Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé verbalement en qualité d'animateur-chanteur à compter du 7 avril 2012.
Contestant la rupture de la relation de travail par l'employeur intervenue le 14 novembre 2013, le salarié saisit la juridiction prud'homale afin d’obtenir la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps complet.
En cours de procédure, l’employeur est mis en liquidation judiciaire.
La cour d'appel de Caen, par arrêt du 23 mars 2018, déboute le salarié de sa demande.
Elle indique que :
- L’absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
- S’agissant de la durée de travail, les pièces versées par le salarié ne permettent pas de vérifier la régularité des prestations assurées ;
- Que plus encore, le calendrier dressé par l'employeur corroboré par des affiches de spectacle contredit celui établi par le salarié, qu'il démontre que l'intéressé ne se produit pas exclusivement et de manière permanente dans l'établissement.
Extrait de l’arrêt :
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes de requalification de son contrat de travail en un contrat à temps plein et de rappel de salaire à ce titre, et limiter à certaines sommes l'indemnité de licenciement et les dommages-intérêts pour licenciement abusif, l'arrêt, après avoir rappelé que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, retient que s'agissant de la durée de travail, le mandataire liquidateur fait valoir, à raison, que les pièces versées par le salarié ne permettent pas de vérifier la régularité des prestations assurées au "[...]", que les jours (mercredi, vendredi ou samedi) ou types de soirées (karaoké , show, cocktails, dance floor avec DJ) cités dans les annonces en ligne sont tous aussi aléatoires, que de même les attestations de clients qu'il produit se rapportent toutes à la même soirée du 28 juin 2013, que plus encore, le calendrier dressé par l'employeur corroboré par des affiches de spectacle contredit celui établi par le salarié, qu'il démontre que l'intéressé ne se produit pas exclusivement et de manière permanente dans l'établissement de M. J..., que le fait d'avoir écarté toutes tâches annexes aux prestations d'artistes conduit à écarter le décompte établi par le salarié sur la base d'un temps plein et la demande subséquente d'heures supplémentaires ;
Mais la Cour de cassation n’est pas sensible à ces arguments, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, rappelant à cette occasion :
- Un contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
- Il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet;
- Il incombe alors à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.
Extrait de l’arrêt :
Qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant constaté que le contrat de travail à temps partiel ne répondait pas aux exigences de l'article L. 3123-14 du code du travail, la cour d'appel, qui ne pouvait écarter la présomption de travail à temps complet qui en résultait sans constater que l'employeur faisait la preuve de la durée de travail exacte, mensuelle ou hebdomadaire, convenue, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la créance de M. B... au passif de la liquidation judiciaire de M. J... aux sommes de 9 180 euros au titre du rappel de salaire sur la base d'un temps partiel outre 918 euros de congés payés afférents, 775 euros au titre du rappel d'indemnité de préavis outre 77, 50 euros de congés payés afférents, 591,51 euros au titre du rappel d'indemnité de licenciement, et 1 000 euros de dommages-intérêts au titre de la rupture abusive du contrat de travail, l'arrêt rendu le 23 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen
Commentaire de LégiSocial
Engager verbalement un salarié sous contrat à temps partiel est un grand risque pour l’employeur, l’affaire présente le rappelle, de voir ce contrat requalifié à temps plein.
Rappelons à cette occasion les termes de l’article L 3123-6 du code du travail.
Cet article confirme que le contrat est un contrat écrit.
Concernant le contenu du contrat, l’article L 3123-6 confirme que le contrat mentionne les points suivants :
- La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3124-44 (référence à l’organisation du temps de travail sur une durée supérieure à la semaine), la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
- Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;
- Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;
- Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.
- L'avenant au contrat de travail prévu à l'article L. 3123-22 (dispositif complément d’heures) mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d'heures peuvent être accomplis au-delà de la durée fixée par le contrat.
Article L3123-6
Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)
Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.
Il mentionne :
1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif conclu en application de l'article L. 3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;
2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;
3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;
4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au delà de la durée de travail fixée par le contrat.
L'avenant au contrat de travail prévu à l'article L. 3123-22 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d'heures peuvent être accomplis au delà de la durée fixée par le contrat.