Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée en qualité d'analyste des contrôles internes à compter du 3 mai 2010.
Elle est en congé maternité du 1er juin 2011 au 2 janvier 2012, puis licenciée pour motif économique le 12 février 2013.
Contestant son licenciement, la salariée saisit la juridiction prud'homale, estimant son licenciement motivé par son état de grossesse.
Par arrêt du 18 juin 2019, la cour d'appel de Paris donne raison à la salariée, estimant toutefois que doivent être déduits les revenus de remplacement perçus par la salariée, des rémunérations dues au titre de la période entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration.
Mais la Cour de cassation ne partage pas cet avis, estimant que les revenus de remplacement ne doivent pas être déduits présentement, présentant l’argument suivant :
- Tout licenciement prononcé à l'égard d'une salariée en raison de son état de grossesse est nul;
- Dès lors qu'un tel licenciement caractérise une atteinte au principe d'égalité de droits entre l'homme et la femme, garanti par l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;
- La salariée qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont elle a pu bénéficier pendant cette période.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail :
- Selon les articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, tout licenciement prononcé à l'égard d'une salariée en raison de son état de grossesse est nul.
- Dès lors qu'un tel licenciement caractérise une atteinte au principe d'égalité de droits entre l'homme et la femme, garanti par l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la salariée qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont elle a pu bénéficier pendant cette période.
- Après avoir prononcé la nullité du licenciement pour discrimination liée à l'état de grossesse, au sexe et à la situation de famille de la salariée, l'arrêt ordonne que soit déduit du rappel de salaires dû entre la date du licenciement et la date effective de réintégration de la salariée dans l'entreprise, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement.
- En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne solidairement les sociétés (…) à payer à Mme T... les sommes de 375 879,60 euros à titre de rappel de salaires du 13 mai 2013 jusqu'au jour de sa réintégration dans l'entreprise, ou à tout le moins au jour de l'audience du 7 mai 2019, et de 37 787,96 euros au titre des congés payés afférents, sauf à déduire les revenus d'activité ou de remplacement perçus par la salariée pendant cette période qui devra en justifier, l'arrêt rendu le 18 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
Ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation se pose la question sur la déduction (ou non) des revenus de remplacement perçus par un salarié durant sa période d’éviction en cas de nullité du licenciement.
Rappelons quelques arrêts précédents à ce sujet, qui ont fait l’objet d’une publication sur notre site…
Thématiques | Références |
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Licenciement nul : sont à déduire les salaires et revenus de remplacement perçus dans la période d’éviction Dans cette affaire, avait été prononcé un licenciement durant la période de protection dont bénéficie un salarié durant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail… | Cour de cassation du 16/10/2019, pourvoi n° 17-31624 |
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