Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé à compter du 1er juillet 2002, en qualité de voyageur-représentant-placier (VRP) négociateur immobilier.
Par lettre du 21 septembre 2016, le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Le 2 décembre 2016, il saisit la juridiction prud'homale d'une action tendant à faire requalifier cette prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et à obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Par arrêt du 14 octobre 2020, la cour d'appel d’Amiens, déboute le salarié de sa demande, retenant :
- D’abord, qu'il est fait reproche à l'employeur par le salarié des manquements suivants : non-paiement de l'intégralité de ses droits au titre des salaires et des remboursements de frais depuis octobre 2014, modification unilatérale du mode de rémunération, non-paiement de l'intégralité de ses droits au titre des commissions, sanction disciplinaire non justifiée et attitude injurieuse à son égard ;
- Et qu'aucun de ces griefs n'est établi ou n'est suffisamment grave pour empêcher la continuité de la relation de travail. Il en déduit que la prise d'acte de la rupture du contrat, qui n'est pas justifiée, produit les effets d'une démission et qu'il en résulte que le salarié doit à l'employeur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis résultant de l'application de l'article L. 1237-1 du code du travail.
Le salarié décide de saisir la Cour de cassation.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, renvoyant les parties devant cour d'appel de Douai, indiquant à cette occasion que :
Une cour d’appel ne peut considérer que la prise d’acte par le salarié produit les effets d’une démission :
- Sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenaient que constituait un manquement grave, la résistance opposée par l'employeur, avant l'instance, à la communication des éléments permettant de calculer les commissions qui lui étaient dues.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
- Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
- Pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient d'abord qu'il est fait reproche à l'employeur par le salarié des manquements suivants : non-paiement de l'intégralité de ses droits au titre des salaires et des remboursements de frais depuis octobre 2014, modification unilatérale du mode de rémunération, non-paiement de l'intégralité de ses droits au titre des commissions, sanction disciplinaire non justifiée et attitude injurieuse à son égard.
- L'arrêt retient ensuite qu'aucun de ces griefs n'est établi ou n'est suffisamment grave pour empêcher la continuité de la relation de travail. Il en déduit que la prise d'acte de la rupture du contrat, qui n'est pas justifiée, produit les effets d'une démission et qu'il en résulte que le salarié doit à l'employeur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis résultant de l'application de l'article L. 1237-1 du code du travail.
- En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenaient que constituait un manquement grave, la résistance opposée par l'employeur, avant l'instance, à la communication des éléments permettant de calculer les commissions qui lui étaient dues, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [U] de sa demande tendant à faire juger que la rupture de son contrat de travail est imputable à l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il le déboute de ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, d'une indemnité légale de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et d'une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, et en ce qu'il le condamne à payer à la société (…) les sommes de 3 900 euros à titre d'indemnité de préavis et de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 14 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Commentaire de LégiSocial
La Cour de cassation aborde dans la présente affaire le cas d’une prise d’acte produisant les effets d’une démission.
Faisons quelques rappels à ce sujet…
Les informations ci-après communiquées sont extraites de notre fiche pratique consacrée exclusivement à cette thématique :
Lire aussi : Quelles conséquences si la prise d'acte produit les effets d'une démission en 2024 ? Fiche pratique
Il peut arriver que la prise d’acte repose sur des griefs considérés comme « non-fondés », elle produit alors les effets d’une démission, avec des conséquences que la présente fiche pratique aborde en détails.
Les principes généraux
Dans ce cas, les griefs invoqués par le salarié n’ont pas été reconnus comme pouvant justifier la prise d’acte.
Sommes non dues
Ne sont donc pas dues les sommes suivantes :
- Indemnité de licenciement ;
- Indemnité compensatrice de préavis et congés afférents ;
- Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul.
Sommes dues par le salarié
A contrario, le salarié peut être redevable du paiement de l’indemnité compensatrice de préavis, la prise d’acte rompt le contrat de travail immédiatement, le salarié n’a donc pas effectué de préavis.
Cour de cassation du 4/02/2009, pourvoi 07-44142
Cour de cassation du 8/06/2011, pourvoi 09-43208