Contexte de l'affaire
L’affaire concerne une salariée engagée le 1/04/1996 en qualité d'hôtesse de caisse.
Elle est licenciée pour faute grave le 23/01/2006 pour vol.
Dans la lettre de licenciement, comme le rappellent les juges de la Cour de cassation d’ailleurs, l’employeur reproche à la salariée le vol d’un DVD d’une valeur de 150 €.
Ce vol a été constaté lors du passage des portiques de sécurité, alors que la salariée faisait ses achats dans le magasin comme une simple cliente.
L’entreprise a donc procédé à la fouille et découvert le DVD dans le cabas de la salariée.
La salariée saisit la juridiction prud'homale souhaitant faire requalifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dans un premier temps, la cour d’appel donne raison à la salariée mais son employeur conteste ce jugement et se pourvoit en cassation.
La Cour de cassation confirme le jugement de la cour d’appel et rejette le pourvoi.
A l’appui de leur décision, les juges indiquent que :
- La fouille des effets personnels s’est faite au mépris des conditions exigées par la jurisprudence, à savoir : accord du salarié+ avertissement préalable de son droit de s’y opposer + le droit d’exiger la présence d’un témoin ;
- Le règlement intérieur exigeait de surcroît la présence du directeur, en présence d'un tiers appartenant à l'entreprise ou d'un représentant du personnel et dans des conditions préservant la dignité et l'intimité des personnes.
Mais attendu que l'arrêt relève que le règlement intérieur prévoyait des conditions particulières pour la vérification des objets transportés et la fouille des personnes qui n'ont pas été respectées par l'employeur ; que la cour d'appel, qui a constaté que la violation des procédures internes également reprochée à la salariée n'était pas justifiée, celle-ci ayant observé les seules prescriptions existant dans le règlement intérieur relatives à la sortie du personnel, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Rappel des faits …
la lettre de licenciement expose que le 9 janvier 2006, à la fin de son poste, Sylvie X... est sortie du magasin par une caisse qui était fermée avec dans son cabas un lecteur DVD portable d'une valeur de 150 euros qu'elle avait pris en rayon et qu'elle n'avait pas payé ; que lorsqu'elle est passée au niveau des portiques situés à l'entrée du sas du magasin, l'alarme s'est déclenchée sans qu'elle ne se soit arrêtée que le service de sécurité l'a interpellée et a examiné le contenu de son cabas ; qu'il lui a été demandé de justifier du paiement de la marchandise, ce qu'elle n'a pu faire, reconnaissant qu'elle ne l'avait pas payée ; que l'employeur ne peut apporter aux libertés individuelles ou collectives des salariés que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accompli et proportionnées au but recherché ; qu'il ne peut ainsi, sauf circonstances exceptionnelles, ouvrir les sacs appartenant aux salariés pour en vérifier le contenu qu'avec leur accord et à la condition de les avoir avertis de leur droit de s'y opposer et d'exiger la présence d'un témoin ; qu'en l'espèce il ne ressort nullement des pièces produites que Sylvie X... a été avertie de le jour de son interpellation de son droit à s'opposer à la fouille de son sac et d'exiger la présence d'un témoin ; qu'en méconnaissant cette obligation, la société Y s'est privée du droit de se prévaloir de la preuve obtenue par la fouille du sac de Sylvie X..., peu importe que le règlement intérieur de la société prévoyait que les salariés disposaient de la possibilité de s'opposer à une telle vérification ; qu'au surplus, le règlement intérieur de la société, s'agissant des vérifications des objets transportés et de la fouille des personnes, indiquait que la vérification devait être faite par le directeur, en présence d'un tiers appartenant à l'entreprise ou d'un représentant du personnel et dans des conditions préservant la dignité et l'intimité des personnes ; qu'il résulte des énonciations de la lettre de licenciement que la vérification de Sylvie X... s'est faite en violation même du règlement intérieur ;
Commentaire de LégiSocial
Encore un jugement de la Cour de cassation qui concerne la fouille des effets personnels du salarié.
Il convient d’être d’une grande prudence dans le domaine.
Il est important en effet de savoir que :
- La fouille doit obligatoirement s’effectuer avec l’accord du salarié ;
- Le salarié peut s’opposer à cette fouille ;
- Il peut exiger la présence d’un témoin.
Et de surcroît, il convient de vérifier les conditions dans lesquelles cette fouille éventuelle peut s’effectuer selon les conditions établies par le règlement intérieur comme dans cette affaire.
Si tout cela n’est pas respecté, le licenciement prononcé pour faute grave risque d’être requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, comme ce fut le cas dans cette affaire.
Pour terminer, précisons en outre que l’ancienneté de la salariée (10 ans) et l’absence de sanctions antérieures furent prises en compte par les juges de la Cour de cassation.