Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 3 mars 2008 en qualité de référent formation.
Il est placé en arrêt de travail pour maladie du 17 janvier au 11 juin 2017, puis à compter du 9 octobre 2017.
Le 4 décembre 2017, le médecin du travail a émis l'avis suivant :
- « inapte - étude de poste et étude des conditions de travail réalisées le 15/11/2017 échange avec l'employeur - l'état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi».
Le 26 décembre 2017, le salarié est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Dans un premier temps, la cour d’appel d'Amiens, par arrêt du 14 avril 2021, donne raison au salarié considérant présentement que le licenciement doit être considéré « sans cause réelle et sérieuse », l’employeur n’ayant pas satisfait à son obligation de reclassement, faute d’avoir consulté les délégués du personnel, « peu important que le médecin du travail ait dispensé l'employeur de toute recherche de reclassement ».
Tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, rappelant à cette occasion que :
En cas d’inaptitude :
- Lorsque le médecin du travail mentionne expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ;
- L’employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les délégués du personnel.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1 du code du travail dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :
- Il résulte du premier de ces textes que lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, et que cette proposition doit prendre en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise.
- Selon le second, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
- Il s'ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les délégués du personnel.
- Pour dire le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il résulte de la combinaison des articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1 du code du travail que la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l'employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse, peu important que le médecin du travail ait dispensé l'employeur de toute recherche de reclassement.
- En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avis du médecin du travail mentionnait que l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi, la cour d'appel a violé les textes sus-visés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes au titre du harcèlement moral et de la nullité du licenciement, l'arrêt rendu le 14 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.
Commentaire de LégiSocial
L’obligation de reclassement, suite à un avis d’inaptitude d’un salarié prononcé par la médecine du travail, est une des thématiques très souvent abordées par la Cour de cassation.
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