Faute de prouver que le licenciement n’était pas lié à sa grossesse, la réintégration de la salariée doit être ordonnée

Jurisprudence
Paie Licenciement

N’étant pas prouvée que l'impossibilité de maintenir le contrat de travail n’était pas lié à l’état de la grossesse de la salariée, il s’en déduisait que le licenciement était illicite et que la réintégration de la salariée devait être ordonnée.

Publié le
Télécharger en PDF

Contexte de l'affaire

Une salariée est engagée le 1er février 2016 en qualité d'assistante maternelle, par un particulier employeur.

Après avoir convoqué, le 28 mars 2018, la salariée à un entretien préalable au licenciement, cette dernière est licenciée, le 16 avril suivant, pour motif économique.

Mais la salariée saisit la formation de référé de la juridiction prud'homale de demandes tendant à l'annulation du retrait du 16 mars 2018 et du licenciement du 16 avril 2018 ainsi qu'à sa réintégration. 

Par décision du 16 janvier 2019, la cour d'appel de Reims donne raison à la salariée.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel et rejette le pourvoi formé par l’employeur, indiquant à cette occasion que : 

  • Ayant été relevé que l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement n'était pas établie du seul fait du congé de maternité de l'employeur ;
  • Il s’en déduisait que le licenciement était constitutif d'un trouble manifestement illicite et que la réintégration de la salariée devait être ordonnée. 

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour (…)
9. Ensuite, la cour d'appel, qui a relevé, hors toute dénaturation de la lettre de licenciement du 16 avril 2018, que l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement n'était pas établie du seul fait du congé de maternité de l'employeur, en a exactement déduit, sans être tenue de faire une recherche qui ne lui était pas demandée, que le licenciement était constitutif d'un trouble manifestement illicite et que la réintégration de la salariée devait être ordonnée.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation du , pourvoi n°19-13918

Commentaire de LégiSocial

La salariée enceinte bénéficie d’un régime de protection très particulier vis-à-vis du licenciement.

Voici quelques informations à ce sujet, extraites de notre fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique, à retrouver sur notre site : 

La protection « relative » de la salariée enceinte

La définition

Pendant une période que l’on nomme « protection relative », la rupture du contrat de travail par l’employeur ne peut pas avoir lieu sauf pour les cas suivants :

  • Faute grave ou lourde non liée à l’état de grossesse de la salariée ;
  • Impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse (en cas de licenciement économique par exemple)

Une période de protection de 10 semaines

La loi travail apporte plusieurs modifications importantes, comme suit :

  • La période de protection relative est portée de 4 à 10 semaines (suivant expiration congé maternité) ;
  • Le début de cette période de protection relative est repoussé en cas de prise des congés payés immédiatement après le congé de maternité. 

Article L1225-4

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 10

Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes.

Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.

Protection « absolue » de la salariée enceinte

Interdiction formelle du licenciement

En vertu de l’article L 1225-4 du Code du travail, le licenciement ne peut prendre être signifié ni prendre effet pendant la période du congé de maternité donc pendant la période dite « protection absolue ».

Cela concerne tous les licenciements, y compris ceux prononcés pour :

  • Faute grave ou lourde non liée à l’état de grossesse de la salariée ;
  • Impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse (en cas de licenciement économique par exemple)

Article L1225-4

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 10

Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes.

Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.

La protection « absolue » : précisions sur les périodes concernées

Même s’il est fondé sur une faute grave ou sur l’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif non lié à la maternité, le licenciement ne peut en aucun cas être notifié ni prendre effet pendant les périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre du congé de maternité, c'est-à-dire pendant :

  • 16 semaines (congé simple) ;
  • Ou 26 semaines (lorsque l’assurée ou le ménage assume déjà la charge d’au moins 2 enfants ou l’assurée a déjà mis au monde au moins 2 enfants nés viables) ;
  • Ou 34 semaines (en cas de grossesse gémellaire) ;
  • Ou 46 semaines (en cas de grossesse concernant des triplés ou plus).

L’employeur peut engager la procédure de licenciement mais il pourra uniquement :

  • Convoquer la salariée enceinte à un entretien préalable ;
  • La notification du licenciement (envoi de la lettre recommandée) et la rupture du contrat de travail ne devront pas intervenir pendant le congé de maternité (c'est-à-dire pendant la suspension du contrat de travail).

Nouveauté de la loi travail : les congés payés pris immédiatement après le congé de maternité bénéficient de la période de protection absolue (au même titre que le congé de maternité, hors semaines pathologique postnatal).