Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 17 mars 2003 en qualité de dessinateur projeteur.
Il fait l'objet d'un avertissement le 17 février 2014.
Le 31 mars 2014, il saisit le conseil de prud'hommes de demandes tendant notamment à l'annulation de cette sanction. Convoqué le 18 avril 2014 à un entretien préalable et mis à pied à titre conservatoire, il est licencié, le 26 mai 2014, pour une cause qualifiée par l'employeur de réelle et sérieuse.
Mais le salarié saisit la juridiction prud’homale considérant que son licenciement doit être considéré comme nul, car motivé par une action en justice à l’encontre de son employeur.
La cour d'appel de Douai, par arrêt du 27 septembre 2019, donne raison au salarié.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, confirmant au passage que :
- Est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur ;
- Le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
- Il résulte de l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur.
- Le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.
- C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel, après avoir prononcé la nullité du licenciement pour atteinte au droit d'agir en justice et ordonné la réintégration du salarié dans l'entreprise, a condamné l'employeur à lui payer une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.
- Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Commentaire de LégiSocial
La présente affaire aborde le cas d’un licenciement nul, extrait de notre fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique.
Lire aussi : Quelles sont les conséquences d'un licenciement nul en 2024 ? Fiche pratique
Suite à une action prud’homale, un licenciement est parfois considéré « nul ». La présente fiche pratique vous éclaire à la fois sur les cas de nullités ainsi que sur les conséquences.
Les cas de nullité
Il existe de nombreux cas pour lesquels le juge peut prononcer la nullité du licenciement :
- Licenciement pour victimes de harcèlement, de discrimination ou personnes ayant relaté ou témoigné de tels agissements (articles L 1132-1 à L 1132-4, L 1152-2 et L 1152-3, L 1153-2 à L 1153-4 du Code du travail) ;
- Violation du principe d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L 1144-3 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance du droit de grève (articles L 1132-2 et L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pendant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie professionnelle (sauf faute grave sans rapport avec l’arrêt de travail) (articles L 1226-13, L 1226-9 et L 1226-18 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des représentants du personnel, représentants syndicaux (articles L 1132-1 à L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des femmes enceintes (articles L 1225-4 et L 1225-5 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pour des opinions religieuses, syndicales, situation de famille (articles L 1132-1 à L 1132-4, du Code du travail).
Rappelons que la prise d’acte de rupture du contrat de travail par un salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul.
Signalons également que la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur, notamment pour des faits de harcèlement moral produit alors les effets d’un licenciement nul.
Cour de cassation du 20/02/2013 pourvoi 11-26560