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La rupture du contrat de travail par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur constitue une prise d'acte de la rupture du contrat. Le salarié peut saisir le juge afin qu'il statue sur les conséquences de cette rupture.
Quels sont les manquements de l’employeur pouvant justifier une prise d’acte ?
Exemples de faits imputables à l’employeur et justifiant une prise d’acte :
- Une sanction disciplinaire abusive (mise à pied disciplinaire de 30 jours) ;
- Le non-respect du droit au repos hebdomadaire ;
- Le refus de réintégrer le salarié à l'issue d'un congé sabbatique ;
- Le retard répété dans le paiement des salaires (Cass. soc., 30/05/18, n° 16-28.127) ;
- L'absence de visite de reprise après une succession d'arrêts maladie ;
- Le défaut de recherche des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte ;
- Le fait de ne pas rémunérer l'intégralité des heures de travail ou de ne rémunérer que partiellement ou pas du tout les heures supplémentaires (Cass. soc., 21/06/17, n° 17-11.227) ;
- Le non-respect de l'obligation de sécurité par l’employeur ;
- Le non-respect de l'interdiction de fumer dans l'entreprise par l’employeur même si le salarié exposé n'en a subi aucun préjudice ;
- Le manquement à l'obligation légale de réintégrer la salariée qui revient de congé maternité sur un poste similaire ;
- Le fait de laisser le salarié sans fonctions et le « mettre au placard » ;
- Le fait, dans une période de réorganisation, de laisser un salarié, malgré ses demandes, dans l’ignorance de ses futures missions (Cass. soc., 06/12/17, n° 16-22.019) ;
- Les multiples modifications du contrat de travail d’un salarié réduisant ses responsabilités hiérarchiques (Cass. soc., 18/01/18, n° 16-21.621) ;
- Le non-respect par l'employeur d'un accord GPEC (accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) ;
- La violence physique et/ou morale de l'employeur à l'égard du salarié ;
- La non-fixation des objectifs annuels du salarié alors que sa rémunération variable en dépend ;
- La réduction unilatérale du temps de travail d'un salarié par l'employeur sans maintien de rémunération ;
- La non convocation d'un salarié aux visites médicales obligatoires ;
- Les cas de harcèlement moral, même si l'auteur des faits a quitté l'entreprise au moment de la rupture ;
- Le fait pour un employeur de ne pas prendre en compte la souffrance morale et psychologique d’un salarié malgré la demande du CHSCT (Cass. soc., 07/02/18, n° 16-19.456) ;
- Le défaut de remboursement des frais professionnels sur plusieurs années ;
- Le retrait d’un véhicule de fonction, par exemple du fait de l’annonce de la candidature du salarié aux élections professionnelles (Cass. soc., 20/06/18, n° 16-25.505) ;
- Le non-paiement d’heures de délégation.
Comment le salarié peut-il prendre acte de la rupture de son contrat de travail ?
Le salarié (ou son avocat) doit notifier directement à l’employeur la prise d’acte de rupture de son contrat de travail, puis saisir ensuite le Conseil de Prud’hommes qui dispose d’un délai d’un mois pour rendre son jugement. Article L 1451-1 du Code du Travail.
Attention : La prise d'acte de rupture doit être adressée à l'employeur. Elle ne peut pas être demandée devant la juridiction prud'homale (Cass. soc., 14/09/16, n° 15-18.189). En revanche, elle peut être présentée à l’employeur par le conseiller du salarié au nom de celui-ci (Cass. soc., 29/03/17, n° 15-28.992).
Le salarié qui entend prendre acte de la rupture de son contrat n’a pas à adresser une mise en demeure préalable à son employeur ni à lui demander de régulariser la situation (Cass. soc., 03/04/19, avis n° 15003).
Le salarié ne peut prendre acte de la rupture de son contrat que s’il est embauché en CDI. La prise d’acte n’est pas applicable au CDD.
Quels sont les effets de la prise d’acte ?
Lorsque les faits invoqués par le salarié justifient la prise d’acte, celle-ci produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié n’a pas à effectuer son préavis et l’employeur doit lui remettre immédiatement ses documents de fin de contrat.
L’employeur doit alors verser au salarié :
- L’indemnité de licenciement ;
- L’indemnité de préavis ;
- L’indemnité de congés payés ;
- Des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- Eventuellement des dommages et intérêts réparant la perte de chance de bénéficier des informations relatives à la portabilité de la prévoyance.
Lorsque les faits invoqués par le salarié ne justifient pas la prise d’acte, celle-ci produit les effets d'une démission (pas d’indemnité et pas de droit au chômage). Le salarié doit également verser à l’employeur une indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc., 05/07/17, n° 15-21.959).
La date de rupture du contrat de travail est la date à laquelle le salarié a notifié à l’employeur sa décision de prendre acte de la rupture de son contrat de travail.
La prise d'acte permet donc au salarié de rompre son contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat. Mais dès lors que l’employeur régularise les manquements avant que le salarié lui notifie la prise d’acte, celle-ci produit les effets d’une démission et non pas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il en est ainsi par exemple lorsque l’employeur régularise le paiement de primes dues à un salarié avant que celui-ci ne lui notifie la prise d’acte (Cass. soc., 21/04/17, n° 15-19.353).