Deux options sont envisageables en cas d’absence injustifiée ou d’abandon de poste par un salarié : le licenciement pour faute grave ou la présomption de démission.
Pendant longtemps, il était interdit de considérer comme démissionnaire un salarié en absence injustifiée. La seule option offerte à l'employeur pour rompre le contrat de travail était le licenciement pour faute.
La loi Marché du Travail du 21 décembre 2022 a modifié la donne et créé une présomption de démission en cas d’abandon de poste après mise en demeure de l’employeur : L’employeur peut désormais présumer la démission d’un salarié en CDI qui quitte volontairement son poste et ne répond pas à une mise en demeure de reprise ou de justification de son absence.
Cette présomption de démission est applicable depuis le 17 avril 2023.
Si vous entendez faire valoir la présomption de démission, vous devez adresser au salarié, par lettre recommandée ou par lettre remise en main-propre contre décharge, un courrier de mise en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai que vous pouvez fixer librement mais qui ne peut être inférieur à 15 jours calendaires (donc week-end et jours fériés compris).
Ce délai commence à courir à compter de la date de présentation de la mise en demeure.
Ce n’est qu’à l’expiration de ce délai minimum de 15 jours que le salarié peut être présumé démissionnaire.
Cette présomption ne s’applique pas pour les salariés qui ne se rendent pas au travail pour des motifs légitimes, notamment :
- Raisons médicales : consultation d'un médecin qui prescrit un arrêt de travail le jour même ;
- Exercice du droit de retrait en cas de danger grave et imminent ;
- Exercice du droit de grève ;
- Refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à une réglementation ;
- Modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur.
Dans le cas où le salarié entend se prévaloir auprès de l'employeur de l’un des motifs légitimes de nature à faire obstacle à une présomption de démission, le salarié doit indiquer le motif qu'il invoque dans la réponse à la mise en demeure précitée.
Le Conseil d'Etat a apporté une précision importante pour que la présomption de démission soit applicable : Le courrier de mise en demeure doit mentionner clairement les conséquences pouvant résulter de l’absence de reprise du travail sauf motif légitime justifiant l’absence. Sans cette mention, la démission du salarié ne pourra pas être présumée.
CE, 18 décembre 2024, n° 473640
Nous avons intégré dans notre dossier spécial relatif à l'absence injustifiée un modèle de mise en demeure contenant cette nouvelle mention obligatoire :
Réagir en cas d’absence injustifiée d’un salarié
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La Cour d'appel de Paris a, quant à elle, précisé qu'en cas de mise en oeuvre de la présomption de démission pour abandon de poste, l’autorisation de l'inspection du travail est nécessaire pour les salariés protégés.
Le contrat de travail d’un salarié protégé ne peut en effet être rompu par l’employeur sans autorisation de l’inspection du travail.
La question s'est dès lors posée de savoir si l’employeur devait saisir l’inspection du travail en cas de mise en œuvre de la présomption de démission pour abandon de poste par un salarié protégé.
La Cour d’appel de Paris a rappelé que le statut protecteur ne s'applique pas lorsque le salarié décide de rompre unilatéralement son contrat de travail, ce qui s'explique par le fait que la rupture résulte de la seule volonté du salarié et ne fait pas intervenir l'employeur. Elle a jugé revanche que la présomption légale de démission en cas d'abandon de poste, qui fait intervenir l'employeur dans la rupture du contrat de travail, ne dispense pas ce dernier de solliciter l'inspection du travail pour un salarié protégé, d'autant plus que le salarié présumé avoir démissionné doit avoir « abandonné volontairement son poste », ce qui n'était pas applicable en l'espèce au salarié qui avait été mis à pied à titre conservatoire par l'employeur.
Affaire à suivre pour voir comment va se positionner la Cour de cassation sur le sujet...
CA Paris, 6 mars 2025, n° 24/02319
Enfin, le Conseil de Prud'hommes de Lyon a jugé récemment que le refus d'un salarié de voir transférer son contrat de travail dans le cadre de la perte d'un marché constitue un motif légitime d'absence pouvant être invoqué par le salarié dans le cadre de sa réponse à la mise en demeure de l'employeur de justifier son absence. Voici donc un motif qui s'ajoute à la liste des motifs légitimes énoncés par la loi Marché du travail...
CPH Lyon, 21 février 2025, n° 23/02471
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