Les documents remis au salarié doivent être rédigés en français, sauf ceux reçus de l’étranger

Jurisprudence
Paie Contrat de travail

Tout document comportant des obligations pour le salarié ou dispositions dont la connaissance est nécessaire pour exécuter son travail doit être rédigé en français, règle non-applicable aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers.

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Contexte de l'affaire

Un salarié est engagé en qualité de directeur de mission, à compter du 15 mars 2004.

En dernier lieu, il exerce les fonctions de chef de projet avant-vente ressources.

Le 27 décembre 2017, le salarié saisit la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

La relation de travail prend fin le 31 décembre 2017. 

La cour d'appel de Versailles, par un arrêt du 20 janvier 2022, déboute le salarié de sa demande, relevant le fait que :

  • Les documents de travail, donnant lieu à des traductions dans le cadre du présent litige, étaient rédigés en langue anglaise, utilisée au sein de l'entreprise, par ailleurs filiale d'une société américaine ;
  • Retenant que cette circonstance ne peut suffire à rendre inopposables au salarié les plans de rémunérations.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, indiquant à cette occasion que : 

  • Tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail doit être rédigé en français;
  • Cette règle n'est pas applicable aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers. 

Dans l’affaire présente :

  • La cour d’appel ne pouvait pas débouter le salarié de sa demande en paiement de rappels de salaire ;
  • Alors qu’elle relevait que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuellen’étaient pas rédigés en français, et qu’il n’était pas constaté qu’ils avaient été reçus de l’étranger

Extrait de l’arrêt :


Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

  1. La cassation prononcée entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif déboutant le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et le condamnant au paiement d'une indemnité de procédure, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Cour de cassation du , pourvoi n°22-13770

Commentaire de LégiSocial

La présente affaire nous permet de rappeler quelques notions fondamentales concernant la rédaction du contrat de travail.

Les informations proposées ci-après sont extraites d’une de nos fiches pratiques consacrées à cette thématique. 

Contrat en français ou en étranger ?

Lorsqu'il est conclu en France, le contrat doit être rédigé en français. Il peut toutefois comporter des termes étrangers, sans correspondance en français, s'ils sont clairement expliqués

Le salarié étranger peut demander la traduction de son contrat dans sa langue d'origine

Article L1221-3

Le contrat de travail établi par écrit est rédigé en français.

Lorsque l'emploi qui fait l'objet du contrat ne peut être désigné que par un terme étranger sans correspondant en français, le contrat de travail comporte une explication en français du terme étranger.

Lorsque le salarié est étranger et le contrat constaté par écrit, une traduction du contrat est rédigée, à la demande du salarié, dans la langue de ce dernier. Les deux textes font également foi en justice. En cas de discordance entre les deux textes, seul le texte rédigé dans la langue du salarié étranger peut être invoqué contre ce dernier.

L'employeur ne peut se prévaloir à l'encontre du salarié auquel elles feraient grief des clauses d'un contrat de travail conclu en méconnaissance du présent article.

Clauses d’objectifs

Selon l’article L 1321-6, tout comme le règlement intérieur doit être rédigé en Français, il en de même pour :

  • Tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail (comme la clause d’objectifs fixant la rémunération variable dans la présente affaire).

Précision importante, ces dispositions ne sont toutefois pas applicables :

  • Aux documents reçus de l'étranger ;
  • Aux documents destinés à des étrangers

Article L1321-6

Le règlement intérieur est rédigé en français. Il peut être accompagné de traductions en une ou plusieurs langues étrangères.

Il en va de même pour tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail.

Ces dispositions ne sont pas applicables aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers

Arrêt de la Cour de cassation du 21/09/2017 

Un arrêt de la Cour de cassation traite de cette particularité, il est consultable sur notre site, « Fixation des objectifs en anglais : la Cour de cassation précise » en cliquant ici.

Dans cette affaire, un salarié français avait reçu des documents rédigés en langue anglaise, se rapportant aux objectifs à atteindre, motivant sa rémunération en conséquence.

Son employeur avait par la suite mis à disposition, sur l’intranet de l’entreprise, la traduction en français.

Le salarié considérait que les objectifs en anglais ne lui étaient pas opposables, nonobstant la rédaction en français sur l’intranet de la société.

La cour de cassation déboute le salarié de sa demande.

Cour de cassation du 21/09/2017, pourvoi n° 16-20426