Contexte de l'affaire
Une salariée est engagée le 29 août 2006, en qualité de lingère.
La salariée est licenciée le 31 juillet 2013.
Elle saisit la juridiction prud'homale, le 5 décembre 2013, afin de contester le bien-fondé de son licenciement et d'obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
Elle indique en effet que son employeur avait modifié son contrat de travail, la contraignant à passer d’un horaire discontinu à un horaire continu.
La cour d'appel de Montpellier, par arrêt du 17 avril 2019, déboute la salariée de sa demande, considérant que son licenciement est licite.
L’argument de la cour d’appel repose sur les aspects suivants :
Dans l’affaire présente :
- La salariée travaillait du lundi au vendredi de 9 heures 30 à 11 heures 30 et de 12 heures 30 à 17 heures 30 ;
- Que le 31 mai 2013, l'employeur l'a informée qu'à compter du 17 juin 2013 et suite à une réorganisation des taches (linge, entretiens des locaux) les horaires de travail avaient changé pour les deux postes, qu'ils étaient répartis désormais sur deux horaires et par roulement pour les deux agents : horaire 1: 6 heures 00 à14 heures 00, horaire 2 : 11 heures 00 à 18 heures 00 ;
- Il s’en déduisait que ce changement horaire pouvait intervenir sans l'accord exprès de la salariée, ce dernier n'entraînant aucun bouleversement de l'économie du contrat ;
- Et que le refus persistant du nouvel horaire constituait une cause réelle et sérieuse du licenciement.
Mais la Cour de cassation ne partage pas du tout l’avis de la cour d’appel.
Elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Nîmes.
A cette occasion, les juges confirment que :
- Le passage d'un horaire discontinu à un horaire continu ou d'un horaire fixe à un horaire variant chaque semaine selon un cycle ;
- Entraîne une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
- Selon ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
- Le passage d'un horaire discontinu à un horaire continu ou d'un horaire fixe à un horaire variant chaque semaine selon un cycle entraîne une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser.
- Pour confirmer que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse et la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt constate, par motifs propres et adoptés, que la salariée travaillait du lundi au vendredi de 9 heures 30 à 11 heures 30 et de 12 heures 30 à 17 heures 30. Il retient que le 31 mai 2013, l'employeur l'a informée qu'à compter du 17 juin 2013 et suite à une réorganisation des taches (linge, entretiens des locaux) les horaires de travail avaient changé pour les deux postes, qu'ils étaient répartis désormais sur deux horaires et par roulement pour les deux agents : horaire 1: 6 heures 00 à14 heures 00, horaire 2 : 11 heures 00 à 18 heures 00. Il en déduit que ce changement horaire pouvait intervenir sans l'accord exprès de la salariée, ce dernier n'entraînant aucun bouleversement de l'économie du contrat et que le refus persistant du nouvel horaire constituait une cause réelle et sérieuse du licenciement.
- En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur avait imposé à la salariée le passage d'un horaire fixe discontinu à un horaire continu variant chaque semaine suivant un cycle de deux semaines, ce dont elle aurait dû déduire l'existence d'une modification du contrat de travail que la salariée était en droit de refuser, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le licenciement de Mme (…) pour cause réelle et sérieuse, déboute cette dernière de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamne aux dépens d'appel et à payer à la société (…) la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Commentaire de LégiSocial
Plusieurs fois la Cour de cassation s’est penchée sur un licenciement faisant suite à la modification du contrat de travail, voici un rappel de quelques arrêts abordés sur notre site sur cette thématique…
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