Licenciement pour inaptitude : l’indemnité préavis n’a pas valeur d’indemnité compensatrice de préavis

Jurisprudence
Paie Indemnité de licenciement

En cas de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle, l’indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et n'ouvre pas droit à congés payés.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité de commercial en 1989, puis par une autre société à compter du 1er septembre 2002, avec reprise d'ancienneté.

Il exerce en dernier lieu les fonctions de directeur général.

Le 26 avril 2016, le salarié est déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise à raison d'un danger immédiat.

Licencié pour inaptitude le 13 juin 2016, le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes relatives à la rupture de son contrat de travail, réclamant notamment un rappel de congés payés au titre de l’indemnité « préavis » versée lors de la rupture de son contrat de travail. 

La cour d'appel de Grenoble, par arrêt du 27 avril 2021, de façon assez surprenante pour nous, donne raison au salarié, ordonnant un rappel de congés payés au titre de l’indemnité compensatrice de préavis. 

Beaucoup moins surprenant est l’arrêt de la Cour de cassation, qui casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les parties devant la cour d'appel de Grenoble. 

Elle rappelle à cette occasion que :

  • En cas de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle;
  • L'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et n'ouvre pas droit à congés payés

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1226-14 du code du travail :

  1. Selon ce texte, l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et n'ouvre pas droit à congés payés.
  2. La cour d'appel a alloué au salarié une somme correspondant à l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail et une somme au titre des congés payés afférents.
  3. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Cour de cassation du , pourvoi n°21-19501

Commentaire de LégiSocial

C’est une notion assez fondamentale que la Cour de cassation aborde dans la présente affaire, et qui nous permet de faire un rappel des dispositions légales comme suit, en cas de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, vis-à-vis de la période de préavis :

Préavis non effectué compte tenu de l’incapacité du salarié

Compte tenu de l’inaptitude du salarié et de l’impossibilité de reclassement (ou de refus) aucun préavis n’est à effectuer par le salarié.

Inaptitude résultant d’une maladie professionnelle ou consécutive à un accident du travail 

Dans ce cas précis, le salarié ne doit pas effectuer de préavis. 

Il doit percevoir néanmoins :

  • Une indemnité d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis (article L 1226-14) ;
  • Cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité compensatrice de préavis (Cour de cassation du 15/06/1999 arrêt 97-15328) ;
  • De ce fait, le salarié n’est pas en droit de demander le paiement de l’indemnité compensatrice de préavis prévue par la Convention collective ;
  • L’indemnité versée n’étant pas une indemnité compensatrice de préavis légale (même si la valeur est identique), la date de rupture du contrat de travail n’est pas repoussée ;
  • L’indemnité de licenciement sera donc calculée sur l’ancienneté acquise à la notification ;
  • L’indemnité d’une valeur égale à l’indemnité compensatrice de préavis sera calculée sur la base des 3 derniers mois de salaire (article L 1226-16 du Code du travail) ;
  • Le montant de cette indemnité ne doit pas être pris en compte dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés.

Nota :

Les 3 seuls cas pour lesquels le salarié pourrait bénéficier d’une indemnité compensatrice de préavis (et pas d’une indemnité dont le montant est égal au montant de l’indemnité légale de préavis) sont : 

  1. L’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement ;
  2. L’employeur n’a pas repris le paiement du salaire alors que le délai d’un mois est écoulé ;
  3. Le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Inaptitude après une maladie ou un accident non professionnel 

Ainsi, lorsqu’un salarié fait l’objet d’un licenciement pour une inaptitude qui n’a pas d’origine professionnelle, le Code du travail indique que :

  • Le préavis n’est pas exécuté ;
  • Le contrat de travail est donc rompu à la notification du licenciement ;
  • Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l’indemnité ;
  • Aucune indemnité compensatrice de préavis n’est versée.

Article L1226-4

Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 47

Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail.

En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9. Par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.