Contexte de l'affaire
Un salarié, engagé le 31 août 2000, prend acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur le 10 juin 2011, et saisit le 8 août 2011, la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et la rupture de la relation de travail.
A la date de la prise d’acte, il était constaté l’absence de paiement du salaire, cette absence étant par ailleurs imputable à l’employeur.
Par arrêt du 27 octobre 2020, la cour d'appel de Colmar donne raison au salarié.
La Cour de cassation confirme en tous points l’arrêt de la cour d’appel, rejetant à cette occasion le pourvoi formé par l’employeur.
Elle indique à cette occasion qu’il était constaté :
- Qu’à la date de la prise d'acte de la rupture, le 10 juin 2011 ;
- Le salaire du mois de mai 2011 n'était pas payé et que ce manquement était imputable à l'employeur ;
- Il s’en déduisait que la prise d’acte produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
- La cour d'appel, qui a constaté qu'à la date de la prise d'acte de la rupture, le 10 juin 2011, le salaire du mois de mai 2011 n'était pas payé et que ce manquement était imputable à l'employeur, a pu en déduire qu'il avait empêché la poursuite du contrat de travail.
- Le moyen n'est donc pas fondé.
(…)
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
La prise d’acte qui repose sur des griefs fondés a de nombreuses et lourdes conséquences financières pour l’entreprise.
Les informations qui vous ici transmises constituent un extrait de notre fiche pratique publiée sur notre site concernant cette thématique.
Lire aussi : Quelles conséquences financières si la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle en 2024 ? Fiche pratique
Une prise d’acte fondée sur des griefs fondés produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Notre fiche pratique vous présente ces conséquences lourdes en détail, selon les dispositions en vigueur en 2024.
Versement indemnité licenciement
Lorsque la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié doit alors obtenir le paiement de l’indemnité de licenciement.
Nota : l’ancienneté prise en compte est celle constatée à la prise d’acte.
Cour de cassation du 28/09/2011 Pourvoi n° 09-67510
Indemnité compensatrice de préavis
La prise d’acte a pour effet de rompre le contrat de travail immédiatement, privant ainsi le salarié du bénéfice d’une période de préavis.
L’employeur se trouve donc dans l’obligation de verser une indemnité compensatrice correspondant au préavis dont aurait bénéficié le salarié en cas de licenciement.
ICCP s/indemnité compensatrice de préavis
Conséquence directe, l’entreprise se trouve également redevable d’une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à la période de préavis non effectuée, généralement cette indemnité est chiffrée selon la méthode du « 1/10ème ».
Exemple :
- Indemnité compensatrice de préavis équivaut à 3.000 € ;
- L’indemnité compensatrice de congés payés sera évaluée à 300€ (3.000 €* 1/10ème).
Cour de cassation du 20/01/2010 pourvoi 08-43471
Nota : l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents sont dus, y compris lorsque le salarié a été malade pendant cette période.
Cour de cassation du 20/01/2010 pourvoi 08-43476
Remboursement des allocations chômage
2 régimes
Concernant l’éventuel remboursement des allocations chômage auquel peut être condamné l’employeur, 2 régimes sont alors envisageables comme suit :
- Le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté et/ou se situe dans une entreprise de moins de 11 salariés ;
- Le salarié justifie d’une ancienneté d’au moins 2 ans et l’entreprise compte 11 salariés et plus.
Précision concernant l’ancienneté
L’ancienneté du salarié s’apprécie à la date d’envoi de la lettre de licenciement.
Cour de cassation du 26/09/2006, pourvoi 05-43841
Précision concernant l’effectif de l’entreprise
Concernant l’effectif de l’entreprise, c’est bien l’effectif « habituel » qu’il faut retenir et non celui en vigueur au moment où se produit le licenciement.
Cour de cassation du 27/05/1992, pourvoi 89-42593
Situation 1 : le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté et/ou se situe dans une entreprise de moins de 11 salariés
- Dans ce cas le remboursement des allocations chômage n’est pas envisageable.
Situation 2 : le salarié justifie d’une ancienneté d’au moins 2 ans et l’entreprise compte 11 salariés et plus.
- Circonstance aggravante, l’employeur peut être condamné à rembourser tout ou partie des allocations chômage versées au salarié depuis le licenciement jusqu’au jugement, dans la limite de 6 mois.
Les indemnités prud’homales
Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, JO du 23 septembre 2017
Un barème obligatoire
Avant d’aborder en détails le barème des indemnités prud’homales, il est bon de préciser que ledit barème s’impose aux juges (si l’employeur ou le salarié refuse la réintégration) en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Précisons que ce barème s’applique également en cas de :
- Résiliation judiciaire du contrat de travail ;
- Prise d’acte pour des griefs reconnus fondés.
Règle de cumul
Cette indemnité reste cumulable avec les réparations allouées en cas :
- D’irrégularité de la procédure de licenciement (articles L. 1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15 du code du travail);
- De non-respect de la priorité de réembauche.
Mais, dans la limite des montants maximaux prévus par le barème.
Dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et abusif
La prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié n’exclut pas un comportement fautif de l’employeur à l’occasion de la rupture.
Le salarié peut ainsi obtenir le paiement de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire et abusif.
Cour de cassation du 16/03/2010 pourvoi: 08-44094 08-45013
Clause de dédit-formation
Compte tenu du fait que la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’employeur n’est pas en droit de considérer que le salarié démissionne.
Il ne peut donc pas demander l’application de la clause de dédit-formation, afin d’obtenir le remboursement des frais de formation engagés.
Cour de cassation du 11/01/2012 pourvoi: 10-15481