Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé à compter du 1er décembre 2008 en qualité de conseiller commercial par une société ayant pour activité le transfert d'argent liquide de personne à personne par l'envoi de mandats.
Le 23 octobre 2012, le salarié saisit la juridiction prud'homale pour obtenir notamment la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur en raison de la violation de ses obligations contractuelles et d'un harcèlement moral managérial.
Par lettre du 30 octobre 2012, il est convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé le 9 novembre auquel il ne s'est pas présenté.
Par lettre du 22 novembre 2012, il conteste qui lui avait été notifié le 16 novembre 2012, en reprochant à l'employeur un harcèlement moral.
Par lettre du 28 novembre 2012, le salarié est à nouveau convoqué à un entretien préalable fixé au 17 décembre 2012 et se voit notifier une mise à pied à titre conservatoire par lettre séparée.
Il est finalement licencié pour faute grave le 3 janvier 2013.
Par arrêt du 18 octobre 2019, la cour d'appel de Lyon, donne raison au salarié et prononçant à ce titre la nullité du licenciement.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel sur ce point.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 :
8. Il résulte de l'alinéa premier du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur.
9. Le salarié qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.
10. La cour d'appel, après avoir prononcé la nullité du licenciement pour atteinte au droit d'agir en justice, a ordonné que soient déduites du rappel de salaires dû entre la date du licenciement et celle de la réintégration effective, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement sur cette période.
11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société (…) à payer à M. [H] à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel, avec intérêts légaux à compter du présent arrêt, une somme égale à autant de fois 1 576,77 euros qu'il y aura de mois dans la période allant du 28 novembre 2012 au jour effectif de sa réintégration dans l'entreprise sous déduction toutefois du montant total des sommes perçues de Pôle emploi au titre de ce licenciement, dont M. [H] devra justifier, l'arrêt rendu le 18 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble
Commentaire de LégiSocial
Plusieurs cas peuvent conduire à considérer le licenciement nul.
Voici un extrait de notre fiche pratique exclusivement consacré à cette thématique.
Lire aussi : Quelles sont les conséquences d'un licenciement nul en 2024 ? Fiche pratique
Suite à une action prud’homale, un licenciement est parfois considéré « nul ». La présente fiche pratique vous éclaire à la fois sur les cas de nullités ainsi que sur les conséquences.
Les cas de nullité
Il existe de nombreux cas pour lesquels le juge peut prononcer la nullité du licenciement :
- Licenciement pour victimes de harcèlement, de discrimination ou personnes ayant relaté ou témoigné de tels agissements (articles L 1132-1 à L 1132-4, L 1152-2 et L 1152-3, L 1153-2 à L 1153-4 du Code du travail) ;
- Violation du principe d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L 1144-3 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance du droit de grève (articles L 1132-2 et L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pendant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou maladie professionnelle (sauf faute grave sans rapport avec l’arrêt de travail) (articles L 1226-13, L 1226-9 et L 1226-18 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des représentants du personnel, représentants syndicaux (articles L 1132-1 à L 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé en méconnaissance de la protection des femmes enceintes (articles L 1225-4 et L 1225-5 du Code du travail) ;
- Licenciement prononcé pour des opinions religieuses, syndicales, situation de famille (articles L 1132-1 à L 1132-4, du Code du travail).
Rappelons que la prise d’acte de rupture du contrat de travail par un salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul.
Signalons également que la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur, notamment pour des faits de harcèlement moral produit alors les effets d’un licenciement nul.
Cour de cassation du 20/02/2013 pourvoi 11-26560