Modification du contrat de travail : en cas de refus du salarié, un licenciement peut être prononcé pour un autre motif

Jurisprudence
Paie Licenciement

Une modification du contrat de travail ne peut être imposée au salarié, l’employeur qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail, peut prononcer une autre sanction, y compris un licenciement.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé le 11 janvier 2006, et exerce en dernier lieu les fonctions de directeur des opérations, statut cadre niveau IV.
Le salarié est licencié pour faute le 21 avril 2017, mais saisit la juridiction prud’homale, afin que son licenciement soit reconnu dépourvu de cause réelle et sérieuse. 

La cour d'appel de Versailles, par arrêt du 1er juillet 2021, déboute le salarié de sa demande. 

Mais ce dernier décide de se pourvoir en cassation.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, indiquant présentement que : 

Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié :

  • L’employeur qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée.

Ayant été relevé :

  • Qu’en réponse au courrier de l'employeur du 29 mars 2017 ;
  • Le salarié avait indiqué dans une lettre du 5 avril 2017 : « Eu égard au contexte de grande difficulté économique que vit notre secteur professionnel ; dans la mesure où stratégiquement vous décidez que l'organisation actuelle n'est finalement pas la bonne puisqu'elle nécessite la scission en trois directions de mon poste ; dans la mesure où mon investissement chez (…) est absolu au regard de la réussite de notre projet professionnel ; et enfin, compte tenu de la forte pression qui s'exerce sur moi actuellement, j'accepte en conséquence les nouvelles fonctions que vous me proposez par avenant à mon contrat de travail à effet du 10 avril 2017 déjà signé par vous. » ;
  • Les termes ambigus de cette lettre ne permettaient pas de caractériser une acceptation claire et non équivoque du salarié à la mesure de rétrogradation ;
  • Il s’en déduisait que la société pouvait prononcer une autre sanction telle qu'un licenciement.

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

  1. Une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l'employeur qui se heurte au refus d'une mesure de rétrogradation impliquant une modification du contrat de travail, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée.
  1. La cour d'appel a relevé qu'en réponse au courrier de l'employeur du 29 mars 2017, le salarié avait indiqué dans une lettre du 5 avril 2017 : « Eu égard au contexte de grande difficulté économique que vit notre secteur professionnel ; dans la mesure où stratégiquement vous décidez que l'organisation actuelle n'est finalement pas la bonne puisqu'elle nécessite la scission en trois directions de mon poste ; dans la mesure où mon investissement chez (…) est absolu au regard de la réussite de notre projet professionnel ; et enfin, compte tenu de la forte pression qui s'exerce sur moi actuellement, j'accepte en conséquence les nouvelles fonctions que vous me proposez par avenant à mon contrat de travail à effet du 10 avril 2017 déjà signé par vous. »
  2. C'est en conséquence par une interprétation que les termes ambigus de cette lettre rendaient nécessaire, exclusive de dénaturation, que la cour d'appel a estimé qu'elle ne permettait pas de caractériser une acceptation claire et non équivoque du salarié à la mesure de rétrogradation et en a exactement déduit que la société pouvait prononcer une autre sanction telle qu'un licenciement.
Cour de cassation du , pourvoi n°21-22269

Commentaire de LégiSocial

Fréquents sont les arrêts de la Cour de cassation qui abordent le cas particulier d’une modification du contrat de travail.

Nous vous proposons un rappel de précédents arrêts proposés sur notre site :

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Références

Une augmentation de salaire constitue une modification du contrat de travail

  1. La rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail ;
  2. Qui ne peut être modifié ni dans son montant ni dans sa structure sans son accord, peu important que le nouveau mode de rémunération soit supérieur au salaire antérieur.

Cour de cassation du 26 janvier 2017, pourvoi n° 15-21352

Pas de modification du contrat possible en cas de silence du salarié

  • Le contrat de travail ne peut être modifié qu'avec l'accord exprès du salarié, lequel ne peut résulter de son silence ou de la poursuite par lui du travail.

Cour de cassation du 16 octobre 2019, pourvoi n° 17-18443

Passer d’un horaire de nuit à un horaire de jour constitue une modification du contrat de travail

  • Ayant été retenu que le salarié avait travaillé dès son embauche en février 2016 et jusqu'au 30 septembre 2016 selon des horaires de nuit ;
  • Et qu'après une première modification des horaires de travail au mois d'octobre 2016, la proportion entre les horaires de nuit et les horaires de jour avait été radicalement inversée par l'employeur à compter du mois de novembre 2016 ;
  • Il s’en déduisait que le changement par l'employeur des horaires de nuit en horaires de jour constituait une modification du contrat de travail nécessitant l'accord du salarié.

Cour de cassation du 14 septembre 2022, pourvoi n° 21-13015