Contexte de l'affaire
Un salarié est engagé à compter du 5 février 2007 en qualité de consultant senior, statut cadre.
Après lui avoir notifié un avertissement le 19 juillet 2012, la société l'a licencié le 27 juin 2013.
Le salarié saisit la juridiction prud'homale d'une contestation de la rupture de son contrat de travail, de demandes afférentes ainsi que d'une demande relative à la perte de stock-options.
La cour d'appel de Versailles, par arrêt du 24 juin 2021, déboute le salarié de sa demande.
Mais ce dernier décide de se pourvoir en cassation.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, indiquant présentement que :
Ayant été relevé que :
- Dans un courriel du 3 avril 2013, le salarié avait exprimé une critique à l'égard de son supérieur hiérarchique auquel il reprochait d'avoir réagi tardivement à une demande de sa part, en des termes insultants et irrespectueux, non justifiés par le contexte « J'aimerais que tes réponses soient en correspondance avec ton poste de manager et je ne veux plus de ce type de réponse bidon », propos irrespectueux qu'il avait réitérés dans un second courriel envoyé le lendemain ;
- Et qu’ensuite l'intéressé avait écrit à un autre salarié : « heureusement que d'autres commerciaux sont plus aguerris et réactifs » et avait émis, dans un courriel du 13 février 2013 adressé à son supérieur hiérarchique, un commentaire désobligeant à l'égard d'une collaboratrice consultante, libellé en ces termes : « Encore une fois elle ne prévient personne ni le client ni le consultant ; si elle ne fait pas d'effort je t'invite à trouver un nouveau consultant pour ce compte. J'ai déjà eu des accrochages avec elle sur le fait qu'elle ne dise rien au consultant sur site. N'hésites pas à en parler à son responsable le cas échéant car elle n'a pas retenu la leçon » ;
- Et enfin que le salarié avait fait l'objet d'un précédent avertissement motivé par son comportement et un mode de communication totalement inappropriés avec ses collègues de travail, son employeur l'ayant incité à avoir une attitude plus constructive dans ses relations de travail.
Il s’en déduisait :
- Qu’il résultait l'existence de propos excessifs;
- Et que le comportement du salarié constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Extrait de l’arrêt :
Réponse de la Cour
- La cour d'appel a, d'abord, relevé que, dans un courriel du 3 avril 2013, le salarié avait exprimé une critique à l'égard de son supérieur hiérarchique auquel il reprochait d'avoir réagi tardivement à une demande de sa part, en des termes insultants et irrespectueux, non justifiés par le contexte « J'aimerais que tes réponses soient en correspondance avec ton poste de manager et je ne veux plus de ce type de réponse bidon », propos irrespectueux qu'il avait réitérés dans un second courriel envoyé le lendemain.
- Elle a, ensuite, constaté que l'intéressé avait écrit à un autre salarié : « heureusement que d'autres commerciaux sont plus aguerris et réactifs » et avait émis, dans un courriel du 13 février 2013 adressé à son supérieur hiérarchique, un commentaire désobligeant à l'égard d'une collaboratrice consultante, libellé en ces termes : « Encore une fois elle ne prévient personne ni le client ni le consultant ; si elle ne fait pas d'effort je t'invite à trouver un nouveau consultant pour ce compte. J'ai déjà eu des accrochages avec elle sur le fait qu'elle ne dise rien au consultant sur site. N'hésites pas à en parler à son responsable le cas échéant car elle n'a pas retenu la leçon ».
- Elle a, également, souligné que le salarié avait fait l'objet d'un précédent avertissement motivé par son comportement et un mode de communication totalement inappropriés avec ses collègues de travail, son employeur l'ayant incité à avoir une attitude plus constructive dans ses relations de travail.
- De ces constatations et énonciations, dont il résultait l'existence de propos excessifs, la cour d'appel a exactement déduit un abus du salarié dans l'exercice de la liberté d'expression et, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le comportement du salarié constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement.
- Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Commentaire de LégiSocial
La Cour de cassation se penche assez souvent sur la « liberté d’expression » dont peut bénéficier un salarié, mais également à ses limites.
Nous vous proposons un rappel de précédents arrêts proposés sur notre site, qui abordent cette thématique :
Thématiques | Références |
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