Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé par un cabinet d’expertise comptable à compter du 19 janvier 1994, en qualité de comptable puis d'assistant comptable.
Le 15 novembre 2007, le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de paiement de certaines sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
L'employeur notifie au salarié son licenciement pour faute lourde le 6 décembre 2007.
Le salarié saisit la juridiction prud’homale aux fins de contester la rupture de son contrat de travail.
Par arrêt du 7 juillet 2020, la cour d'appel de Nîmes considère que le licenciement du salarié doit être considérée comme fondé sur une faute grave et non lourde.
La preuve de l’intention de nuire à son employeur n’étant pas apportée.
Mais l’employeur décide de se pourvoir en cassation.
La Cour de cassation n’est pas sensible aux arguments de la cour d’appel, elle considère que les faits reprochés au salarié permettent de justifier son licenciement pour faute lourde, rappelant à cette occasion qu’il était constaté que :
- Le salarié avait détourné la clientèle de son employeur ;
- En sorte que l'intention de nuire était caractérisée ;
- Justifiant le licenciement pour faute lourde du salarié.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la CourVu l'article L. 233-14 du code du travail dans sa rédaction antérieure au 1er mai 2008 :
- La faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.
- Pour dire que le licenciement du salarié repose sur une faute grave et non sur une faute lourde, l'arrêt retient, d'une part, que le salarié, qui a remis au soutien de sa candidature à un emploi de collaborateur comptable une liste de seize clients de son employeur en prétendant qu'il s'agissait de sa propre clientèle, a eu l'intention claire et non équivoque de s'approprier la clientèle de la société (…) , que d'autre part, il a cessé d'utiliser un poste informatique relié au réseau de l'entreprise pour traiter les prestations des clients du bureau de [Localité 4] en sorte que l'employeur ne possédait plus aucune écriture comptable depuis près d'un an et se trouvait dans l'impossibilité d'établir les bilans et comptes de résultats et qu'enfin, le salarié ne justifie pas avoir transmis la liste des dossiers concernés par l'absence de facturation des prestations en matière sociale qui lui était impérativement réclamée. Il ajoute que ces faits sont constitutifs d'une faute grave mais non d'une faute lourde, la preuve de l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise n'étant pas rapportée.
- En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait détourné la clientèle de son employeur, en sorte que l'intention de nuire était caractérisée, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement repose sur une faute grave et non sur une faute lourde et en ce qu'il déboute la société Conseil comptabilité gestion des entreprises de sa demande en paiement de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 7 juillet 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Commentaire de LégiSocial
Même si le licenciement pour faute lourde se produit moins souvent que le licenciement pour faute grave, ou pour une cause réelle et sérieuse, voici un rappel de quelques arrêts abordés sur notre site…
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