 30 jours maximum.
- Il ajoute, dans la définition de service minimum, la notion de couverture des besoins essentiels de la population notamment aux heures de pointe, la réquisition des salariés étant possible sous 24 heures lorsqu’il n’aura pas été possible, pendant 3 jours consécutifs, d’assurer le niveau minimal de service correspondant à la couverture des besoins essentiels de la population notamment aux heures de pointe.
La proposition de loi doit maintenant donner lieu à examen de l'Assemblée Nationale.
Proposition de loi visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève adoptée par Sénat le 9 avril 2024.
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