En cas de rupture de contrat : le CET non encore utilisé ouvre droit à une indemnité compensatrice

Jurisprudence
Paie CET (Compte Épargne Temps)

En cas de rupture de contrat, le salarié peut monétiser ses droits acquis d’un CET (Compte Épargne Temps) afin de financer des congés, si le contrat est rompu avant d’avoir bénéficier de ces congés, il ouvre droit à une indemnité compensatrice.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé le 16 décembre 2013, en qualité de directeur informatique.

A la suite du licenciement du salarié le 27 avril 2016, les parties signent un protocole transactionnel le 9 mai 2016.
Le salarié saisit la juridiction prud'homale aux fins d'homologation de la transaction. 

Dans la présente affaire, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Paris, du 27 janvier 2021, rappelant les dispositions légales encadrant le CET comme suit : 

Vu les articles L. 3153-2 et L. 3141-28 du code du travail :

  • Selon le premier de ces textes, le salarié peut percevoir, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l'ensemble des droits acquis au titre de son CET (compte épargne-temps) ;
  • Selon le second de ces textes, lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L. 3141-24 et L. 3141-27. 

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3153-2 et L. 3141-28 du code du travail :

  1. Selon le premier de ces textes, le salarié peut percevoir, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l'ensemble des droits acquis au titre de son compte épargne-temps.
  2. Selon le second de ces textes, lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L. 3141-24 et L. 3141-27.
  3. Pour limiter à la somme de 12 313,28 euros la condamnation de l'employeur au titre du compte épargne-temps, l'arrêt retient que le solde de tout compte produit au débat prévoit des indemnités compensatrices de congés payés à hauteur de 2 007,23 euros, 8 363,46 euros et 1 942,59 euros, soit un total de 12 313,28 euros, dont l'employeur ne prouve pas le paiement.
  4. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Cour de cassation du , pourvoi n°21-14126

Commentaire de LégiSocial

Profitons de l’affaire présente pour rappeler quelques principes concernant l’alimentation d’un CET (Compte Épargne Temps)

Notions générales du CET

Mise en place

Afin que les salariés puissent avoir l’usage d’un CET, il est toutefois nécessaire que ce dernier soit mis en place au sein de l’entreprise.

Selon l’article L 3151-1 du code du travail, cette mise en place peut être effectué :

  • Par accord d’entreprise ;
  • Par accord d’établissement ou de groupe ;
  • Ou à défaut, par une convention ou accord de branche. 

Article L3151-1

Version en vigueur depuis le 10 août 2016

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 11

Le compte épargne-temps peut être mis en place par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.

Gestion du CET

L’accord précité est très important, car c’est lui qui fixera les modalités de fonctionnement comme :

  • La façon dont le salarié pourra alimenter le CET ;
  • Les éventuels abondements de l’employeur ;
  • La possibilité pour le salarié d’utiliser le CET ;
  • L’affectation possible de droits épargnés sur un compte d’épargne (comme un PERCO par exemple).

Alimentation du CET : principes généraux

Règles fixées par l’accord collectif

C’est l’accord collectif, que nous avons évoqué plus haut, qui doit fixer les modalités permettant l’alimentation du CET (que ce soit par le salarié ou par l’employeur via un « abondement »).

Article L3152-1

Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 11

La convention ou l'accord collectif détermine dans quelles conditions et limites le compte épargne-temps peut être alimenté en temps ou en argent à l'initiative du salarié ou, pour les heures accomplies au-delà de la durée collective, à l'initiative de l'employeur.

Absences de dispositions légales

Nous remarquerons que le code du travail est « muet » concernant les modalités d’alimentation du CET, laissant ainsi le champ libre aux accords collectifs pour encadrer ces dispositions.

Circulaire DGT de 2008

Toutefois la circulaire de la DGT du 13 novembre 2008 apporte quelques exemples concrets d’alimentation du CET, permettant ainsi aux signataires d’un accord collectif permettant la mise en place du dispositif d’avoir une meilleure idée des moyens dont ils disposent (voir pages 42 et suivantes du document).

Circulaire DGT n° 2008/20 du 13 novembre 2008 relative à la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail 

Alimentation du CET par le salarié

Afin de permettre à nos lecteurs de mieux discerner les différentes possibilités d’alimentation d’un CET, nous vous proposons le tableau qui suit, qui dresse les dispositions actuellement en vigueur en 2022. 

Alimentation du CET par le salarié

Catégories

Liste

Alimentation « en temps »

Le salarié peut alimenter son CET en jours de congés ou de repos, dans les conditions prévues par l’accord collectif, des éléments suivants (liste non exhaustive) : 

  • Temps de repos acquis dans le cadre d’un dispositif de RCE (global ou partiel) ;
  • Temps de repos au titre de la COR ;
  • Temps de repos acquis dans le cadre d’une organisation du temps de travail sur une durée supérieure à la semaine (comme des jours de RTT par exemple) ;
  • Jours de repos obtenus dans le cadre d’une convention de forfait annuel en jours ;
  • Des heures de travail réalisées au-delà de la durée prévue, dans le cadre d’une convention de forfait en heures (que cette convention soit établie de façon hebdomadaire, mensuelle ou annuelle) ;
  • Jours de congés payés légaux (seuls sont concernés les jours acquis au-delà du congé principal, soit 24 jours ouvrables ou 20 jours ouvrés) ;
  • Jours de congés payés supplémentaires (comme des jours attribués au titre du fractionnement, ou des jours de congés payés conventionnels attribués par exemple en fonction de l’ancienneté du salarié).

Nota :

Sont en revanche exclus de la possibilité d’être « épargnés » sur un CET, les temps de repos suivants (liste non exhaustive) :

  • Temps de repos quotidien ;
  • Temps de repos hebdomadaire ;
  • Des éventuelles contreparties octroyées au titre d’un travail de nuit. 

En d’autres termes, nous pourrions dire que le salarié n’est pas en droit d’alimenter en temps des temps de repos « légalement prévus pour des raisons de protection de la santé et de la sécurité du salarié ».

Alimentation « en argent »

Sous réserve des dispositions contenues dans l’accord collectif, ayant permis la mise en place du CET, le salarié a la possibilité d’affecter les sommes suivantes sur le CET :

  • Les majorations de salaires liées à la réalisation d’heures supplémentaires ;
  • Les majorations de salaire obtenues au titre des heures complémentaires ;
  • Des primes ou indemnités conventionnelles ;
  • Des augmentations de salaire ;
  • Des primes d’intéressement ;
  • Tout ou partie des sommes issues de la participation aux résultats de l’entreprise ;
  • Des avoirs issus d’un plan d’épargne entreprise.