Cet article a été publié il y a 10 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Deux avis de la Cour de cassation en date du 3 mars 2014 ont retenu toute notre attention.
Ils ont été rendus suite à deux demandes formulées le 22 novembre 2013 par le tribunal de commerce de Paris, reçues toutes deux le 13 décembre 2013.
La question à laquelle devait répondre la Cour de cassation, était de savoir si les éventuelles réductions FILLON calculées au titre de salaires versés à des salariés intérimaires, bénéficiaient aux seules ETT ou si elles avaient l’obligation de les reverser à l’entreprise utilisatrice.
Les demandes d’avis du tribunal de commerce de Paris
Les 2 demandes d’avis sont identiques.
Il est donc demandé à la Cour de cassation de rendre un avis, afin de savoir si le bénéfice de la réduction FILLON peut revenir :
- Indifféremment et dans le cadre de la libre négociation contractuelle à l’Entreprise Utilisatrice (EU) ou à l’Entreprise de Travail Temporaire (ETT) ;
- Nécessairement à l’Entreprise Utilisatrice (EU), conformément à la position défendue par ces dernières.
Extrait de l’avis 15003 du 3 mars 2014 de la Cour de cassation :
“Le bénéfice des allégements de charges sociales [issus des dispositions de la loi n°2003-47 du 17 janvier 2003] peut-il revenir indifféremment à I’entreprise utilisatrice (EU) ou à I’entreprise de travail temporaire (ETT) dans le cadre de la libre négociation contractuelle, position soutenue par les ETT ou doit-il nécessairement profiter aux EU, position défendue par ces dernières” ?
Extrait de l’avis 15002 du 3 mars 2014 de la Cour de cassation :
“Le bénéfice des allégements de charges sociales [issus des dispositions de la loi n°2003-47 du 17 janvier 2003] peut-il revenir indifféremment à I’entreprise utilisatrice (EU) ou à I’entreprise de travail temporaire (ETT) dans le cadre de la libre négociation contractuelle, position soutenue par les ETT ou doit-il nécessairement profiter aux EU, position défendue par ces dernières” ?
L’avis de la Cour de cassation
Sans grande surprise, les 2 avis rendus par la Cour de cassation sont en tous points identiques.
Rappel du code de la sécurité sociale
Afin de répondre aux 2 demandes formulées par le tribunal de commerce de Paris, la Cour de cassation se base sur les termes de l’article L 241-8 du code de la sécurité sociale, selon lequel la part des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, qui incombe à l’employeur, reste exclusivement à sa charge.
Article L241-8
Modifié par Loi n°88-16 du 5 janvier 1988 - art. 1 (V) JORF 6 janvier 1988
La contribution de l'employeur reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit.
L’entreprise de travail temporaire est l’employeur
En vertu de l’article L 1251-1 du code du travail, l’ETT est le seul employeur du salarié intérimaire.
Il en résulte que seule l’ETT peut prétendre au bénéfice de la réduction FILLON.
Article L1251-1
Modifié par LOI n°2009-972 du 3 août 2009 - art. 21
Le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d'un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission.
Chaque mission donne lieu à la conclusion :
1° D'un contrat de mise à disposition entre l'entreprise de travail temporaire et le client utilisateur, dit " entreprise utilisatrice " ;
2° D'un contrat de travail, dit " contrat de mission ", entre le salarié temporaire et son employeur, l'entreprise de travail temporaire.
Lorsque l'utilisateur est une personne morale de droit public, le présent chapitre s'applique, sous réserve des dispositions prévues à la section 6
Substitution de l’entreprise utilisatrice
La Cour de cassation confirme de surcroit que les dispositions des articles L 241-8 du code de la sécurité sociale et de l’article L 1251-1 du code du travail :
- Revêtent un caractère d’ordre public ;
- Et s’opposent à la substitution de l’entreprise utilisatrice à l’entreprise de travail temporaire dans le bénéfice des réductions des cotisations employeurs issues de la réduction FILLON ;
- Ainsi qu’à toute rétrocession du montant des mêmes réductions à l’entreprise utilisatrice.
Une négociation commerciale demeure possible
Enfin, la Cour de cassation précise que rien ne s’oppose, dans le cadre d’une négociation commerciale, à ce que l’entreprise de travail temporaire répercute l’allègement de charges patronales issu de la réduction FILLON sur le tarif proposé à l’entreprise utilisatrice lors de l’établissement du contrat de mise à disposition.
Extrait de l’avis 15003 du 3 mars 2014 de la Cour de cassation :
EST D’AVIS QUE :
Selon l’article L.241-8 du code de la sécurité sociale, la part des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, qui incombe à l’employeur, reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de droit. L’entreprise de travail temporaire ayant, en vertu de l’article L.1251-1 du code du travail, cette qualité à l’égard du travailleur temporaire, les dispositions sus-mentionnées, qui revêtent un caractère d’ordre public, s’opposent à la substitution de l’entreprise utilisatrice à l’entreprise de travail temporaire dans le bénéfice des réductions des cotisations employeurs prévues par les dispositions de la loi n°2003-47 du 17 janvier 2003 et à toute rétrocession du montant des mêmes réductions à l’entreprise utilisatrice.
En application du principe de la libre négociation commerciale au sens des articles L.441-6 et L441.7 du code de commerce, une entreprise de travail temporaire et une entreprise utilisatrice peuvent prendre en considération l’incidence de la réduction de cotisations sociales sur le prix des prestations convenues entre elles.
Extrait de l’avis 15002 du 3 mars 2014 de la Cour de cassation :
EST D’AVIS QUE :
Selon l’article L.241-8 du code de la sécurité sociale, la part des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, qui incombe à l’employeur, reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de droit. L’entreprise de travail temporaire ayant, en vertu de l’article L.1251-1 du code du travail, cette qualité à l’égard du travailleur temporaire, les dispositions sus-mentionnées, qui revêtent un caractère d’ordre public, s’opposent à la substitution de l’entreprise utilisatrice à l’entreprise de travail temporaire dans le bénéfice des réductions des cotisations employeurs prévues par les dispositions de la loi n°2003-47 du 17 janvier 2003 et à toute rétrocession du montant des mêmes réductions à l’entreprise utilisatrice.
En application du principe de la libre négociation commerciale au sens des articles L.441-6 et L441.7 du code de commerce, une entreprise de travail temporaire et une entreprise utilisatrice peuvent prendre en considération l’incidence de la réduction de cotisations sociales sur le prix des prestations convenues entre elles.
Références
Avis n° 15002 du 3 mars 2014 (Demande n° 13-70.008) - ECLI:FR:CCASS:2014:AV15002
Avis n° 15003 du 3 mars 2014 (Demande n° 13-70.009) - ECLI:FR:CCASS:2014:AV15003