La Cour de cassation rappelle les règles concernant la modification du contrat de travail d’un salarié protégé

Jurisprudence
Paie Contrat de travail

Aucune modification de son contrat de travail ou changement des conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé, l'acceptation par un salarié protégé ne peut résulter ni de l'absence de protestation, ni de la poursuite de son travail.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité d'agent qualifié propreté.

Le contrat prévoyait un salaire mensuel auquel s'ajoutait une prime mensuelle de forfait vitrerie. Le salarié est titulaire d'un mandat de délégué du personnel.

Le 10 mars 2009, le médecin du travail a déclaré que le salarié était apte à ses fonctions de laveur de vitres mais seulement pour une hauteur maximale de trois mètres.

L'employeur a reclassé le salarié sur un poste d'ouvrier nettoyeur et, par lettre du 21 décembre 2010, l'a informé que la prime de forfait vitrerie serait intégrée dans sa rémunération brute mensuelle.

Le 20 décembre 2011, l'employeur notifie au salarié une mutation disciplinaire.

Le 10 juin 2014, le salarié saisit a juridiction prud'homale de demandes en paiement de rappels de salaire et de primes.

Le 14 novembre 2014, l'employeur convoque le salarié à un entretien préalable en vue de son licenciement et lui notifie une mise à pied à titre conservatoire.

Le 20 novembre 2014, puis le 2 décembre 2014, l'employeur convoque le comité d'entreprise en réunion extraordinaire afin de délibérer sur le licenciement envisagé du salarié.

Le 10 décembre 2014, l'employeur demande à l'inspecteur du travail l'autorisation de le licencier.

Le 19 janvier 2015, l'inspecteur du travail refuse d'autoriser ce licenciement.

Par lettre du 26 janvier 2015, l'employeur demande au salarié de reprendre son poste et lui précise qu’il lui notifie un avertissement pour les faits qui l'avaient conduit à envisager un licenciement à son encontre.

Par ordonnance du 29 janvier 2015, le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes a condamné l'employeur à verser au salarié une provision à valoir sur les primes de forfait vitrerie.

Cette ordonnance a été annulée par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 21 juin 2018. 

Dans cette affaire et notre publication de ce jour, nous abordons le point précis de la « modification du contrat de travail ».

La cour d’appel de Versailles, par arrêt du 26 novembre 2020, considère que :

  • La mutation avait été notifié le salarié le 4 janvier 2012 ;
  • Et que par la suite, il n’avait été constaté aucune protestation de la protestation et que ce dernier avait poursuivi son activité au sein de l’entreprise.

La Cour de cassation ne partage pas du tout l’avis de la cour d’appel, dont elle casse et annule l’arrêt, renvoyant les parties devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée. 

La Cour de cassation confirme en effet que : 

  • Aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé et il appartient à l'employeur d'engager la procédure de licenciement en cas de refus du salarié de cette modification en demandant l'autorisation de l'inspecteur du travail ;
  • L'acceptation par un salarié protégé d'une modification du contrat de travail ou d'un changement des conditions de travail ne peut résulter ni de l'absence de protestation de celui-ci, ni de la poursuite par l'intéressé de son travail. 

Extrait de l’arrêt :

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil et l'article L. 2411-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :

  1. Aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé et il appartient à l'employeur d'engager la procédure de licenciement en cas de refus du salarié de cette modification en demandant l'autorisation de l'inspecteur du travail.
  1. L'acceptation par un salarié protégé d'une modification du contrat de travail ou d'un changement des conditions de travail ne peut résulter ni de l'absence de protestation de celui-ci, ni de la poursuite par l'intéressé de son travail.
  1. Pour débouter le salarié de sa demande d'annulation de la mutation disciplinaire, l'arrêt retient que cette mutation a été mise en oeuvre le 4 janvier 2012 suivant la lettre de l'employeur du 20 décembre 2011, après entretien préalable au cours duquel le salarié a été entendu assisté d'un salarié de l'entreprise, que le salarié a rejoint son nouveau lieu de travail à la date indiquée et ne justifie nullement les éléments de nullité qui entacheraient cette décision ainsi que l'existence d'un préjudice en résultant, n'explicitant pas la communauté de travail à laquelle il aurait été éloigné de ce fait alors qu'il travaillait auprès de clients et pas dans le cadre d'un emploi sédentaire avec d'autres salariés de l'entreprise.
  1. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Cour de cassation du , pourvoi n°21-20572

Commentaire de LégiSocial

Nombreux sont les arrêts concernant la « modification du contrat de travail ». 

Voici un rappel de quelques arrêts que nous avons abordés sur notre site : 

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Références

Pas de modification du contrat possible en cas de silence du salarié

Cour de cassation du 16/10/2019, pourvoi n° 17-18443

Un recours systématique à des heures supplémentaires est considéré comme une modification du contrat de travail

Cour de cassation du 8/09/2021, pourvoi n° 19-16908

Passer d’un horaire de nuit à un horaire de jour constitue une modification du contrat de travail

Cour de cassation du 14/09/2022, pourvoi n° 21-13015