Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 7 février 2008, en qualité de directeur des relations sociales.
Le contrat de travail prévoyait le paiement d'une prime sur objectifs individuels pouvant atteindre 10 % de la rémunération annuelle.
Le 1er septembre 2017, le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail.
Par la suite, il réclame le paiement d’une indemnité dite d’objectifs contractuellement prévue.
Par arrêt du 14 décembre 2020, la cour d'appel de Limoges déboute le salarié de sa demande, estimant présentement que « sur le principe, le droit au paiement prorata temporis d'une indemnité dite d'objectifs d'un membre du personnel ayant quitté l'entreprise, quel qu'en soit le motif, avant la date de son versement, ne peut résulter que d'une convention ou d'un usage dont il appartient au salarié de rapporter la preuve, et qu'en l'occurrence, le salarié ne rapporte pas cette preuve.»
Mais la Cour de cassation n’approuve pas du tout l’arrêt de la cour d’appel, qu’elle casse et annule, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Poitiers.
- Si l'ouverture du droit à un élément de rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance ;
- Le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
- Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
- Il en résulte que si l'ouverture du droit à un élément de rémunération afférent à une période travaillée peut être soumise à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement.
- Pour dire que le salarié ne peut prétendre au paiement d'une partie de la prime d'objectifs contractuellement prévus pour l'année 2017, l'arrêt retient que, sur le principe, le droit au paiement prorata temporis d'une indemnité dite d'objectifs d'un membre du personnel ayant quitté l'entreprise, quel qu'en soit le motif, avant la date de son versement, ne peut résulter que d'une convention ou d'un usage dont il appartient au salarié de rapporter la preuve, et qu'en l'occurrence, le salarié ne rapporte pas cette preuve.
- En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la prime constituait une partie variable de la rémunération du salarié versée en contrepartie de son activité, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite à 17 675,90 euros bruts, avec intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2017, la somme que la société (…) est condamnée à payer à M. [Z] au titre du rappel de salaire correspondant à la prime contractuelle sur objectifs, l'arrêt rendu le 14 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Commentaire de LégiSocial
Le sujet des primes, qui entraînent de nombreux contentieux en entreprise, est régulièrement abordé par la Cour de cassation, notamment sur les questions suivantes :
- Le droit est-il ouvert en cas de départ en cours d’année ?
- Le droit au paiement condition à une présence « physique » du salarié ;
- Les conséquences d’une prime annuelle sur le calcul des IJSS ;
- Ou bien encore le remplacement, par une prime, du paiement d’heures supplémentaires…
Des arrêts ont été commentés sur notre site, en voici un rappel…
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