Contexte de l'affaire
Dans cette affaire, une société a conclu avec une institution de prévoyance un contrat de mutuelle santé et prévoyance au profit de ses salariés.
Par jugement du 3 novembre 2015, un tribunal de grande instance a arrêté un plan de cession de l'une des activités de la société et a autorisé le licenciement pour motif économique de 38 salariés.
Par jugement du 16 février 2016, la liquidation judiciaire a été prononcée et a désigné M.X en qualité de mandataire liquidateur.
L'institution de prévoyance a résilié le contrat de prévoyance avec effets au 29 février 2016 et a formulé une proposition de « prolongation onéreuse du contrat » à compter du 1er mars 2016.
Le liquidateur lui a adressé à ce titre, le 18 mars suivant, une somme de 35.120,18 euros afin de maintenir, pour un an, les garanties précédemment souscrites pour les salariés licenciés.
Le liquidateur es qualités a assigné l'institution de prévoyance en remboursement de la somme ainsi versée, selon lui indûment, et en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive.
La cour d'appel de Colmar, par arrêt du 08 juillet 2020, déboute le liquidateur de sa demande.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, les juges indiquant à cette occasion que :
En application de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale, créé par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi :
- Il est permis aux salariés garantis collectivement dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du même code contre les risques décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité ;
- De bénéficier du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par l'assurance chômage, selon les conditions qu'il détermine.
- Ces dispositions d'ordre public sont applicables aux anciens salariés licenciés d'un employeur placé en liquidation judiciaire;
- Toutefois, le maintien des droits implique que le contrat ou l'adhésion liant l'employeur à l'organisme assureur ne soit pas résilié.
Dans l’affaire présente :
- L'arrêt relève que l'institution de prévoyance a résilié le contrat le 29 février 2016, soit dans le délai de 3 mois prévu par l'article L. 932-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la cause ;
- Et qu'à compter de la prise d'effet de cette résiliation prévue par la loi, les garanties ouvertes ont pris fin pour n'être plus en vigueur dans l'entreprise.
- Il ajoute que le liquidateur a toutefois librement choisi d'assurer le maintien des couvertures mutuelle et prévoyance dont bénéficiaient les anciens salariés de la société licenciés fin 2015
- De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que le paiement volontairement opéré par le liquidateur, en ce qu'il portait sur des cotisations dues au-delà du 29 février 2016, ne pouvait être assimilé à un paiement indu.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
- L'article L. 911-8 du code de la sécurité sociale, créé par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, permet aux salariés garantis collectivement dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du même code contre les risques décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, de bénéficier du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par l'assurance chômage, selon les conditions qu'il détermine.
- Ces dispositions d'ordre public sont applicables aux anciens salariés licenciés d'un employeur placé en liquidation judiciaire qui remplissent les conditions fixées par ce texte.
- Toutefois, le maintien des droits implique que le contrat ou l'adhésion liant l'employeur à l'organisme assureur ne soit pas résilié.
- L'arrêt relève que l'institution de prévoyance a résilié le contrat le 29 février 2016, soit dans le délai de trois mois prévu par l'article L. 932-10 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la cause, et qu'à compter de la prise d'effet de cette résiliation prévue par la loi, les garanties ouvertes ont pris fin pour n'être plus en vigueur dans l'entreprise. Il ajoute que le liquidateur a toutefois librement choisi d'assurer le maintien des couvertures mutuelle et prévoyance dont bénéficiaient les anciens salariés de la société licenciés fin 2015.
- De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que le paiement volontairement opéré par le liquidateur, en ce qu'il portait sur des cotisations dues au-delà du 29 février 2016, ne pouvait être assimilé à un paiement indu.
- Le moyen, inopérant en sa première branche qui s'attaque à des motifs surabondants, n'est, dès lors, pas fondé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Commentaire de LégiSocial
La présente affaire est pour nous l’occasion de rappeler quelques notions concernant la portabilité de la prévoyance, en cas de rupture du contrat de travail.
Principe général
La portabilité de la prévoyance permet à un salarié de bénéficier, après la rupture de son contrat de travail, de continuer à bénéficier du régime de prévoyance dont il bénéficiait lors de sa présence dans l’entreprise.
2 régimes des prévoyances
Régime frais de santé
Garanties liées aux risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liées à la maternité.
En d’autres termes, le régime frais de santé permet de compléter, en tout ou partie, les frais exposés, au profit des salariés, leur conjoint et leurs enfants, les prestations servies par le régime de la sécurité sociale dont ils relèvent.
Sont ainsi concernés :
- Les visites chez le médecin traitant ou spécialiste ;
- Les actes médicaux (examens sanguins, radiographies, etc.) ;
- Les médicaments ;
- Les dépassements d’honoraires en matière de chirurgie ;
- Les frais d’hospitalisation, de chambre particulière ;
- Les frais d’optique ;
- Les frais dentaires ;
- Etc.
Régime prévoyance « risques lourds »
Sont concernées les autres garanties de prévoyance.
Sont ainsi visées les garanties liées au risque décès ou aux risques d'incapacité de travail ou d'invalidité
Les 3 conditions cumulatives à respecter
Afin de pouvoir bénéficier du régime de la portabilité, le salarié doit répondre à 3 conditions cumulatives :
- Qu’il bénéficiait, lorsqu'il était salarié, de la couverture santé et prévoyance ;
- Que la rupture de son contrat de travail soit comprise dans les cas autorisés ;
- Qu’il perçoive des allocations chômage pendant la période de portabilité.
Article L911-8
Créé par LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 - art. 1 (V)
Les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l'article L. 911-1, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d'assurance chômage, selon les conditions suivantes :
1° Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d'indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail ou, le cas échéant, des derniers contrats de travail lorsqu'ils sont consécutifs chez le même employeur. Cette durée est appréciée en mois, le cas échéant arrondie au nombre supérieur, sans pouvoir excéder douze mois ;
2° Le bénéfice du maintien des garanties est subordonné à la condition que les droits à remboursements complémentaires aient été ouverts chez le dernier employeur ;
3° Les garanties maintenues au bénéfice de l'ancien salarié sont celles en vigueur dans l'entreprise ;
4° Le maintien des garanties ne peut conduire l'ancien salarié à percevoir des indemnités d'un montant supérieur à celui des allocations chômage qu'il aurait perçues au titre de la même période ;
5° L'ancien salarié justifie auprès de son organisme assureur, à l'ouverture et au cours de la période de maintien des garanties, des conditions prévues au présent article ;
6° L'employeur signale le maintien de ces garanties dans le certificat de travail et informe l'organisme assureur de la cessation du contrat de travail mentionnée au premier alinéa.
Le présent article est applicable dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui bénéficient effectivement des garanties mentionnées au premier alinéa à la date de la cessation du contrat de travail.
NOTA :
LOI n° 2013-504 du 14 juin 2013 art. 1 X : L'article L. 911-8 du code de la sécurité sociale entre en vigueur :
1° Au titre des garanties liées aux risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, à compter du 1er juin 2014 ;
2° Au titre des garanties liées au risque décès ou aux risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, à compter du 1er juin 2015.
Les informations qui vous sont ici communiquées sont extraites de notre fiche pratique consacrée à cette thématique, avec beaucoup plus de détails…
Elle est consultable au lien suivant :
Lire aussi : La portabilité en cas de licenciement du salarié en 2024 Fiche pratique
En cas de licenciement, sauf faute lourde, le salarié ouvre droit à la portabilité de la prévoyance. La présente fiche pratique vous présente le dispositif en détails, selon les dispositions en vigueur en 2024.