Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé, le 14 mai 2012, en qualité de chef de projet.
Le salarié saisit, le 23 mars 2015, la juridiction prud'homale afin d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de son employeur ainsi que la condamnation de ce dernier à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et la rupture du contrat de travail.
Le préjudice porte une convention de forfait en jours, que le salarié considère sans effet et de l’ouverture du droit à la COR (Contrepartie Obligatoire en Repos) au titre des heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel.
Le salarié est finalement licencié le 24 avril 2015.
Par arrêt du 11 septembre 2019, la cour d'appel de Paris, tout en indiquant que la convention de forfait en jours signée par le salarié était sans effet et condamné l'employeur à payer au salarié des heures supplémentaires non rémunérées, « retient que faute de décompte probant, cette demande sera rejetée ».
La Cour de cassation n’est pas sensible aux arguments de la cour d’appel dont elle casse et annule l’arrêt, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Paris, autrement composée.
Dans son argumentaire, la Cour de cassation indique que :
Une (COR) Contrepartie Obligatoire en Repos) est due au salarié pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
Ne saurait être débouté par une cour d’appel, un salarié :
- De sa demande au titre des repos compensateurs non pris ;
- Après avoir dit que la convention de forfait en jourssignée par le salarié était sans effet et condamné l’employeur à payer au salarié des heures supplémentaires non rémunérées en retenant l’absence de décompte probant ;
- Alors qu’il appartenait à la cour d’appel de rechercher, en tenant compte des heures supplémentaires non rémunérées effectuées par le salarié qu’elle avait précédemment retenues, s’il n’avait pas accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1332-4 du code du travail :
- Aux termes de ce texte, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
- Pour débouter le salarié de sa demande au titre de l'annulation de l'avertissement, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la lettre d'avertissement expose plusieurs reproches, au total huit, ce qui est un nombre significatif. Il énonce que les faits ne sont pas datés et qu'il est possible que certains soient prescrits, mais que la charge de la preuve reposant sur les deux parties, il apparaît que, dans aucun des deux dossiers, il n'est possible de trouver les éléments pour conclure sur ce point.
- En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que les faits fautifs invoqués à l'encontre du salarié n'étaient pas datés et que l'employeur n'établissait pas qu'il en avait eu connaissance moins de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires à l'encontre du salarié, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
Rejette le pourvoi principal ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [W] de sa demande de dommages-intérêts pour repos compensateur non pris et de celle au titre de l'annulation de l'avertissement du 17 décembre 2014, l'arrêt rendu le 11 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Commentaire de LégiSocial
La COR (Contrepartie Obligatoire en Repos) est une notion parfois méconnue des gestionnaires de paie, rappelons quelques principes généraux à ce sujet.
Les informations qui vous ici transmises constituent un extrait de notre fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique.
Lire aussi : Le régime de la COR en 2024 Fiche pratique
Le traitement des heures supplémentaires nécessite la maîtrise du dispositif de la COR (Contrepartie Obligatoire sous forme de Repos), que la présente fiche pratique vous présente en détails selon les dispositions de la loi PACTE.
COR = dépassement du contingent
Au sein de l’article L 3121-30 modifié (cet article avait été abrogé par la loi LDSTT de 2008), nous sont confirmés les points suivants :
- Les heures effectuées au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires ouvrent doit à une COR ;
- Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d’heures supplémentaires sont celles qui sont accomplies au-delà de la durée légale ;
- Ne s’imputent pas sur le contingent les heures ouvrant droit au RCE ainsi que celles accomplies dans le cadre de travaux urgents.
Article L3121-30
Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 8 (V)
Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.
Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale.
Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L. 3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L. 3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.
Détermination de la COR
Dans le cadre des « dispositions supplétives », l’article L 3121-38 modifié confirme que le calcul de la COR, en l’absence d’accord collectif est fixé à :
- 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel, pour les entreprises de 20 salariés au plus ;
- 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de 20 salariés.
Nota :
Dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2020, l’article L 3121-33 du code du travail rappelle que le seuil d’effectif précité sera déterminé comme suit :
« L'effectif salarié et le franchissement du seuil de vingt salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale ».
Article L3121-38
Modifié par LOI n°2019-486 du 22 mai 2019 - art. 11 (V)
A défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.
Pour l'application du premier alinéa du présent article, l'effectif salarié et le franchissement du seuil de vingt salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.
Conformément au XIV de l’article 11 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, les dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2020.
Article L3121-33
Modifié par LOI n°2019-486 du 22 mai 2019 - art. 11 (V)
I.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche :
1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 % ;
2° Définit le contingent annuel prévu à l'article L. 3121-30 ;
3° Fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. Cette contrepartie obligatoire ne peut être inférieure à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné audit article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés. L'effectif salarié et le franchissement du seuil de vingt salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.
Les heures supplémentaires sont accomplies, dans la limite du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après information du comité social et économique.
Les heures supplémentaires sont accomplies, au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après avis du comité social et économique.
II.-Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut également :
1° Prévoir qu'une contrepartie sous forme de repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent ;
2° Prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations, par un repos compensateur équivalent.
III.-Une convention ou un accord d'entreprise peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement.
NOTA :
Conformément au XIV de l’article 11 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, les dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2020.