Licenciement économique et consultation du CSE : la Cour de cassation rappelle les règles

Jurisprudence
Paie Licenciement

La suppression d'un poste, même si elle s'accompagne de l'attribution des tâches accomplies par le salarié licencié à un autre salarié demeuré dans l'entreprise, est un licenciement économique, si elle repose sur un motif économique.

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Contexte de l'affaire

Préambule :

La présente affaire a été abordée dans le cadre d’une autre publication intitulée :

« Lorsque la suppression d’un poste repose sur un motif économique, la procédure de licenciement économique doit être lancée » 

Un salarié est engagé en qualité de chargé d'opération le 15 mars 1993, occupant  en dernier lieu les fonctions de directeur de projet, responsable de l'unité opérationnelle « Routes-infrastructures ».

A la suite de son refus de deux propositions de reclassement, le salarié a été avisé le 16 octobre 2015 des motifs conduisant à son licenciement économique et le contrat de travail a pris fin le 6 novembre 2015 à l'issue du délai de rétractation du contrat de sécurisation professionnelle que le salarié avait accepté. 

Le salarié saisit la juridiction prud’homale, estimant que l’employeur doit être condamné au paiement de dommages et intérêts en raison d’un défaut de consultation du CSE (NDLR : CE dans la présente affaire). 

La cour d'appel de Versailles, par arrêt du 12 novembre 2020, donne raison au salarié.

Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis de la cour d’appel dont elle casse et annule l’arrêt, rappelant que dans la présente affaire « le licenciement économique n'avait été envisagé qu'à l'égard d'un seul salarié », ainsi que les principes suivants : 

Vu l'article L. 1233-8 du code du travail dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

  • L’employeur n'a l'obligation de réunir et consulter le comité d'entreprise (ou CSE) dans les entreprises d'au moins 50 salariés ou les délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés ;
  • Que lorsqu'il envisage de procéder à un licenciement pour motif économique d'au moins 2 salariés dans une même période de 30 jours.

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1233-8 du code du travail dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

  1. Il résulte de ce texte que l'employeur n'a l'obligation de réunir et consulter le comité d'entreprise dans les entreprises d'au moins cinquante salariés ou les délégués du personnel dans les entreprises de moins de cinquante salariés, que lorsqu'il envisage de procéder à un licenciement pour motif économique d'au moins deux salariés dans une même période de trente jours.
  2. Pour condamner la société à payer des dommages-intérêts au salarié en raison du défaut par l'employeur de consultation des délégués du personnel, la cour d'appel a retenu que l'employeur avait envisagé dans un délai de trente jours un licenciement économique par suppression de trois postes de travail et qu'il importait peu que deux des salariés concernés aient accepté la proposition de reclassement au sein d'autres sociétés du groupe qui leur avait été présentée, de sorte que le licenciement présentait un caractère collectif imposant à l'employeur la consultation des délégués du personnel.
  3. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que deux des salariés concernés avaient accepté leur reclassement interne au sein du groupe, en sorte que le licenciement économique n'avait été envisagé qu'à l'égard d'un seul salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Cour de cassation du , pourvoi n°21-10391

Commentaire de LégiSocial

La présente affaire abordant le licenciement économique de moins de 10 salariés sur une période de 30 jours. 

Rappelons quelques notions concernant les procédures en cas de licenciement économique de 2 à 9 salariés en 2023. 

Les informations ci-après étant extraites d’une de nos fiches pratiques consacrées à cette thématique (avec une présentation synthétique des procédures à mettre en œuvre). 

Procédure

L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours est tenu de réunir et consulter le CSE (dans les entreprises de 10 salariés et plus).

D’ici la mise en place du CSE, si l’entreprise n’a pas de CE, ce sont les DP qui doivent être consultés.

Il doit joindre à la convocation tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif, en indiquant :

  • La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ;
  • Le nombre de licenciements envisagé ;
  • Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ;
  • Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ;
  • Le calendrier prévisionnel des licenciements ;
  • Les mesures de nature économique envisagées ;
  • Le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail.
  • La convocation doit être adressée aux membres du CSE au moins 3 jours avant la date de la 1ère réunion.

Article L1233-10

Modifié par Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 - art. 20

L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la réunion prévue à l'article L. 1233-8, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif.

Il indique :

1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ;

2° Le nombre de licenciements envisagé ;

3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ;

4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ;

5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ;

6° Les mesures de nature économique envisagées ;

7° Le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail.

NOTA : 

Conformément à l'article 40-VI de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ces dispositions sont applicables aux procédures de licenciement économique engagées dans les entreprises ayant mis en place un comité social et économique.

  • Au terme de la réunion, l’employeur fixe l’ordre des licenciements ;
  • Les salariés sont convoqués à un entretien préalable selon l’article L 1233-11 du code du travail.

Article L1233-11

L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu'il s'agisse d'un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable.

La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.

L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

Lors de l’entretien préalable, au minimum 5 jours ouvrables après la réception de la lettre de convocation, l’employeur doit informer le salarié sur :

  1. Le CSP (contrat de sécurisation professionnelle) (entreprise de moins de 1.000 salariés ou entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire ou en cessation d’activité) ;
  2. Le congé de reclassement (entreprises de 1.000 salariés et plus) La convention de reclassement personnalisés (CRP) ou convention de transition professionnelle (CTP) pour les entreprises comptant moins de 1 000 salariés.
  • La notification du licenciement par l’employeur doit respecter un délai de 7 jours ouvrables au minimum (15 jours si le salarié est cadre) ;
  • La notification des licenciements doit être transmise à DIRECCTE dans un délai de 8 jours suivant la notification du licenciement aux salariés.