Cet article a été publié il y a 8 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Certaines règles bien précises sont à respecter lorsqu’une entreprise souhaite mettre en place le travail de nuit.
C’est que ce que va proposer la présente fiche pratique, tout en vous rappelant que le travail de nuit à faire l’objet d’une récente QPC, afin de savoir si le travail de nuit était ou non conforme à la constitution.
Le travail de nuit est conforme à la constitution
Saisine de la Cour de cassation
Dans une décision du 4 avril 2014, la Cour de cassation déclare conformes plusieurs articles du code du travail, qui concernent à la fois les conditions permettant de recourir au travail de nuit ainsi qu’aux procédures de mise en place.
C’est le 8 janvier 2014 que la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une QPC relative aux articles L 3122-32, L 3122-33 et L 3122-36 du code du travail.
L’affaire abordée par la Cour de cassation concernait un magasin de parfumerie, pour lequel plusieurs organisations syndicales contestaient l’ouverture durant des heures de nuit.
L’employeur avait déposé une QPC portant sur la conformité des conditions de recours au travail de nuit, soulevant le fait que, selon elle, le législateur n’avait pas défini de façon claire les critères de recours au travail de nuit
Extrait de l’arrêt :
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que dans le cadre du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2013 par la cour d'appel de Paris, la société S…demande à la Cour de transmettre les questions suivantes :
- "Les dispositions de l'article L. 3122-32 du code du travail, en ce qu'elles fixent les conditions légales de recours au travail de nuit, ne méconnaissent-elles pas le principe constitutionnel de clarté et de précision de la loi et les exigences de compétence législative et de sécurité juridique garantis par l'article 34 de la Constitution de 1958 et par les articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme, et à ce titre ne méconnaissent-elles pas les libertés d'entreprendre et du travail et le principe d'égalité devant la loi garantis par les articles 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ?" ;
- "Les dispositions de l'article L. 3122-32 du code du travail, en ce qu'elles fixent les conditions légales de recours au travail de nuit, ne méconnaissent-elles pas le principe constitutionnel de légalité des délits et des peines garanti par l'article 34 de la Constitution de 1958 et par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme ?" ;
- "Les dispositions des articles L. 3122-32, L. 3122-33 et L. 3122-36 du code du travail, prises en leur ensemble, en ce qu'elles fixent les conditions légales de recours et de mise en oeuvre du travail de nuit, ne méconnaissent-elles pas le principe constitutionnel de clarté et de précision de la loi et les exigences de compétence législative et de sécurité juridique garantis par l'article 34 de la Constitution de 1958 et par les articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme, et à ce titre ne méconnaissent-elles pas les libertés d'entreprendre et du travail et le principe d'égalité devant la loi garantis par les articles 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ?" ;
Attendu que les dispositions contestées sont applicables au litige lequel concerne les conditions de mise en oeuvre du travail de nuit ; Qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;Que les questions posées présentent un caractère sérieux ;
D'où il suit qu'il y a lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS : RENVOIE au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille quatorze.Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 8 janvier 2014 N° de pourvoi: 13-24851
La décision du Conseil constitutionnel
Dans sa décision du 4/04/2014, le Conseil constitutionnel déclare conformes les différents articles du code du travail, qui ont pour objet d’encadre les cas de recours et la mise en place du travail de nuit.
En l’occurrence, d’après le Conseil, en prévoyant que le recours au travail de nuit est exceptionnel et doit être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale, les textes ne sont manifestement pas déséquilibrés entre la liberté d’entreprendre et la protection de la santé et le repos.
Extrait de la décision n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014
18. Considérant que les dispositions législatives contestées n'instituent aucune sanction ayant le caractère de punition et ne définissent pas les éléments constitutifs d'un crime ou d'un délit ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines dirigé contre ces dispositions est inopérant ;
19. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont en tout état de cause pas entachées d'inintelligibilité, ne méconnaissent ni le droit pour chacun d'obtenir un emploi ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu'elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, Décide :
Article 1
Les articles L. 3122-32, L. 3122-33 et L. 3122-36 du code du travail sont conformes à la Constitution.
Une légitimité confortée
Par le biais de cette décision du 4/04/2014, le Conseil constitutionnel en déclarant conformes les différents articles ayant pour objet d’encadrer à la fois les cas de recours et la mise en place du travail de nuit, conforte les obligations que les employeurs se doivent de respecter.
Rappelons qu’à défaut de se conforter à ses obligations, ils peuvent s’exposer à une amende de 1.500 € (3.000 € en cas de récidive dans le délai d’un an) qui sera prononcée autant de fois qu’il y a de salariés concernés par l’infraction !
Article R3124-15
Créé par Décret n°2008-244 du 7 mars 2008 - art. (V)
Le fait de méconnaître les dispositions relatives au travail de nuit prévues par les articles L. 3122-29 à L. 3122-45, L. 3163-1 et L. 3163-2 ainsi que celles des décrets pris pour leur application, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, prononcée autant de fois qu'il y a de salariés concernés par l'infraction.
La récidive est réprimée conformément aux articles 132-11 et 132-15 du code pénal.
Article 131-13
Modifié par Loi n°2005-47 du 26 janvier 2005 - art. 9 JORF 27 janvier 2005 en vigueur le 1er avril 2005
Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros.
Le montant de l'amende est le suivant :
1° 38 euros au plus pour les contraventions de la 1re classe ;
2° 150 euros au plus pour les contraventions de la 2e classe ;
3° 450 euros au plus pour les contraventions de la 3e classe ;
4° 750 euros au plus pour les contraventions de la 4e classe ;
5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5e classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.
NOTA :
Loi n° 2005-47, article 11 : Ces dispositions entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant sa publication. Toutefois, les affaires dont le tribunal de police ou la juridiction de proximité sont régulièrement saisis à cette date demeurent de la compétence de ces juridictions.
Caractère exceptionnel
Ainsi que le signale le Code du travail (article L 3122-32) :
- Le recours au travail de nuit est exceptionnel ;
- Il doit prendre en compte les impératifs de protection de la santé mais aussi de la sécurité des salariés ;
- Le recours au travail de nuit doit être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique de l’entreprise ou des services d’utilité sociale.
Article L3122-32
Le recours au travail de nuit est exceptionnel. Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale.
La mise en place sous réserve d’une convention ou accord collectif
La mise en place, comme l’indique l’article L 3122-33 du code du travail est subordonnée à la conclusion préalable :
- D’une convention ;
- D’un accord collectif de branche étendu ;
- D’un accord d’entreprise ;
- D’un accord d’établissement.
Article L3122-33
La mise en place dans une entreprise ou un établissement du travail de nuit au sens de l'article L. 3122-31 ou son extension à de nouvelles catégories de salariés sont subordonnées à la conclusion préalable d'une convention ou d'un accord collectif de branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement.
Cette convention ou cet accord collectif comporte les justifications du recours au travail de nuit mentionnées à l'article L. 3122-32.
Il est important de signaler aussi que la consultation de la médecine du travail est obligatoire lors de la mise en place (art L 3122-38 du code du travail).
Article L3122-38
Le médecin du travail est consulté avant toute décision importante relative à la mise en place ou à la modification de l'organisation du travail de nuit.
Les conditions d'application de cette consultation sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.
Une mise en place à défaut de convention ou d’accord collectif sous forme dérogatoire
Le code du travail permet de déroger aux conditions édictées par l’article L. 3122-33, à défaut de convention ou d'accord collectif de travail et à condition que l'employeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations tendant à la conclusion d'un tel accord.
L'engagement de négociations loyales et sérieuses implique pour l'employeur d'avoir :
- Convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions ;
- Communiqué les informations nécessaires leur permettant de négocier en toute connaissance de cause ;
- Répondu aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
Le code du travail précise en outre que les travailleurs pourront ainsi être affectées à des postes de nuit sous réserve d’une autorisation de l'inspecteur du travail accordée après vérifications des contreparties prévues à l’article L. 3122-39 (repos compensateurs et le cas échéant compensation salariale) ainsi que de l'existence de temps de pause.
Article L3122-36
Par dérogation aux dispositions de l'article L. 3122-33, à défaut de convention ou d'accord collectif de travail et à condition que l'employeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations tendant à la conclusion d'un tel accord, les travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit sur autorisation de l'inspecteur du travail accordée notamment après vérification des contreparties qui leur seront accordées au titre de l'obligation définie à l'article L. 3122-39, de l'existence de temps de pause et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.
L'engagement de négociations loyales et sérieuses implique pour l'employeur d'avoir :
1° Convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions ;
2° Communiqué les informations nécessaires leur permettant de négocier en toute connaissance de cause ;
3° Répondu aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
Article L3122-39
Les travailleurs de nuit bénéficient de contreparties au titre des périodes de nuit pendant lesquelles ils sont employés sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale.