Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 25 novembre 2005, en qualité de technicien avitaillement, et occupe en dernier lieu les fonctions de chauffeur poids lourd, coefficient 195 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959.
Après avoir été convoqué à un entretien préalable et mis à pied à titre conservatoire, par lettre du 2 octobre 2014, il s'est vu proposer, le 22 octobre 2014, une rétrogradation dans un poste d'employé d'exploitation, de qualification et de rémunération inférieure, qu'il a refusée le 29 octobre 2014.
L'employeur l'a de nouveau convoqué le 5 novembre 2014 à un entretien préalable fixé au 17 novembre 2014, puis lui a notifié son licenciement pour faute grave le 25 novembre 2014.
Le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette rupture et obtenir paiement de diverses sommes à ce titre.
Par arrêt du 12 juin 2019, la cour d'appel de Paris, donne raison en considérant le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation ne partage pas ce point de vue, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée, estimant dans l’affaire présente que :
- Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié ;
- L’employeur qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail ;
- Peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1331-1 du code du travail :
5. Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l'employeur qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée.
6. Pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt, après avoir rappelé que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, retient que dès lors que l'employeur a dans un premier temps, à la suite des faits reprochés, proposé à l'intéressé un changement de poste, il a considéré, ce faisant, que le maintien du salarié dans l'entreprise n'était pas impossible et ne pouvait, en conséquence, invoquer la faute grave au regard de la définition rappelée. Il en conclut que, faute pour la société d'avoir respecté la garantie de fond prévue par la convention collective, qui s'applique en cas de licenciement disciplinaire pour faute à l'exclusion du licenciement pour faute grave ou lourde, le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.
7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
De nombreux arrêts de la Cour de cassation ont été prononcés concernant la « modification du contrat de travail », nous vous rappelons quelques-uns, pour lesquels une publication a été réalisée sur notre site.
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Même prévue conventionnellement, toute modification du contrat nécessite l’accord du salarié | Cour de cassation du 14/09/2016, pourvoi n° 15-21794 |
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Le seul refus d’une modification du contrat de travail ne justifie pas le licenciement | Cour de cassation du 11/07/2018, pourvoi n° 17-12747 |
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Une modification unilatérale du contrat de travail justifie sa résiliation judiciaire | Cour de cassation du 06/02/2019, pourvoi n° 17-26562 |
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