Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé pour 5 mois en qualité d'employé, suivant contrat à durée déterminée saisonnier du 23 avril 2018.
Suite à une altercation survenue le 21 mai 2018 l'ayant opposé au dirigeant de la société, le salarié a été placé en arrêt de travail jusqu'au terme de son contrat.
Le 8 juin 2018, il saisit la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur et le paiement de diverses indemnités.
Par arrêt du 10 septembre 2020, la cour d'appel de Poitiers donne raison au salarié, fixant toutefois la date de la rupture au jour où l’employeur avait manqué gravement à ses obligations ayant porté une atteinte physique ou morale à son salarié et que cette faute grave rendait impossible le maintien de la relation contractuelle.
Tout en confirmant la résiliation judiciaire du contrat de travail, la Cour de cassation n’approuve pas l’arrêt de la cour d’appel, qu’elle casse et annule, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Bordeaux.
A cette occasion, la Cour de cassation confirme qu’en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail :
- La date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date et que le salarié est toujours au service de l'employeur.
Extrait de l’arrêt :
Sur le premier moyenEnoncé du moyen
- L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée à ses torts exclusifs et ce à la date du 21 mai 2018, alors « qu'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n'a pas été rompu à cette date et que le salarié est toujours au service de l'employeur ; qu'en l'espèce, il est constant que le salarié a demandé la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que la cour d'appel qui a décidé que la date de la rupture anticipée du contrat de travail était celle du 21 mai 2018, date des faits invoqués à l'appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat, sans constater que le contrat avait été rompu par le salarié ou l'employeur et que le salarié n'était plus à la disposition de l'employeur, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles L. 1243-1, L. 1243-3 et L. 1243-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1224 et 1227 du code civil :
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Il résulte de ces textes, qu'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date et que le salarié est toujours au service de l'employeur.
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Pour prononcer à la date du 21 mai 2018 la rupture anticipée du contrat à durée déterminée aux torts exclusifs de l'employeur, l'arrêt, par motifs adoptés, constate que le salarié démontre qu'il a subi une atteinte physique de la part de son employeur et qu'un certificat médical, un compte-rendu de passage aux urgences et un arrêt de travail, tous datés du 21 mai 2018 viennent le confirmer. Il retient que commet un manquement grave à ses obligations l'employeur qui porte une atteinte physique ou morale à son salarié et que cette faute grave rend impossible le maintien de la relation contractuelle.
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En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Commentaire de LégiSocial
Profitons de l’affaire présente pour mettre en avant un point que les gestionnaires ne peuvent ignorer, à savoir les différences entre :
- Une résiliation judiciaire ;
- Et une prise d’acte.
Les informations qui vous ici transmises constituent un extrait de notre fiche pratique publiée sur notre site concernant cette thématique.
Lire aussi : Ne pas confondre la prise d'acte avec la résiliation judiciaire en 2024 Fiche pratique
Afin de mettre fin aux relations contractuelles qui le lie à son employeur, le salarié dispose de 2 modes de rupture : la prise d’acte et la résiliation judiciaire. Distinguez rapidement ces 2 dispositifs à l’aide de notre fiche pratique.
Définition de la résiliation judiciaire
La demande de résiliation judiciaire du contrat par le salarié, consiste à demander au conseil de prud’hommes de prononcer la rupture du contrat de travail.
Cela implique que le contrat de travail continue de produire ses effets tant que le juge ne s’est pas prononcé.
Le salarié poursuit son activité et l’employeur verse toujours la rémunération à son salarié.
Seul le salarié est habilité à demander la résiliation judiciaire du contrat de travail à durée indéterminée (CDI).
La prise d’acte ne peut pas être assimilée à une résiliation judiciaire
C’est ce que la Cour de cassation a confirmé dans un de ces arrêts.
Extrait de l’arrêt :
Mais attendu, d'une part, qu'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail formée par un salarié ne peut être assimilée à une prise d'acte de la rupture ; que le salarié s'étant désisté de sa demande de résiliation, la cour d'appel a, à bon droit, statué sur le licenciement prononcé ultérieurement ; (…)
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;Cour de cassation du 21/03/2007 pourvoi 05-45392
Demande de résiliation judiciaire suivie d’une prise d’acte
Si un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat puis prend acte de la rupture de son contrat de travail avant que les juges ne se soient prononcés, la demande de résiliation judiciaire devient sans objet.
Cour de cassation du 31/10/2006 pourvoi 04-46280