Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé le 2 décembre 2005.
Le salarié, délégué du personnel, est convoqué le 3 août 2015 à un entretien préalable et mis à pied à titre conservatoire.
Par décision du 14 octobre 2015, l'inspection du travail refuse d'accorder l'autorisation de licencier le salarié.
Ce dernier saisit la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail puis notifie à l'employeur son départ à la retraite à compter du 1er novembre 2016.
Dans sa demande auprès de la juridiction prud’homale, le salarié demande l’annulation de sa mise à pied, et de ses effets notamment sur sa rémunération, estimant que le refus de son licenciement par l’inspection du travail le lui ouvre droit.
La cour d’appel d'Aix-en-Provence, par arrêt du 12 février 2021, déboute le salarié de sa demande.
Elle estime en effet que :
- Eu égard au fait que le salarié s'est trouvé placé en arrêt maladie le 3 août 2015, soit le jour même de sa convocation par huissier à l'entretien préalable avec sa mise à pied conservatoire, sans qu'il ne soit possible de déterminer en l'absence de précision horaire, si l'un est antérieur à l'autre ;
- Et que le salarié a perçu durant cette période de mise à pied, les indemnités journalières dues et que l'employeur n'était pas tenu au paiement de l'intégralité des salaires afférents à cette période mais uniquement au paiement du complément de salaire, qui a été versé au salarié.
La Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel, dont elle casse et annule l’arrêt sur ce point.
Elle indique à cette occasion que :
Vu l'article L. 2421-3 du code du travail :
- Si l'autorisation de licenciement pour faute grave, d’un salarié protégé, demandée par l'employeur est refusée ;
- La mise à pied du salarié est annulée et ses effets supprimés de plein droit.
Ainsi, la cour d’appel en déboutant le salarié de sa demande, n’avait pas pris en considération le sait que :
- L’inexécution par le salarié de toute prestation de travail durant la période considérée avait pour cause la mise à pied prononcée à titre conservatoire par l'employeur, peu important que ce dernier ait pu être placé en arrêt maladie pendant cette même période.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la CourVu l'article L. 2421-3 du code du travail :
-
Il résulte de ce texte que si l'autorisation de licenciement pour faute grave demandée par l'employeur est refusée, la mise à pied du salarié est annulée et ses effets supprimés de plein droit.
-
Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire dû pour la période de mise à pied conservatoire, l'arrêt retient que le salarié s'est trouvé placé en arrêt maladie le 3 août 2015, soit le jour même de sa convocation par huissier à l'entretien préalable avec sa mise à pied conservatoire, sans qu'il ne soit possible de déterminer en l'absence de précision horaire, si l'un est antérieur à l'autre, que le salarié a perçu durant cette période de mise à pied, les indemnités journalières dues et que l'employeur n'était pas tenu au paiement de l'intégralité des salaires afférents à cette période mais uniquement au paiement du complément de salaire, qui a été versé au salarié.
-
En statuant ainsi, alors que l'inexécution par le salarié de toute prestation de travail durant la période considérée avait pour cause la mise à pied prononcée à titre conservatoire par l'employeur, peu important que ce dernier ait pu être placé en arrêt maladie pendant cette même période, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.
Commentaire de LégiSocial
La mise à pied est une procédure que les services RH et les employeurs doivent bien maîtriser afin de ne pas commettre d’erreur.
Voici un rappel de quelques notions importantes à ce sujet, issues de notre fiche pratique exclusivement à cette thématique.
Lire aussi : Comment gérer la mise à pied et le licenciement en 2024 ? Fiche pratique
Le licenciement d’un salarié peut être prononcé après sa mise à pied. C’est pour cette raison que la présente fiche pratique vous est proposée, vous y retrouverez des notions importantes concernant cette suspension du contrat de travail.
2 catégories et une même conséquence
Un salarié peut se voir prononcer 2 sortes de mise à pied.
- La mise à pied conservatoire ;
- La mise à pied disciplinaire.
Quelle soit la catégorie, les conséquences sont légalement identiques à savoir :
- Absence de rémunération ;
- Non-prise en compte de cette période pour l’acquisition de congés payés.
La mise à pied conservatoire
Elle est prononcée dans l’attente d’une sanction (fréquemment un licenciement pour faute grave ou lourde).
Cette période de suspension du contrat de travail n’est pas rémunérée, sauf bien entendu si aucune sanction n’est prononcée au terme de la mise à pied.
Il est important d’avoir à l’esprit que la mise à pied conservatoire n’est pas une sanction disciplinaire.
Article L1332-3
Lorsque les faits reprochés au salarié ont rendu indispensable une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiat, aucune sanction définitive relative à ces faits ne peut être prise sans que la procédure prévue à l'article L. 1332-2 ait été respectée
Article L1332-2
Modifié par LOI n°2012-387 du 22 mars 2012 - art. 48
Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.
Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.
Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.
La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé
La mise à pied disciplinaire
Il s’agit d’une sanction, ce qui sous-entend que l’employeur ne pourra alors prononcer aucune sanction supplémentaire pour le même fait.
En effet, il est de jurisprudence constante de considérer qu’un même fait ne peut être sanctionné 2 fois.
Non bis in idem
Non bis in idem qui est une locution latine qui signifie « pas deux fois pour la même chose », signifiant en l’espèce qu’une mise à pied disciplinaire ne peut être suivie, pour le même fait, d’une nouvelle sanction comme un licenciement.