Salariés à temps partiel : le droit à la priorité d’attribution d’un temps minimal ou plein

Jurisprudence
Paie Temps travail effectif

Légalement, les salariés à temps partiel souhaitant bénéficier d’un emploi à temps plein, ou avec la durée minimale temps partiel, ont priorité pour l'attribution d'un emploi de leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent.

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Une salariée est engagée en qualité d'hôtesse, caissière, barmaid, à temps partiel, le 3 septembre 2011, par une société de Bowlings.


Le 25 avril 2016, elle saisit la juridiction prud'homale de demandes se rapportant à l'exécution du contrat de travail, d'une demande de résiliation judiciaire et de demandes en paiement de sommes en conséquence.

Elle demande en outre le paiement de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité d'emploi.

La cour d'appel de Paris, par arrêt du 4 novembre 2020, déboute la salariée de sa demande, mais cette dernière décide de se pourvoir en cassation.

La Cour de cassation donne raison à la salariée, indiquant à cette occasion que : 

En application des dispositions légales :

  • Les salariés à temps partiel qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi d'une durée au moins égale à celle mentionnée à l'article L. 3123-14-1, devenu L. 3123-7, alinéa 1, ou un emploi à temps complet dans le même établissement, ou à défaut, dans la même entreprise ;
  • Ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent ;
  • L'employeur porte à la connaissance de ces salariés la liste des emplois disponibles correspondants.

Il en résulte qu'en cas de litige :

  • Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation en établissant, soit qu'il a porté à la connaissance du salarié la liste des postes disponibles ressortissant de sa catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent, soit en justifiant de l'absence de tels postes.

Selon la Cour de cassation :

  • Inverse la charge de la preuve, la cour d’appel qui déboute une salariée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité d'emploi, retenant pour cela qu'elle ne justifie pas qu'il y avait des emplois à temps plein correspondant à sa catégorie professionnelle à pourvoir, l'employeur contestant avoir recruté des salariés à temps complet dans sa catégorie professionnelle pendant la période litigieuse.

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3123-8 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'article L. 3123-3 du même code et l'article 1315 devenu 1353 du code civil :

  1. Selon les deux premiers de ces textes, les salariés à temps partiel qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi d'une durée au moins égale à celle mentionnée à l'article L. 3123-14-1, devenu L. 3123-7, alinéa 1, ou un emploi à temps complet dans le même établissement, ou à défaut, dans la même entreprise, ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent. L'employeur porte à la connaissance de ces salariés la liste des emplois disponibles correspondants.
  2. Il en résulte qu'en cas de litige, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation en établissant, soit qu'il a porté à la connaissance du salarié la liste des postes disponibles ressortissant de sa catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent, soit en justifiant de l'absence de tels postes.
  3. Pour débouter la salariée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité d'emploi, l'arrêt retient qu'elle ne justifie pas qu'il y avait des emplois à temps plein correspondant à sa catégorie professionnelle à pourvoir, l'employeur contestant avoir recruté des salariés à temps complet dans sa catégorie professionnelle pendant la période litigieuse.
  4. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

  1. La cassation prononcée sur le troisième moyen n'emporte pas cassation des chefs de dispositif déboutant la salariée de sa demande de résiliation judiciaire et de ses demandes subséquentes, la salariée n'ayant pas invoqué à l'appui de ces demandes le non-respect par l'employeur de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre du non-respect de la priorité d'attribution d'un emploi à temps complet.
  2. La cassation sur le troisième moyen n'emporte pas cassation des chefs de dispositif condamnant l'employeur à verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter la charge des dépens, justifiés par d'autres condamnations non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [F] de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre du non-respect de la priorité d'attribution d'un emploi à temps complet, l'arrêt rendu le 4 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°21-19742

La présente affaire met en avant une disposition prévue dans le cadre de « l’égalité des droits entre salariés à temps partiel et à temps plein »

Cette thématique est abordée dans une fiche pratique exclusivement consacrée à cette thématique, à retrouver au lien suivant : 

Occuper ou reprendre un emploi à temps complet (ou partiel) 

C’est désormais à l’article L 3123-3 que nous retrouvons les dispositions concernant cette thématique, avec quelques modifications : 

  • Les salariés à temps partiel qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi à temps complet et les salariés à temps complet qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi à temps partiel dans le même établissement, ou à défaut, dans la même entreprise ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent ;
  • Les salariés à temps partiel qui souhaitent bénéficier de la durée minimale de travail hebdomadaire prévue pour les contrats à temps partiel dans le même établissement, ou à défaut, dans la même entreprise ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent ;
  • L'employeur porte à la connaissance de ces salariés la liste des emplois disponibles correspondants.

Article L3123-3

Modifié par Ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 - art. 1

Les salariés à temps partiel qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi d'une durée au moins égale à celle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 3123-7 ou un emploi à temps complet et les salariés à temps complet qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi à temps partiel dans le même établissement ou, à défaut, dans la même entreprise ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent ou, si une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche étendu le prévoit, d'un emploi présentant des caractéristiques différentes.

L'employeur porte à la connaissance de ces salariés la liste des emplois disponibles correspondants.

Nota :

Les dispositions selon lesquelles, une convention collective ou un accord de branche étendu peuvent prévoir la possibilité pour l'employeur de proposer au salarié à temps partiel un emploi à temps complet ne ressortissant pas à sa catégorie professionnelle ou un emploi à temps complet non équivalent, se retrouvent désormais dans un article séparé soit l’article L 3123-18.

Y est ajouté l’alinéa selon lequel une convention collective ou un accord de branche étendu peuvent prévoir également de proposer au salarié à temps complet cette fois, un emploi à temps partiel ne ressortissant pas à sa catégorie professionnelle ou un emploi à temps partiel non équivalent. 

Article L3123-18

Modifié par Ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 - art. 1

Une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche étendu peut prévoir la possibilité pour l'employeur de :

1° Proposer au salarié à temps partiel un emploi à temps complet ou d'une durée au moins égale à la durée minimale mentionnée au premier alinéa de l'article L. 3123-7 ne ressortissant pas à sa catégorie professionnelle ou un emploi à temps complet non équivalent ;

2° Proposer au salarié à temps complet un emploi à temps partiel ne ressortissant pas à sa catégorie professionnelle ou un emploi à temps partiel non équivalent.

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