Contexte de l'affaire
La présente affaire (qui contient de « nombreux épisodes) concerne :
- Un travailleur handicapé, admis le 2 septembre 2014 à un ESAT, à la suite d'une décision d'orientation de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) constituée au sein de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ;
- Un contrat de soutien et d'aide par le travail a été signé le 22 septembre 2014 avec une association, par l'intermédiaire de son établissement secondaire l'ESAT ;
- Le 9 avril 2018, le médecin du travail déclare le travail handicapé inapte à son poste, avec dispense d'obligation de recherche de reclassement ;
- Le 17 avril 2018, l'ESAT a sollicité de la MDPH la sortie du travailleur des effectifs de l'ESAT ;
- Le 14 juin 2018, la CDAPH a décidé la sortie du travailleur handicapé des effectifs de l'ESAT ;
- Sur recours gracieux du travailleur, la CDAPH l'a orienté au sein de l'ESAT ;
- Mais le 12 octobre 2018, l'ESAT a informé le travailleur de son refus de le réintégrer ;
- Par la suite, le 7 mars 2019, la CDAPH a renouvelé l'orientation du travailleur handicapé, avec un "accord en ESAT ou au sein de tout autre établissement de même agrément" pour la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2024 ;
- Par lettre du 21 mars 2019, l'ESAT a informé le travailleur concerné qu'elle refusait son admission au sein de son établissement ;
- Finalement, le travailleur fait assigner l'association devant le président du tribunal de grande instance, statuant en référé, aux fins de solliciter la condamnation de celle-ci à le réintégrer dans ses effectifs de manière rétroactive et à lui verser sa rémunération depuis le 15 juin 2018.
La cour d’appel de Nîmes, par arrêt du 2 novembre 2020, donne raison au travailleur handicapé.
Mais l’association décide de se pourvoir en cassation.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, rejetant à cette occasion le pourvoi formé par l’association, et indiquant à ce titre que :
- Selon l'article R. 344-8 du code de l'action sociale et des familles, les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) sont soumis aux règles de la médecine du travail telles que prévues aux articles L. 241-2 et suivants du code du travail, devenus L. 4622-2, L. 4622-3 et L. 4622-4, relatifs aux missions et organisations de la médecine du travail et insérés dans le livre sixième de la quatrième partie du code du travail, intitulé "institutions et organismes de prévention".
- Aux termes de l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles, les personnes reconnues travailleurs handicapés et orientées par la CDAPH vers un établissement ou service d'aide par le travail sont usagers de ces établissements et ne sont pas liés à ceux-ci par un contrat de travail ;
- Il en résulte que ces établissements ne peuvent rompre le contrat en application des articles L. 1226-2 et suivants du code du travail, relatifs à une inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel.
En outre :
- La cour d'appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que la décision du 7 mars 2019 ne constituait pas une nouvelle orientation mais l'un des renouvellements périodiques de la décision d'orientation initiale conformément au II de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles ;
- Et qu'en raison de cette décision, l'orientation et le contrat de soutien et d'aide par le travail étaient réputés n'avoir jamais fait l'objet d'interruption ou de suspension depuis le 2 septembre 2014, en a exactement déduit que cette décision s'imposait à l'ESAT
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
- Il résulte de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016, que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) est compétente pour désigner les établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1 concourant à l'accueil de l'adulte handicapé, que cette désignation s'impose à tout établissement ou service dans la limite de sa spécialité au titre de laquelle il a été autorisé, que lorsque l'évolution de son état ou de sa situation le justifie, l'adulte handicapé ou l'établissement ou le service peuvent demander la révision de la décision d'orientation prise par la commission et que l'établissement ou le service ne peut mettre fin, de sa propre initiative, à l'accompagnement sans décision préalable de la commission.
- Selon l'article R. 344-8 du code de l'action sociale et des familles, les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) sont soumis aux règles de la médecine du travail telles que prévues aux articles L. 241-2 et suivants du code du travail, devenus L. 4622-2, L. 4622-3 et L. 4622-4, relatifs aux missions et organisations de la médecine du travail et insérés dans le livre sixième de la quatrième partie du code du travail, intitulé "institutions et organismes de prévention".
- Aux termes de l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles, les personnes reconnues travailleurs handicapés et orientées par la CDAPH vers un établissement ou service d'aide par le travail sont usagers de ces établissements et ne sont pas liés à ceux-ci par un contrat de travail.
- Il en résulte que ces établissements ne peuvent rompre le contrat en application des articles L. 1226-2 et suivants du code du travail.
- D'abord, la cour d'appel, qui a relevé, par motifs propres et adoptés, que l'ESAT [3] n'avait pas le pouvoir de rompre le contrat de M. [C], une telle décision appartenant exclusivement à la CDAPH et que l'article R. 344-8 du code du travail ne renvoie ni aux dispositions du titre III du livre II de la première partie du code du travail, qui fixent les règles relatives à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, ni à celles du chapitre III du titre IV du même code, qui concernent la rupture anticipée du contrat à durée déterminée, en a exactement déduit que le comportement de l'ESAT [3], en ce qu'il constitue une violation des règles contractuelles liant les parties et des dispositions du code de l'action sociale et des familles, constituaient un trouble manifestement illicite impliquant la réintégration de l'intéressé dans les effectifs de l'ESAT et que l'obligation de l'association de verser les arriérés de rémunération due depuis le 15 juin 2018 n'était pas sérieusement contestable.
- Ensuite, la cour d'appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que la décision du 7 mars 2019 ne constituait pas une nouvelle orientation mais l'un des renouvellements périodiques de la décision d'orientation initiale conformément au II de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles et qu'en raison de cette décision, l'orientation et le contrat de soutien et d'aide par le travail étaient réputés n'avoir jamais fait l'objet d'interruption ou de suspension depuis le 2 septembre 2014, en a exactement déduit que cette décision s'imposait à l'ESAT [3].
- Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Commentaire de LégiSocial
Un précédent arrêt de la Cour de cassation avait déjà confirmé que les personnes reconnues travailleurs handicapés et qui travaillent dans un ESAT ne sont pas des salariés.
Dans cette affaire, il avait été confirmé que :
- Les personnes handicapées ne sont pas liées avec le CAT (ou ESAT désormais) par un contrat de travail ;
- Aucun licenciement ne peut donc avoir lieu.
Cour de cassation du 6 février 2013, pourvoi n° 11-14424
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